Sujet bac : annale 20 mars 2023
Épreuve d’humanités, littérature et philosophie Essai philosophique : Le savoir nuit-il à la sensibilité ? |
La question de l’essai philosophique prend appui sur le texte ; même si son traitement doit aller au-delà du texte, il faut partir de celui-ci dans l’introduction. De plus, si la forme de l’essai est plus libre que celle de la dissertation, il faut quand même problématiser la question : il s’agit de philosophie. De plus, l’essai vous invite à prendre position pour une idée ; par exemple, ici, nous irons dans ce sens : la savoir ne nuit pas à la sensibilité et, même, il fait émerger son expression.
Introduction :
Dans ce passage du Journal d’une femme de chambre, Octave Mirbeau fait passer ce qu’il nomme les « savants » pour des individus qui ne comprendraient pas l’art poétique, faute de sensibilité ; bien plus : les savants mépriseraient la poésie. Que la science soit de l’ordre de la logique et de la raison, et que la poésie soit dictée par la sensibilité et la passion, autorise-t-il un tel jugement ? Parmi les nombreux sens du mot « sensibilité », il faut surtout ici retenir la capacité à être touché passionnément, par exemple par une œuvre artistique, belle et subtile, ou encore par autrui. Quant au savoir, qui relève de la connaissance établie par des expérimentations et des démonstrations, il arrive qu’on lui attribue une certaine froideur. Dès lors, nous pouvons nous demander : le savoir nuit-il à la sensibilité ? Dans cet essai, nous défendrons l’idée suivante : le savoir ne nuit pas à la sensibilité et, même, il fait émerger son expression.
- Dans le développement, n’hésitez pas à emprunter au cours de philosophie du tronc commun certains éléments, notamment sur « la science », « la raison » ou « l’art ».
- Les « 1 » et « a », « introduction » et « conclusion » délimitant les parties sont ici indicatif, dans le cadre d’un plan fait au brouillon, mais ne doivent pas apparaître dans la copie.
Le savoir ne nuit pas à la sensibilité ; au contraire, ils sont complémentaires car la sensibilité fournit un contenu, une matière, et la raison fournit une forme.
Tout roman, y compris celui de Mirbeau qui met la sensibilité en valeur, n’est possible que par un langage. Or tout usage d’un langage nécessite le savoir que l’on doit acquérir à son propos, une maîtrise des formes grammaticales et syntaxiques.
Rousseau défend la sensibilité morale dans son second Discours. Or exprimer et comprendre ces idées sur la compassion nécessite l’usage de la raison, de la réflexion en vue d’une lecture analytique.
Et même pour le savoir de la raison scientifique, une connaissance de la sensibilité humaine est indispensable, qu’il s’agisse de la sensibilité physique liée à la douleur du corps ou de la sensibilité psychologique liée à la souffrance de l’esprit.
Dans un essai qui défend une idée il s’agit, dans la deuxième partie, de pousser le raisonnement encore plus loin.
En admettant que le savoir soit formel et austère, ces défauts sont atténués par le contenu qui donne vie à notre sensibilité.
L’éthique est fondée sur l’empathie, c’est-à-dire la capacité de se mettre à la place de l’autre pour comprendre ce qu’il ressent. L’empathie, notamment en médecine, est considérée comme un savoir-faire, une technique, mais qui n’a de sens que parce que l’humain a une sensibilité, des émotions, des angoisses.
À un moment donné, prenez un exemple très pointu, même si la personne qui vous lit ne le connaît pas ; choisissez dans votre domaine de prédilection.
En musique, la raison, la technique instrumentale ou les conventions stylistiques viennent donner une forme à une sensibilité qui, sans cette raison, serait éparpillée. Par exemple, dans la musique sérielle du 20e siècle le compositeur a pour principe d’utiliser les douze notes de la gamme chromatique selon des règles d’ordonnancement qui dépassent les structures musicales classiques. Ici, le goût sensible pour l’innovation prend naissance grâce au savoir technique.
Conclusion :
Le savoir n’est donc pas une nuisance pour la sensibilité. Il vient lui donner un cadre, une rigueur ; mais, en tout état de cause, celle-ci reste impétrable. La raison peut entourer la sensibilité, mais elle ne peut pas y entrer. Comme le dit Pascal dans ses Pensées : « Le cœur a ses raisons que la raison ignore ».