Sujet bac : annale jour 1 – 2024
SESSION 2024 – centre étranger groupe 2 – jour 1
HISTOIRE-GÉOGRAPHIE, GÉOPOLITIQUE et SCIENCES POLITIQUES
Durée de l’épreuve : 4 heures
L’usage de la calculatrice et du dictionnaire n’est pas autorisé.
Dissertation 1 Sujet – Espace, mers et océans : nouveaux territoires d’affirmation de la puissance chinoise ? |
Introduction :
Le président chinois Xi Jinping a assigné un double objectif à son pays à l’horizon 2049 (centenaire de la révolution communiste) : rattacher l’île de Taïwan à la Chine, par la force si nécessaire, et devenir la première puissance au monde.
L’accroche de votre devoir doit être suffisamment originale pour susciter l’intérêt de votre correcteur et vous démarquer des nombreuses autres copies qu’il doit corriger. Vous pouvez, comme ici, profiter d’un fait d’actualité ou d’un discours important faisant transparaître les ambitions de la Chine.
Pour détrôner les États-Unis comme première puissance mondiale et rompre ainsi durablement les équilibres géopolitiques actuels, la Chine développe un ambitieux projet de conquête spatiale. Elle affirme également sa puissance économique, commerciale et militaire sur les mers et les océans. Ces espaces sont devenus des enjeux de conquête et de rivalité pour Pékin, non seulement avec les autres puissances régionales, comme l’Inde, la Russie et le Japon, mais aussi et surtout avec les États-Unis.
Par conséquent, on peut se demander dans quelle mesure l’espace, les mers et les océans constituent de nouveaux territoires d’affirmation de la puissance chinoise.
Le sujet ne comporte pas de bornes chronologiques explicites. Néanmoins, le terme « nouveaux » implique de s’intéresser à la Chine contemporaine.
Ainsi, nous nous intéresserons dans un premier temps à l’affirmation de la puissance maritime de la Chine, avant d’interroger ses ambitions spatiales. Dans les deux cas, nous interrogerons également leurs limites.
Le sujet interroge l’affirmation de la puissance chinoise. Ne perdez pas de vue que la Chine est un colosse aux pieds d’argile. Par conséquent, cette puissance à des limites. C’est particulièrement le cas dans le domaine maritime.
Pour vous aider à visualiser le corrigé, nous allons mettre des titres aux différentes parties : vous ne devez bien sûr pas les écrire sur votre copie le jour de l’épreuve, mais vous pouvez les noter sur votre brouillon pour vous aider à structurer vos idées (travail sur le plan détaillé de votre rédaction).
L’affirmation de la puissance maritime chinoise
L’affirmation de la puissance maritime chinoise
Depuis 2013, la Chine a mis en place une nouvelle stratégie d’affirmation de sa puissance maritime : les nouvelles routes de la soie.
L’affirmation de la puissance économique chinoise à partir des espaces maritimes
L’affirmation de la puissance économique chinoise à partir des espaces maritimes
Avec un littoral long de 18 000 kilomètres, la Chine dispose d’une des plus importantes façades maritimes du monde sur laquelle sont répartis une trentaine de ports majeurs qui lui donnent une ouverture sur les mers et les océans. Dans le cadre du déploiement de sa stratégie des nouvelles routes de la soie, la Chine étend son contrôle sur les principaux ports et voies maritimes mondiales. D’une part, cette stratégie vise à assurer ses approvisionnements énergétiques, indispensables au soutien de sa croissance économique et, d’autre part, à sécuriser ses exportations de produits manufacturés vers le Moyen-Orient, l’Amérique et l’Europe. Dans le cadre de cette stratégie, la Chine a étendu son contrôle à de nombreux ports dans l’océan Indien, comme Colombo, au Sri Lanka, et au-delà, en Europe, comme le port du Pirée, à Athènes, en Grèce.
La Chine a pris le contrôle de très nombreux autres ports dans le cadre de ses routes de la soie (Venise en Italie, Gwadar au Pakistan, Mombasa au Kenya pour ne citer que quelques exemples). Cependant, dans cet exercice, le temps imparti étant limité, il faut vous en tenir à un ou deux exemples précis par argument.
De plus, afin de s’assurer du contrôle de futures routes maritimes, comme la route Arctique, la Chine multiplie les investissements dans des infrastructures portuaires d’avenir, comme en Sibérie.
Le secteur maritime (exploitation des ressources halieutiques et des ressources énergétiques off-shore, construction navale, etc.) représente pas moins de 10 % du PIB du pays. La Chine développe ainsi ses capacités d’exploration et d’exploitation sous-marine. C’est par exemple le cas en mer de Chine, où des réserves de gaz estimées à 100 milliards de mètres cubes ont été découvertes et commencent à être exploitées par des entreprises chinoises.
De surcroît, plus de 90 % des exportations chinoises transitent par les mers et les océans. La China Ocean Shipping Company, spécialisée dans le transport de conteneurs, fait ainsi partie des dix principales compagnies de transport maritime du monde.
L’affirmation de la puissance navale chinoise
L’affirmation de la puissance navale chinoise
En 1949, la Chine communiste ne possédait pas de flotte de guerre. C’est ce qui permit au leader nationaliste Tchang Kaï-chek et à ses partisans de se replier sur l’île de Taïwan sans être inquiétés. Pour laver cet affront et se prémunir d’une attaque par voie maritime, Mao Zedong ordonna dès 1950 la construction d’une puissante flotte de guerre. Soixante-dix ans après, en 2020, la Chine s’affirme comme la seconde plus puissante marine du monde avec 600 navires de guerre servis par plus de 225 000 marins.
Parallèlement, le pays s’est doté d’une importante force de projection aéronavale. En 2022, le premier porte-avions de fabrication chinoise a pris la mer. Avec trois porte-avions en service, dont deux de grande capacité, le pays se positionne donc devant d’autres puissances navales, comme la France, qui ne possède qu’un seul porte-avions.
Cette affirmation de la puissance navale chinoise se traduit par des exercices de grande envergure de plus en plus fréquents dans les eaux territoriales de Taïwan que la Chine ambitionne de rattacher à la République populaire d’ici à 2049. Elle est donc source de tensions entre la Chine et ses voisins, mais également entre la Chine et les États-Unis qui disposent de forces aéronavales dans l’ensemble des océans de la planète.
Enfin, l’affirmation de la puissance maritime chinoise s’appuie également sur la construction d’un dense réseau de bases aéronavales chinoises en mer de Chine et dans l’océan Indien. Cette stratégie, surnommée « stratégie du collier de perles », vise à contrecarrer l’influence indienne et américaine dans ces espaces.
Les limites à la puissance maritime chinoise
Les limites à la puissance maritime chinoise
Si la puissance maritime chinoise ne doit pas être minimisée, elle n’est pas exempte de limites. En effet, la Chine ne contrôle pas les détroits et les canaux par lesquels transitent ses exportations de produits manufacturés et ses importations énergétiques. Par exemple, 40 % des importations chinoises de pétrole transitent par le détroit de Malacca. Or ce détroit est sous contrôle de l’Indonésie, de Singapour et de la Malaisie. En cas de tensions ou de conflits avec ces pays, la Chine risquerait donc de voir ses approvisionnements stratégiques entravés. Pour contourner cet écueil, le gouvernement chinois désire financer le percement d’un canal dans l’isthme de Kraa en Thaïlande. Néanmoins, le projet peine à se concrétiser face à l’hostilité de la population thaïlandaise qui dénonce la mainmise chinoise sur le projet. Assurer ses approvisionnements demeure donc un enjeu vital pour la Chine.
Du point de vue militaire, la puissance navale chinoise demeure mesurée comparée à celle des États-Unis. En effet, l’US Navy possède pas moins de onze porte-avions de grande capacité, tandis que la Chine peine à en faire fonctionner deux. Qui plus est, l’ambitieux programme naval chinois connaît de nombreux revers. Par exemple, au printemps 2024, le premier prototype du dernier sous-marin d’attaque nucléaire conçu par la Chine a coulé corps et bien lors de ses premiers essais. La puissance maritime chinoise, bien qu’importante, ne doit donc pas non plus être surestimée.
La conquête spatiale, nouvel horizon de la puissance chinoise
La conquête spatiale, nouvel horizon de la puissance chinoise
Entre 1955 et 1975, en pleine guerre froide, la course à l’espace fait rage entre les États-Unis et l’URSS. Désireuse de s’affirmer comme une puissance de premier plan, la Chine décide alors de se doter d’un programme spatial.
Une volonté ancienne de participer à la course à l’espace
Une volonté ancienne de participer à la course à l’espace
Au lendemain de la révolution communiste, la Chine de Mao Zedong se rapproche de l’Union soviétique afin de développer des missiles balistiques. Dans le prolongement de ce programme d’armement, la Chine communiste va développer un lanceur de satellite, la fusée Longue Marche, et construire une base de lancement à Jiuquan. Grâce à ces efforts, la Chine parvient à mettre un premier satellite artificiel en orbite le 24 avril 1970. Ce satellite, nommé Dong Fang Hong (« l’orient est rouge ») permet au pays de faire son entrée dans le club très fermé des puissances spatiales. En effet, à cette époque, seuls les États-Unis, l’URSS (pionnière en la matière avec le satellite Spoutnik), la France et le Japon étaient parvenus à réaliser une prouesse technologique équivalente. Néanmoins, la Chine a longtemps privilégié les applications militaires. C’est pourquoi il faudra attendre 1990 pour que le premier satellite de télécommunication commercial chinois soit mis en orbite.
Le « grand bond en avant » spatial de la Chine depuis 1990
Le « grand bond en avant » spatial de la Chine depuis 1990
Relativement marginalisée pendant la course à l’espace, la Chine a accompli un « grand bond en avant » dans le domaine spatial depuis 1990 avec l’objectif avoué de coloniser l’espace et d’en exploiter les ressources. Avec l’arrivée au pouvoir de Xi Jinping en 2013, le programme spatial chinois a connu un véritable coup d’accélérateur. Aujourd’hui, il emploie pas moins de 200 000 Chinois, soit autant qu’aux États-Unis, et la Chine, grâce à son lanceur Longue Marche est, avec la Russie et son lanceur Soyouz, l’une des deux seules puissances spatiales au monde à détenir un lanceur opérationnel conçu et assemblé à 100 % sur son territoire. Le programme spatial chinois est donc indépendant des autres puissances spatiales, ce qui lui confère un avantage stratégique certain.
À court et moyen termes, l’objectif de la CNSA (nom de l’agence spatiale chinoise) est d’envoyer des missions habitées vers la Lune, et aussi vers Mars, avant les Américains. Cet objectif s’inscrit dans le cadre du programme d’exploration, de recherche et de colonisation de l’espace Chang’e. En 2019, la Chine est ainsi devenue la première puissance spatiale au monde à faire se poser une sonde (Chang’e 4) sur la face cachée de la Lune et à en étudier le sol. Deux ans plus tard, le pays réédite cet exploit en faisant atterrir la sonde spatiale Tianwen 1 sur Mars, dont l’exploration constitue son réel objectif à long terme.
À travers ces différentes missions, la Chine teste la viabilité de son projet de colonisation de la Lune et, à terme, de Mars. Au-delà de sa volonté de détrôner les États-Unis du rang de première puissance spatiale au monde, la Chine ambitionne, à plus long terme, d’exploiter les ressources de l’espace. En effet, le sol lunaire et certains astéroïdes regorgent de métaux, de minerais et de terres rares, comme le titane, le tungstène, le thorium ou encore le cobalt, indispensables aux industries du numérique, mais également à l’industrie spatiale, dont les réserves sur terre s’épuisent rapidement.
Les limites à la puissance spatiale chinoise
Les limites à la puissance spatiale chinoise
Si les progrès chinois dans le domaine spatial sont remarquables, la Chine n’est pas encore en mesure de rivaliser pleinement avec les États-Unis, qui conservent une longueur d’avance. Tout d’abord, il lui faut rattraper son retard technologique dans le domaine des vols habités vers la Lune, monopole des seuls États-Unis. De plus, si le pays a consenti des efforts considérables, les moyens alloués à la recherche spatiale en Chine ne sont pas équivalents à ceux des États-Unis. Par exemple, le budget annuel alloué par la Chine à son programme spatial, bien que conséquent, équivaut seulement au tiers de celui des États-Unis. De plus, outre la NASA, les États-Unis peuvent s’appuyer sur de nombreux partenariats avec des investisseurs privés, comme l’entreprise SpaceX d’Elon Musk, qui dispose d’une avancée technologique stratégique dans le domaine des lanceurs réutilisables. Enfin, la Chine a connu ces dernières années de nombreux revers en matière spatiale. Ainsi, si elle est bien parvenue à poser une sonde sur Mars en 2021, elle a ensuite perdu le contact avec elle, transformant ce succès initial en demi-échec.
Conclusion :
Malgré des faiblesses plus ou moins importantes, la Chine peut être considérée comme une grande puissance en construction. La volonté chinoise de s’affirmer comme la première puissance mondiale à l’horizon 2049 se traduit par un effort de conquête de l’espace et des océans afin de concurrencer l’hégémonie américaine dans ces domaines. Cette volonté chinoise alimente des tensions de plus en plus vives avec les puissances régionales voisines, comme l’Inde et le Japon, mais aussi avec les États-Unis. Ces tensions, perceptibles depuis l’élection du président Obama en 2008 ne cessent de croître, notamment autour de la question de Taïwan dont Pékin revendique la souveraineté.
En ouverture, n’hésitez pas à convoquer l’actualité récente.
La réélection de Donald Trump comme président des États-Unis en novembre 2024, sur la base d’un programme économique et diplomatique destiné à contenir l’affirmation de la puissance chinoise, pourrait raviver la rivalité entre les deux puissances, notamment dans le domaine de la course à l’espace.