Sujet bac : annale 20 mars 2023
Dissertation d’histoire-géographie, géopolitique et sciences politiques Sujet 1 – La production et la circulation de la connaissance connaissent-elles des frontières ? |
Remarques préliminaires :
Le sujet invite à s’intéresser aux modalités de la production et de la circulation du savoir. S’il ne comprend pas de bornes chronologiques, il est néanmoins étroitement lié aux concepts d’économie et de « société du savoir », qui interrogent avant tout la période contemporaine marquée par le développement des nouvelles technologies de l’information et de la communication.
Introduction :
Dans son traité de stratégie L’art de la guerre, Sun Tzu fait de la connaissance le pivot de la permanence des États.
Débutez toujours votre travail par une accroche originale afin de susciter l’intérêt de votre lecteur et de vous démarquer.
En effet, depuis l’Antiquité, tous les domaines où s’exerce le savoir et les connaissances en elles-mêmes constituent un enjeu de puissance pour différents acteurs, dont les États. Dans son ouvrage The productionand distribution of knowledge in the United States, publié en 1962, l’économiste Fritz Machlup met en avant la notion d’« économie du savoir », invitant à s’intéresser aux modalités et aux acteurs de la production et de la circulation des connaissances, tandis que Peter Drucker, dans sa thèse The Age of Discontinuity, estime que dans le cadre de la « société de la connaissance » le savoir et sa transmission sont devenus un facteur de puissance économique voire géopolitique.
Une bonne dissertation s’appuie sur des références qui font autorité sur le sujet en particulier pour définir les termes les plus importants.
C’est pourquoi nous nous demanderons dans quelle mesure la production et la circulation de la connaissance constituent un outil de puissance pour les différents acteurs géopolitiques.
Dans un premier temps, nous verrons que la connaissance constitue un instrument de puissance pour les États. Puis nous verrons que sa production et sa transmission peuvent-être à l’origine de conflits. Enfin, nous verrons qu’elles font également l’objet d’une coopération renforcée qui échappe de plus en plus au contrôle des États dans le cadre de la mondialisation.
Pour vous aider à visualiser le corrigé, nous allons mettre des titres aux grandes parties : vous ne devez bien sûr pas les écrire sur votre copie le jour de l’épreuve, mais vous pouvez les noter sur votre brouillon pour vous aider à structurer vos idées (travail sur le plan détaillé de votre rédaction).
La connaissance : un instrument de puissance entre les mains des États
La connaissance : un instrument de puissance entre les mains des États
La connaissance est un instrument de puissance économique et géopolitique au service des États depuis l’Antiquité. Dès cette époque, en effet, ces derniers ont cherché à sécuriser sa transmission. Ce fut notamment le cas dès le IIe siècle avant J.-C. avec la mise en place du carré de Polybe, premier système de chiffrement par substitution connu de l’histoire. De cette époque à nos jours, la production de la connaissance joua en effet un rôle important dans l’affirmation de la puissance économique (soft power) et géopolitique (hard power) des États. Ce rôle s’est accéléré depuis la Seconde Guerre mondiale, avec la mobilisation de nombreux acteurs, à la fois étatiques et privés. Ainsi, le projet Manhattan, qui permit aux États-Unis de se doter de l’arme nucléaire, mobilisa non seulement les ressources de l’armée américaine, mais également le complexe militaro-industriel (c’est-à-dire des entreprises et des industries privées) et les principales universités du pays, sans parler des grandes figures scientifiques de l’époque, comme le physicien Richard Feynman.
Pour traiter un sujet complexe, il est important de mobiliser des exemples précis issus des cours de HGGSP ou d’histoire, ainsi que de vos connaissances personnelles afin d’étayer votre argumentation.
Selon les économistes, cette place de plus en plus importante occupée par le savoir dans l’économie mondiale après la Seconde Guerre mondiale va aboutir à l’apparition d’une nouvelle phase dans l’histoire économique mondiale : « l’économie du savoir ». Dans les années 1990, ils mettent en effet en avant le fait que plus de 50 % du PIB des États de l’OCDE provient des industries et des services fondés sur la production et la diffusion de la connaissance. Pour affirmer leur puissance géopolitique, mais également économique, les États investissent donc massivement depuis cette époque dans l’éducation, les technologies de l’information et de la communication, ainsi que le domaine de l’innovation et de la recherche et développement. Parallèlement, les FTN comme les GAFAM, qui évoluent majoritairement dans ce domaine d’activité, sont devenues les plus puissantes du monde.
Produire et transmettre la connaissance : des enjeux conflictuels
Produire et transmettre la connaissance : des enjeux conflictuels
La production et la transmission de la connaissance peut cependant être l’enjeu de conflits, notamment entre les États. Au cours de la guerre froide, l’affrontement scientifique a été au cœur de la rivalité entre les États-Unis et l’URSS. L’avance prise par cette dernière dans le domaine de la conquête spatiale, notamment grâce à l’« archipel des savants » (un ensemble de villes spécialisées dans l’innovation scientifique), va en effet provoquer la course à l’espace entre les deux superpuissances. Le triomphe final des États-Unis, en 1969, grâce au succès du programme Apollo initié par le président Kennedy dix ans plus tôt, reposa néanmoins en partie sur l’espionnage et l’exfiltration d’Europe, à la fin de la Seconde Guerre mondiale, de savants nazis comme l’ingénieur Wernher von Braun.
Au-delà des conflits idéologiques, la production de la connaissance peut aboutir à des conflits géopolitiques. Ainsi, la volonté de l’Iran de se doter de l’arme nucléaire entraîne de nombreuses tensions géopolitiques, non seulement au niveau international, mais également à l’échelle régionale. L’État d’Israël, qui s’est également doté de l’arme nucléaire au cours des années 1960, ainsi que les pays arabes sunnites de la région, comme l’Arabie saoudite, s’inquiètent en effet des intentions hostiles de l’Iran à leur égard. Dans ce contexte, le sabotage du complexe industriel de Natanz, en 2021, a été imputé aux services secrets israéliens. Depuis lors, les tensions entre les deux puissances régionales ont atteint leur paroxysme, menaçant de dégénérer en conflit ouvert à même de déstabiliser l’ensemble du Moyen-Orient, voire le monde, du fait du jeu des alliances, l’Iran étant allié de la Chine et de la Russie, tandis que les États-Unis assurent la protection d’Israël. Dans le cadre de la société de l’information et de la communication, le contrôle de l’information et de ses supports devient donc vital. C’est notamment le cas des câbles sous-marins, qui tapissent le fond des mers et des océans et assurent le transit de plus de 98 % des données échangées dans le monde.
N’oubliez pas d’employer des connecteurs logiques pour fluidifier votre argumentation.
Un processus de production de la connaissance de plus en plus coopératif dans le cadre de la mondialisation ?
Un processus de production de la connaissance de plus en plus coopératif dans le cadre de la mondialisation ?
La production et la diffusion de la connaissance font également l’objet d’une coopération renforcée et se trouvent au cœur de la production du savoir depuis le début du XXe siècle. Au XIXe siècle déjà, le développement des sociétés savantes a mis en relation des savants du monde entier impliqués dans la production du savoir. Cette collaboration s’est accentuée aujourd’hui avec le développement d’Internet mais aussi des firmes transnationales. En effet, les principales start-up et FTN de la Silicon Valley (pôle de l’innovation à l’échelle mondiale) en Californie, comme Google, emploient des chercheurs et des ingénieurs venus des quatre coins du monde.
Cependant, la mondialisation de la connaissance n’est pas forcément synonyme d’un renforcement de la coopération internationale dans la production du savoir, mais plutôt d’une concurrence mondiale accrue qui échappe partiellement au contrôle des États. Dans le domaine spatial, par exemple, si les États européens ont accentué leur coopération, notamment à travers la création de l’Agence spatiale européenne, on assiste en revanche à un regain de rivalité entre acteurs privés et étatiques, notamment dans le cadre de la course vers la planète Mars. On observe ainsi, à côté de la traditionnelle rivalité entre la Russie et les États-Unis, l’émergence de la Chine et de l’Inde comme puissances spatiales autonomes, et d’acteurs privés, comme le milliardaire Elon Musk, qui, bien que bénéficiant de capitaux publics américains à travers sa société Space X, développe des velléités de colonisation de l’espace suivant des plans propres.
Conclusion :
Votre conclusion doit obligatoirement comporter deux parties.
Dans la première, vous devez répondre de façon concise et précise à la problématique.
Puis vous devez proposer une ouverture, c’est-à-dire établir un lien entre votre sujet et un sujet ou un fait d’actualité connexe, qui en découle.
La production et la circulation de la connaissance, si elles ont été tributaires des frontières étatiques depuis l’Antiquité, le sont cependant de moins en moins. Instrument de puissance, à la fois économique dans le cadre de l’émergence de « l’économie de la connaissance » et géopolitique, la production et la circulation du savoir échappent de plus en plus au cadre et aux acteurs étatiques dans le cadre de la mondialisation. Néanmoins, la mondialisation de la connaissance connaît des limites. En effet, elle n’échappe que partiellement au contrôle des États, comme en témoigne la conquête spatiale et la course vers Mars.
Par ailleurs, son contrôle et son utilisation génèrent de véritables inquiétudes sur les atteintes aux libertés qu’elle peut engendrer, comme dans le cas du crédit social instauré en Chine, qui repose sur le développement des nouvelles technologiques et de l’intelligence artificielle.