Dissertation de Géopolitique et sciences politiques |
Tout d’abord, vous devez relever les termes importants de votre sujet, puis les définir, ce qui est essentiel dans l’introduction. Commencez à noter vos idées au brouillon en les analysant ensuite, ce qui vous permettra de réfléchir dès le départ à votre problématique, puis à votre plan.
Ici, nous faisons appel à un document en lien avec le thème 4 du programme sur le patrimoine, à savoir un discours d’André Malraux : ce sera notre « accroche », l’élément avec lequel nous introduiront notre copie en éveillant l’intérêt du lecteur.
Il ne vous restera qu’à construire votre problématique puis annoncer votre plan une fois prêt.
Introduction
Introduction
En 1962, André Malraux, ministre de la Culture, exposait dans un discours sa vision du patrimoine, insistant sur le fait que les États modernes se préoccupent désormais autant du patrimoine matériel, que des représentations et usages politiques qui en étaient fait. Il insiste également sur le fait que ces usages étaient réalisés justement dans le cadre de politiques publiques visant à la conservation du patrimoine, contrairement à ce qui avait pu être fait jusqu’alors.
Le patrimoine désigne un ensemble existant constitué de biens matériels et/ou immatériels, privés ou publics, que l’on peut vouloir conserver, mais aussi modifier, dans le but d’en conserver des traces. Ces traces peuvent ensuite être étudiées, valorisées et transmises aux générations futures.
Du latin « patrimonium », c’est une notion d’origine juridique qui désigne un héritage de biens matériels, ceux du père, au sein d’une famille. En anglais, on désigne d’ailleurs encore le patrimoine par le mot « heritage », qui conserve la trace de cette évolution sémantique. Ce qui est mémoriel renvoie à la mémoire collective d’une nation, la représentation qu’elle se fait de son passé et des traces qui en subsistent, notamment grâce au travail des historiens ou des archéologues qui les étudient.
En ce sens, les propos du ministre Malraux font sens, car de nos jours la cohabitation du patrimoine matériel et des représentations immatérielles qui s’y rattachent, sont plus que jamais au cœur de débats politiques parfois vifs et d’enjeux complexes.
Dès lors, nous pouvons nous demander ce que la notion de patrimoine signifie désormais, articulant les héritages du passé à des réflexions mémorielles importantes, tout en étant au cœur d’enjeux géopolitiques complexes.
La problématique doit absolument figurer dans votre copie et c’est sans doute l’étape la plus importante : c’est elle qui guidera votre rédaction et votre raisonnement, il faut donc bien la formuler pour ne pas risquer un hors-sujet qui vous coûterait cher dans la note finale… Aussi, mieux vaut prendre le temps de la rédiger sérieusement et d’un seul tenant : la formulation ci-dessus est simple, lisible et compréhensible. Si vous hésitez lors de l’épreuve, revenir à une problématique bien construite vous redonnera confiance et vous permettra de bien organiser votre rédaction : ce sera en quelque sorte votre bouée de sauvetage !
Nous verrons tout d’abord que le patrimoine est une notion récente à l’histoire changeante, qui s’est beaucoup élargie depuis deux siècles et demi (I). Puis, nous traiterons des usages sociaux et politiques de cet héritage, qui est désormais également une construction mémorielle constante et complexe (II). Enfin, nous parlerons des enjeux géopolitiques actuels à ce sujet (III).
L’annonce de plan doit suivre un ordre logique, selon la manière dont vous répondez au sujet. Ici, on commence par revenir sur l’évolution de la notion de patrimoine, avant d’enchaîner sur la construction mémorielle plus récente, pour terminer sur une partie traitant des enjeux géopolitiques actuels de ces deux éléments.
De l’héritage du passé aux « patrimoines » : une lente évolution
De l’héritage du passé aux « patrimoines » : une lente évolution
Un héritage d’abord largement ignoré et morcelé
Un héritage d’abord largement ignoré et morcelé
Bien que les titres soient proscrits pour la dissertation dans son ensemble, il est nécessaire d’organiser sa réflexion en titrant les parties du plan sur son brouillon.
Au propre, seuls les sauts de lignes et les alinéas doivent permettre de se repérer dans la production.
Ici, nous les faisons apparaître, mais il ne faudra pas le faire le jour de l’épreuve !
Durant le Moyen-Âge, on tire souvent des matériaux de construction coûteux comme la pierre, de vieilles ruines antiques dont on ne sait parfois rien, et les rois n’hésitent pas à détruire les bâtiments qu’ils ne peuvent entretenir ou qui risqueraient de servir à leurs adversaires politiques. C’est le cas de grands seigneurs possédant des châteaux forts, qui défient parfois l’autorité du roi, car ils sont alors aussi puissants que lui.
Le patrimoine n’existe pas hors de la sphère privée, et c’est donc une logique pratique ou comptable qui s’impose.
La Renaissance amorce un mouvement inverse : des nobles, des marchands ou des humanistes, réunissent des collections d’objets hétéroclites, naturels ou d’origine humaine, pour lesquels on trouve un intérêt nouveau, car ils sont rares, atypiques ou tout simplement anciens. Ces collections se retrouvent au sein de cabinets de curiosités, qui plus tard donneront naissances aux musées tels que nous les connaissons.
De la même manière, un patrimoine culturel important (bâtiments, œuvres d’arts, bibliothèques), est alors parfois transmis et valorisé entre plusieurs générations.
En parallèle, l’intérêt pour la culture antique classique romaine et grecque, s’inscrit dans ce mouvement visant à connaître les traces du passé. Les jeunes aristocrates de l’époque doivent effectuer un « Grand Tour » dans le cadre de leur formation intellectuelle et sociale : ils voyagent notamment autour du bassin méditerranéen en Turquie ou en Grèce, visitent les ruines antiques, en font des études savantes et des croquis.
La mémoire et le patrimoine d’une partie de l’Europe commencent à apparaître aux contemporains comme particuliers, et dignes d’intérêt, suffisamment pour être étudiés, utilisés et transmis à travers le temps.
L’émergence d’une notion contemporaine du patrimoine (1789-1972)
L’émergence d’une notion contemporaine du patrimoine (1789-1972)
Progressivement, la notion s’élargit considérablement, notamment après le tournant de la Révolution Française voulant faire « table rase du passé » pour dépasser l’autorité absolue des rois de l’Ancien Régime, en partie à cause des profanations des tombes de la basilique royale de Saint-Denis.
La notion de patrimoine naît du fait que les acteurs de l’époque associent désormais des bâtiments comme la basilique ou les palais royaux à un passé, à une histoire, qu’il convient de préserver et de transmettre, au-delà de considérations politiques.
En effet, on considère alors que ce patrimoine est une trace de l’histoire du pays et de ses habitants, qui forme alors tout ou partie de leur passé commun et de celui de la nation.
Émerge alors un « patrimoine national » en 1789, puis en 1794, l’abbé Grégoire, siégeant à la Convention Nationale qui dirige alors le pays, publie un mémoire sur ce qu’il appelle le vandalisme, condamnant les destructions et encourageant plutôt la mise en place d’une « mémoire collective ». On crée alors le poste « d’inspecteur général des monuments » en 1830, et l’on cherche désormais à dresser un inventaire de tout ce que l’État possède en ce sens, pour mieux diriger les efforts de conservation, puis de restauration.
Le rôle de l’État est croissant dans les missions patrimoniales et se centralise, permettant une rationalisation et l’allocation de budgets destinés à restaurer les bâtiments concernés par la classification, par exemple dès les années 1840 sur la cathédrale de Notre-Dame de Paris.
Au XIXe siècle, on convoque aussi les patrimoines et désormais une mémoire commune nationale, dans le cadre du roman national : en France, le Second Empire le fait avec les Gaulois, dans la figure mythifiée du chef gaulois Vercingétorix et en organisant des campagnes de fouilles archéologiques sur le site supposé de la bataille d’Alésia. L’histoire est ici utilisée à des fins politiques et mémorielles, sans forcément se soucier de s’appuyer sur des faits historiques.
Dans le même temps, une première liste de près de 1 000 monuments dits « historiques » est publiée en 1840, dont la conservation nécessite des travaux et donc des crédits.
La notion de patrimoine commence aussi lentement à se diversifier, et dès 1906 le patrimoine naturel, à travers des « sites naturels d’intérêt artistique » est aussi considéré comme faisant partie de cet ensemble.
Enfin, dans les années 1950, et surtout dans les années 1960, les politiques publiques patrimoniales deviennent encore plus importantes dans le cadre de la reconstruction du pays, et dans un contexte de forte croissance économique (les Trente Glorieuses). Avec la loi Malraux de 1962, un choix fort est fait de la part du pouvoir : il s’agit de préserver certains secteurs des centres urbains présentant notamment un intérêt historique, alors même que la France connaît une forte urbanisation.
Enrichir votre copie de connaissances personnelles pertinentes vous permettra de démarquer votre raisonnement aux yeux de vos correcteurs ! Cela peut vous rapporter des points, mais attention à ne pas faire de hors-sujet en empilant les exemples peu pertinents.
De manière générale, faites-le uniquement si vous êtes certain que cela va améliorer votre copie : ici, mentionner la loi Malraux est intéressant puisque l’on traite de la notion contemporaine de patrimoine.
Un héritage commun de l’humanité au XXIe siècle : vers une mémoire de l’humanité ?
Un héritage commun de l’humanité au XXIe siècle : vers une mémoire de l’humanité ?
En 1972, l’Unesco institue désormais un « patrimoine mondial » : c’est un tournant majeur dans l’évolution de la notion de patrimoine, qui lui donne une portée nouvelle. De plus la notion évolue encore pour inclure le patrimoine naturel et rappelle qu’elle est l’héritage du passé (« Le patrimoine est l’héritage du passé (…). Nos patrimoines culturels et naturels sont deux sources irremplaçables de vie et d’inspiration. »).
Le patrimoine devient aussi de plus en plus immatériel : chants, danses, musique, œuvres littéraires, cinéma et même gastronomie et techniques peuvent désormais être reconnus et classés à ce titre, comme ont pu l’être des bâtiments ou des objets d’arts remarquables au cours du siècle précédent.
C’est désormais un héritage commun qui prend forme, appartenant à tous les peuples où qu’ils soient situés et quelle que soit leur ethnie. Cependant, des disparités sont constatées, par exemple dans la surreprésentation initiale de sites matériels européens, d’où l’émergence de patrimoines immatériels plus représentatifs des pays du Sud ou des cultures orales par exemple, et plus globalement des pays qui n’ont pas eu les moyens de préserver certaines traces tangibles de leur passé comme des bâtiments, faute de moyens.
Aussi, parmi les dix pays les plus représentés sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco, six sont européens (Italie, Espagne, Allemagne, France, Royaume Uni, Russie), même si le classement de sites naturels exceptionnels a permis l’avancée de sites africains, asiatiques ou sud-américains qui ont été inscrits à leur tour.
Enfin, il faut noter l’idée que, désormais, le patrimoine est aussi l’affaire de tous, et non plus seulement des rois, des institutions prestigieuses, de grands architectes ou des États les plus puissants. À travers ce mouvement, il devient celui de toutes les communautés humaines produisant ou détenant des patrimoines.
Cependant, cet héritage commun reste menacé notamment par les conflits ou le changement climatique, et plus généralement par l’oubli. Si un monument est oublié, il n’est pas restauré et conservé, et il finit par disparaître.
Les transitions sont importantes, car elles vous permettent de ne pas perdre le fil de votre raisonnement, et en font de même pour votre correcteur. Il faut donc qu’elles figurent entre vos parties et sous-parties : inutile d’alourdir le texte, une phrase ou deux suffisent. Elles seront là pour résumer brièvement ce qui a été dit et annoncer simplement ce qui va suivre.
Le patrimoine comme construction mémorielle
Le patrimoine comme construction mémorielle
Construction sociale et nouveaux enjeux de la patrimonialisation
Construction sociale et nouveaux enjeux de la patrimonialisation
La question du patrimoine est plus que jamais une construction sociale : il s’agit de choisir ce qui doit être conservé, mais aussi de savoir pourquoi et de quelle manière. Cela procède avant tout de la politique patrimoniale et mémorielle de l’État.
Ceci recouvre des enjeux identitaires forts pour le patrimoine local ou régional désormais, dans la mesure ou un enjeu économique et touristique s’en dégage : en France, pays le plus visité du monde par des touristes internationaux, les territoires cherchent à réaliser des recettes en mettant en valeur leurs spécificités patrimoniales, dans le cadre de politiques poussées en la matière.
Il s’agit d’un impératif économique autant que d’un processus de cohésion territoriale, visant à capitaliser sur l’image que renvoie un espace donné, que ce soit une région, un pays ou une ville.
Par exemple, les touristes venant en France s’attendent à y trouver notamment une gastronomie particulière, qui se décline dans les différents patrimoines culinaires régionaux.
À ce sujet, la France développe dans les années 1960 une approche originale de la notion de patrimoine culturel, en intégrant les nouveaux enjeux à ses politiques publiques : sous le ministère Malraux, il y a une intense structuration administrative autour de l’inventaire. En 1964, un inventaire dirigé par l’historien de l’art Chastel est créé, avec pour objectif d’identifier sur le terrain les éléments patrimoniaux, de manière à étudier et classer édifices et objets, afin de les introduire dans la mémoire nationale.
Le but final, mêle des enjeux divers dans le cadre de cette politique car il s’agit de pouvoir exploiter la liste ainsi constituée, tant dans les administrations que dans les services d’urbanismes, d’aménagement, mais encore dans l’enseignement, la recherche historique et même les loisirs.
Du matériel à l’immatériel, une mémoire en construction permanente
Du matériel à l’immatériel, une mémoire en construction permanente
De la même manière, l’après-guerre voit l’élargissement du périmètre du patrimoine : reconnaissance de l’environnement, de l’architecture industrielle et de la culture immatérielle. Aussi, on entend dorénavant par patrimoine « ce qu’une société considère comme digne d’intérêt et de conservation, comme témoignage de ce qu’elle est ».
C’est donc une définition très large qui a dépassé le domaine du bâtiment, et plus globalement des objets matériels, pour s’incarner désormais de plus en plus dans ce qui est dit « immatériel », c’est à dire des productions humaines comme la danse, le chant ou la gastronomie.
Sur le plan international, le même processus est visible à travers la convention de 2003 sur la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel (PCI). Entrée en vigueur en avril 2006, elle vise la préservation des pratiques, des représentations et des expressions ; considérant ces éléments comme composant le patrimoine culturel.
Ses objectifs sont d’une part de rééquilibrer la répartition du patrimoine protégé dans le monde en faveur des pays du Sud, pauvres en patrimoine matériel, mais riches d’un patrimoine immatériel que rien ne protège ; et d’autre part de protéger plus généralement des effets néfastes de la mondialisation les richesses immatérielles qui ne sont actuellement pas protégées.
Le Mali offre un bon exemple de la construction permanente de la mémoire à travers le patrimoine.
En effet, les populations locales sont proches de leur patrimoine, car les lieux et les pratiques patrimoniales (fêtes, mosquées, savoirs maraboutiques), matériels et immatériels, font partie de la vie quotidienne. Ainsi, les mosquées sont entretenues par les communautés locales, participant de ce fait pleinement de la construction sociale et religieuse. Ce patrimoine est donc un support matériel et immatériel de mémoire, d’histoire et d’identité pour les Maliens.
En France, de nombreux éléments ont aussi été intégré à ce mouvement international de reconnaissance du patrimoine immatériel dans les années 2010, ce qui a permis d’en inscrire un certain nombre à l’Unesco. C’est le cas de la tradition d’équitation française, du repas gastronomique français, ou encore de la fauconnerie en 2010, et plus récemment du fest noz breton (2011).
Cette mémoire en construction s’appuie donc désormais sur des éléments de patrimoine vivants, dont il est impossible d’identifier un auteur ou une origine unique, ce qui permet de considérer les traditions orales, le spectacle vivant, les rituels, les savoir-faire ou les modes de vie, de travail et de loisir ; comme dignes d’intérêt et de conservation à diverses fins.
Un usage politique des lieux de mémoire et de pouvoir
Un usage politique des lieux de mémoire et de pouvoir
Depuis les châteaux féodaux signifiant le pouvoir du seigneur local, puis du roi, le pouvoir a toujours cherché à inscrire sa marque y compris dans le patrimoine bâti, dans l’optique notamment de laisser une trace visible et forte de ses actions, ce qu’on peut considérer comme une certaine forme de mémoire. Le cas du château de Versailles, est en France un exemple de cette démarche politique, patrimoniale et finalement mémorielle.
Depuis sa construction, véritable entreprise d’affirmation du pouvoir absolu du monarque Louis XIV qui l’ancre dans le paysage même et dans l’architecture des lieux, il est devenu au fil du temps un lieu de patrimoine et de mémoire.
C’est le cas, lorsque le roi Louis-Philippe en fait un musée national à la gloire du génie français et au service de l’unité de la nation dans les années 1830-1840, puis en 1870-1871 lorsque l’Allemagne y proclame l’Empire allemand aux dépens de la France.
Le château devient ensuite un lieu de diplomatie et de vie institutionnelle de la nation : c’est ici que l’on signe le Traité de Versailles soldant la Première Guerre mondiale (1919), que l’on accueille les chefs d’État étrangers en visite en France dès les années 1950, sous la présidence de Charles de Gaulle, ou que les deux chambres du Parlement (Assemblée nationale et Sénat) se réunissent ponctuellement en congrès, sous la Ve République.
En définitive, on constate que les lieux de pouvoir peuvent être également lieu de mémoires, et que ces deux catégories peuvent évoluer à travers le temps, ici en se confondant mutuellement et en donnant à un lieu plusieurs fonctions (politique, patrimoniale, mémorielle).
On constate donc qu’un lieu de pouvoir peut à la fois être un lieu de mémoire et en même temps un élément de patrimoine.
Des enjeux géopolitiques multiples
Des enjeux géopolitiques multiples
Des conflits nombreux sur le patrimoine et ses usages
Des conflits nombreux sur le patrimoine et ses usages
De nombreux conflits, que ce soit des conflits d’usages ou des conflits armés, ont de nos jours pour objet le patrimoine, des débats parfois vifs concernant la politique à adopter vis-à-vis d’un élément particulier du patrimoine national, en passant par les destructions volontaires de certains objets ou bâtiments patrimoniaux dans une visée idéologique ou religieuse.
Ainsi, un exemple remarquable concerne la propriété et l’usage des frises du Parthénon, sculptées par le Grec Phidias, au Ve siècle avant notre ère : une grande partie de la frise est devenue propriété du British Museum, acquisition très contestée par la Grèce dès son indépendance (1830), désirant recouvrer l’intégralité de la frise pour pouvoir l’exposer au Parthénon. Cela soulève de nombreuses questions qui n’ont toujours pas trouvé de réponse satisfaisante : qui possède la frise ? Est-ce un patrimoine grec qui doit retourner sur le sol grec, ou un élément du patrimoine culturel mondial, globalisé, qui peut être partagé entre plusieurs pays ?
Plus largement, la question déborde également sur la restitution plus générale d’œuvres culturelles acquises de diverses manières, notamment par les puissances coloniales européennes entre les XVe et XXe siècles, au détriment de peuples colonisés et de pays qui s’estiment parfois spoliés et demandent le retour de certaines pièces conservées dans les musées des anciens colons. C’est le cas de l’Égypte en ce qui concerne le patrimoine issu de l’Égypte antique, mais aussi de pays généralement peu développés, dont le patrimoine fait l’objet de trafics divers qui lui nuisent fortement.
En France, des conflits ont aussi opposé divers acteurs dans le cadre de l’usage de certains patrimoines, notamment dans l’urbanisme parisien. Ainsi, le cas de la construction de la pyramide de verre du Louvre (1985-1989) offre un exemple de controverse patrimoniale au cœur de l’un des sites les plus symboliques de l’histoire de France, à l’endroit même où s’élève le palais royal puis le musée le plus visité du monde par la suite. Construite par l’architecte américain Ming Pei, elle cristallise pendant plusieurs années des débats houleux entre partisans et opposants, ce qui illustre la complexité et l’actualité de ce type de problématiques. Et pourtant, elles ne sont pas si récentes : déjà dans les années 1840, la cathédrale de Notre-Dame était sujette aux mêmes débats, à propos de la restauration engagée par l’architecte Eugène Viollet Le Duc.
Venise, enfin, symbolise une actualité renouvelée des conflits en la matière : ses habitants contestent le passage de paquebots gigantesques, transportant des milliers de touristes et abîmant l’écosystème de la lagune. En parallèle, ils doivent faire face à des bouleversements aggravés par le changement climatique comme les inondations de plus en plus fréquentes et violentes qui frappent la ville.
Le patrimoine, objet de mémoire et d’affirmation identitaire
Le patrimoine, objet de mémoire et d’affirmation identitaire
En France, au lendemain de la Première Guerre mondiale, des milliers de monuments aux morts ont été érigés jusque dans les plus petits villages, pour inscrire dans les mémoires le souvenir du sacrifice des soldats français, les « poilus », ayant combattu dans le cadre de la conscription pendant quatre années. Ils font aujourd’hui partie du patrimoine, dans la mesure ou la mémoire collective s’incarne au fil du temps dans ces traces du passé, ici monumentales, mais parfois plus discrètes (lettres de « poilus » conservées dans les archives, objets d’artisanat ou du quotidien des tranchées, récits de guerres, etc.).
Les traces du passé sont aujourd’hui utilisées dans le cadre de politiques publiques liant patrimoines et mémoires des événements passés. Ainsi, l’ossuaire de Douaumont ou les vestiges du mur de l’Atlantique, témoignent des mémoires françaises des deux conflits mondiaux du XXe siècle, inscrites physiquement dans les paysages et valorisées en ce sens comme des témoignages essentiels d’un passé encore récent. Si l’ossuaire témoigne de l’ampleur du massacre ayant eu lieu dans les tranchées entre 1914-1918, les vestiges du mur témoignent, eux, de la modernité renouvelée du conflit, au même titre que le débarquement des alliés en Normandie, en juin 1944. Cet épisode marque les mémoires car il illustre le point de départ de la libération effective du territoire métropolitain, mettant fin à une occupation ennemie vécue comme un choc terrible depuis quatre ans.
Le patrimoine local, enfin, permet à des territoires de tailles diverses d’affirmer leurs identités, notamment dans le cadre de politiques visant, avant tout, à attirer des touristes en leur proposant des expériences et des produits « typiques » qu’ils ne trouveraient pas ailleurs, de la gastronomie à l’architecture.
Ainsi, dans la région Hauts de France, le patrimoine industriel et ouvrier unique du bassin minier du Nord est mis en valeur depuis plusieurs décennies dans le cadre de projets divers, qui participent à rendre visible et à faire connaître une partie de la mémoire ouvrière forte de la région, ce qui a pour effet d’inscrire ce patrimoine à l’Unesco dès 2012.
L’articulation des héritages et des mémoires : la cathédrale de Notre-Dame
L’articulation des héritages et des mémoires : la cathédrale de Notre-Dame
La cathédrale de Notre-Dame de Paris est l’un des joyaux du patrimoine français : construite entre 1163 et le milieu du XIVe siècle, devenant propriété de l’État par décret en 1789 lors de la Révolution française, objet d’une restauration déjà controversée sous la direction de Viollet-le-Duc entre 1844 et 1864, alors que l’on songeait à la détruire, elle est classée comme monument historique dès 1862 et enfin au patrimoine mondial de l’Unesco en 1991.
Aussi, elle concentre les problématiques patrimoniales, mémorielles et les enjeux liés à ces sujets, aujourd’hui d’autant plus, après l’incendie de 2019 ayant détruit la charpente ainsi que la flèche. Elle était jusqu’à ce moment le monument le plus visité d’Europe, attirant au cœur de la capitale française près de 15 à 20 millions de visiteurs et pèlerins par an.
Les mémoires qui sont rattachées à l’édifice jalonnent également près de neuf siècles d’histoire de France, qu’elles soient religieuses ou non. Ainsi, la cathédrale a connu des épisodes marquants, au-delà des mariages, funérailles et couronnements de personnages importants du royaume puis de l’État : ouverture des premiers états généraux sous le règne de Philippe IV (1302), messe lors du retour d’Henri IV au cœur des guerres de Religion (1594), sacre de l’empereur Napoléon Ier (1804), visite du général Charles de Gaulle en pleine libération de Paris (1944)…
Plus largement, les mémoires liées à des savoirs et des savoir-faire faisant pleinement partie du patrimoine français comme les techniques de taille de pierre ou de charpente, sont aujourd’hui évoquées à travers l’histoire de la construction de la cathédrale et des mémoires de ceux qui y ont pris part.
L’incendie de 2019, a ouvert un débat probablement sans précédent dans le domaine du patrimoine : le chantier de reconstruction aura des conséquences pour des décennies en matière de mémoire et de patrimoine. La reconstruction à l’identique, qui a été choisie après avoir un temps envisagé une évolution contemporaine, a suscité de nombreux débats et causé beaucoup d’émoi auprès des intervenants et de la population française. Cela montre que le sujet cristallise des représentations et des mémoires par ailleurs diverses, car bien que lieu de mémoire nationale et objet patrimonial de grande valeur, la cathédrale reste un lieu de culte actif.
On constate donc que patrimoines et mémoires se répondent au quotidien aujourd’hui, à travers des événements comme celui-ci, mais plus largement à travers la construction concertée et permanente des mémoires, y compris lorsque cela s’appuie sur les patrimoines locaux et nationaux.
Conclusion
Conclusion
La conclusion doit répondre clairement à votre problématique, elle-même choisie pour traiter d’un sujet précis. Vous devriez résumer brièvement votre raisonnement, avant d’ouvrir celui-ci à travers une dernière réflexion : c’est le seul endroit vous autorisant à vous détacher un peu du sujet … il faut donc en profiter ! C’est ici que vous pourrez évoquer rapidement une idée que vous n’auriez pas pu intégrer dans votre rédaction, mais que vous aurez pris soin de noter au brouillon durant l’épreuve.
Le patrimoine a beaucoup évolué en tant que notion : d’abord largement ignoré, puis objet de curiosité, privé et hétéroclite, il a ensuite englobé tour à tour des objets toujours plus nombreux, jusqu’à recouvrir aujourd’hui des domaines et des enjeux très larges, y compris géopolitiques. Son sens actuel est pluriel, c’est pourquoi l’on parle de « patrimoines » au pluriel, et il est désormais constamment héritage du passé comme construction mémorielle, ce que nous avons illustré par l’exemple de la cathédrale de Notre-Dame de Paris. En ce sens, il est aussi l’objet de rivalités et de conflits, aussi bien au sein des États que dans le cadre de conflits armés entre divers acteurs, ou plus généralement de l’affrontement de visions antagonistes sur les usages ou encore la propriété de certains éléments patrimoniaux.
Cependant, au-delà des menaces nombreuses que nous avons pu lister pesant sur les patrimoines, une autre problématique se pose désormais dans ce domaine, en l’occurrence un phénomène de patrimonialisation excessive, déjà dénoncé depuis plusieurs décennies par certains historiens notamment.
Il faudra donc sans doute définir ou redéfinir des cadres précis de décision en ce sens dans les décennies à venir, pour éviter que ce qui mérite d’être conservé soit rendu invisible par une masse d’objets moins importants au regard de la mémoire collective. En effet, si tout devient patrimoine, comment distinguer dès lors ce qui doit absolument être conservé ou non ?
L’ouverture est le dernier élément que votre correcteur lira, aussi faut-il prendre le temps de soigner ce que vous allez écrire, pour rester pertinent et ne pas finir sur une fausse note…
N’oubliez pas qu’il faut appuyer le raisonnement que vous avez construit. En général, on essaye d’élargir sa réflexion : ici, le problème de la patrimonialisation excessive est actuel et très intéressant, car nous n’en avons pas parlé dans notre copie, bien que cela soit en lien avec le patrimoine et la mémoire. Cela ouvre bien le sujet au vu du plan choisi et de notre problématique.
Étude de documents de Géopolitique et sciences politiques |
Consigne : En analysant le document et en vous appuyant sur vos connaissances, répondez à la question suivante : pourquoi et comment le changement climatique devient-il un enjeu des relations internationales ?
Avant même de lire un document, il faut analyser le paratexte, c’est-à-dire ce qui le caractérise : quelle est sa nature (discours, loi, article, voire une carte, une photographie) ; son/ses auteur(s) ; la date de rédaction (pour comprendre éventuellement le contexte historique), éventuellement de publication (qui peut être différente et avoir son importance), ses sources, etc. Cette analyse vous permettra déjà de saisir certains enjeux des documents dès les premiers instants, et vous y gagnerez en compréhension pour la suite.
Le changement climatique désigne un phénomène résultant de l’ensemble des actions humaines, qui, à long terme, modifie le climat de la Terre. Les climats sont des ensembles de conditions météorologiques et atmosphériques (précipitations, humidité, températures, etc.), propres à une région sur le temps long.
Les relations internationales sont un ensemble de liens, de rapports et de contacts interétatiques, qui forment notamment la politique étrangère des États, mais aujourd’hui cela inclut aussi de nombreux processus et acteurs non-gouvernementaux.
Le document étudié est un extrait de la « Déclaration finale de la conférence mondiale sur le climat », qui la clôture en février 1979, sous la direction de l’Organisation météorologique mondiale. Cette déclaration fut publiée la même année dans un ensemble de documents officiels intitulé « Organisation météorologique mondiale, conférence mondiale sur le climat, conférence des experts sur le climat et l’homme, déclaration et documents annexes ». Elle a été rédigée vraisemblablement par des groupes de scientifiques lors de la conférence et expose les conclusions de celle-ci.
Ainsi, nous pouvons nous demander pourquoi et de quelles manières le changement climatique s’impose-t-il comme un enjeu international ?
L’analyse critique est l’étape central de l’épreuve, mais elle ne doit pas apparaître sur votre copie.
Il faut, au brouillon, identifier et comprendre les documents, établir leur nature, leur portée, avant d’en sélectionner le contenu pertinent sous forme de prise de notes qui servira à répondre.
Faites très attention aux contradictions apparentes, au contexte, et aux éléments peu compréhensibles au premier abord : ce sont autant de choses qui, réunies, peuvent donner un tout nouveau sens à un texte !
Il faut donc veiller à s’intéresser au sens profond du texte, autant qu’à ce qui est écrit littéralement : le but n’est pas tant de donner raison à un auteur, que de comprendre ses objectifs réels.
Tout d’abord, nous allons revenir sur le fait que la communauté internationale a, au cours des dernières décennies, pris conscience de ce problème et de ses spécificités, y compris lors de cette conférence qui marque une étape importante dans ce domaine.
La prise de conscience progressive du changement climatique par la communauté internationale
La prise de conscience progressive du changement climatique par la communauté internationale
En 1979 lors de cet événement, le changement climatique est reconnu pour la première fois comme étant un problème d’ordre mondial, mais aussi un problème concernant chaque domaine des sociétés humaines dans leur rapport à l’environnement et au climat. En effet, nous pouvons lire que les scientifiques constatent déjà que « tous les pays sont vulnérables aux variations climatiques » et que ce changement impacte de nombreux domaines : « alimentation, eau, énergie, habitat, santé-_ » (l.13) qui « sont autant d’aspects de la vie humaine qui dépendent du climat » (l.6).
Citer le texte précisément vous permet d’appuyer votre propos, c’est ce qui est attendu dans cette épreuve. Soyez vigilant à ne pas tomber dans le piège de la paraphrase : développez clairement votre argumentation en parallèle.
De plus, les scientifiques signalent dès le départ qu’ils sont surtout conscients que « l’homme__ [ils désignent ici l’humanité et les sociétés humaines de manière générale] est vulnérable aux changements et aux variations du climat… sécheresses… inondations » (l.10-11). L’enjeu est donc reconnu comme étant majeur voire inédit dans l’histoire humaine, puisque concernant à terme chaque être humain, et ce quel que soit le territoire sur lequel il vit ou sa place dans la société.
Aussi, décrivent-ils précisément le problème en rappelant que des solutions existent, sans les préciser pour autant, et en énonçant qu’il est aussi certainement possible de tirer parti de ces changements « en mettant à profit les connaissances climatologiques disponibles » (l.24).
Sans doute, pensent-ils à l’adaptation des modes de production de ressources, voire aux économies d’énergie ou encore au recyclage des polluants. Cela constitue un volet possible de la lutte contre le changement climatique, et l’on constate donc que l’idée émerge dès cet événement, même si elle est encore imprécise. En effet, ce sommet n’est que le début d’une série de conférences similaires à propos du climat dans les années 1980-2020.
Notez que les transitions se font clairement : espace entre deux parties, phrase introductive, alinéa…
Ensuite, nous pouvons traiter du fait que la communauté scientifique et les décideurs politiques, voulant apporter des réponses à ce problème, se sont organisés et ont fait du climat un enjeu majeur des relations internationales depuis plusieurs décennies, y compris dès cette conférence.
Les prises de position de la communauté internationale pour répondre au changement climatique
Les prises de position de la communauté internationale pour répondre au changement climatique
En effet, la conférence de 1979 est une étape importante : à l’initiative notamment du président américain Reagan et de la Première ministre britannique Thatcher, les gouvernements s’impliquent dans la question aux cotés des scientifiques. Ici, c’est à travers le PNUE (Programme des Nations unies pour l’environnement ; lié à l’ONU) que cette implication prend forme, car celui-ci participe aux travaux lors de cet événement.
En 1988, la conférence de Toronto lancera un premier appel à réduire les émissions de gaz à effet de serre, et la même année, l’OMM et le PNUE créeront le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) qui sera chargé d’étudier l’évolution du climat mondial. Le document indique d’ailleurs à ce sujet « qu’il est urgent d’élaborer une stratégie globale commune visant à mieux comprendre le climat et à l’utiliser de façon plus rationnelle » (l.34-35), ce qui montre qu’une action mondiale concertée est bien en construction au sein de la communauté internationale. Dans tous les cas, il faut noter que les États semblent, dès lors, vouloir s’impliquer au côté de la communauté scientifique pour traiter du problème du changement climatique.
Par ailleurs, le texte indique plusieurs axes de réponse en ce sens de la part des États du monde entier, pour qu’ils « tirent pleinement parti des connaissances actuelles sur le climat ; prennent des mesures pour approfondir sensiblement ces connaissances ; prévoient et préviennent celles des conséquences possibles de l’action de l’homme sur le climat qui pourraient nuire au bien-être de l’humanité » (l.5-8). Ceci montre bien l’importance prise par ce sujet au travers de ces travaux dans les relations internationales, bien que ce ne soient ici que des pistes de travail qui sont évoquées, et qui n’ont donc pas la portée et le poids d’engagements plus précis, comme par exemple un objectif chiffré de réduction des émissions de gaz à effets de serre, ou bien l’interdiction de l’utilisation de certains substances trop polluantes à un moment donné dans le futur, les premiers jalons de la réponse humaine au changement climatique sont posés.
Conclusion
Conclusion
En conclusion, nous pouvons dire que le changement climatique s’impose effectivement comme un nouvel enjeu des relations internationales, car la communauté internationale a désormais connaissance du problème et en a fait un thème central dans les sociétés mondialisées actuelles.
Les États travaillent activement à rechercher des solutions concertées dans le cadre d’une coopération internationale constante, comme en témoignent l’actualité de ces questions et les grands rendez-vous internationaux (protocole de Kyoto, COP21…) qui la ponctuent depuis plusieurs décennies.