Comment l’assurance et la protection sociale contribuent-elles à la gestion des risques dans les sociétés développées ?

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Introduction :

Dans les sociétés anciennes, le risque était avant tout associé à une volonté divine. Aujourd’hui, le risque est une donnée mesurable, un danger quantifiable sur lequel la société et l’individu peuvent agir. Les sociétés développées tentent donc de déployer des systèmes de gestion collective des risques afin de prévenir ceux-ci.
Traditionnellement, il s’agit de risques économiques et sociaux tels que la maladie, la vieillesse, les accidents ou encore la perte d’emploi. Cependant, la prise en compte collective des risques dans les sociétés développées n’a eu de cesse de s’élargir avec l’essor des « États-providence » au XIXe et XXe siècles, permettant progressivement de doter les sociétés d’une couverture toujours plus large.
Dans une première partie, nous étudierons la prise en compte des risques au sein des sociétés développées. La deuxième partie nous permettra de réfléchir aux enjeux existants autour de la gestion collective des risques. Enfin, dans une troisième partie, nous verrons que la protection sociale revêt différentes logiques.

La prise en compte des risques dans les sociétés développées

Une diversité de risques sociaux

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Définition

Risque social :

Un risque social est un événement plus ou moins prévisible provoquant un dommage affectant le niveau de vie d’un ménage.

Une diversité des risques

Les sociétés et les individus qui les composent sont confrontés à de nombreux risques plus ou moins pris en charge collectivement. On peut par exemple rappeler les grands risques économiques et sociaux pris en charge par la Sécurité sociale :

  • la vieillesse,
  • la maladie,
  • la famille,
  • le chômage,
  • les accidents du travail.

Ces risques sont en grande partie pris en charge collectivement par la puissance publique à travers les administrations de sécurité sociale qui prélèvent sur les revenus du travail des cotisations sociales, mais aussi grâce à certains impôts et taxes décidés par l’administration centrale.

Ces risques économiques et sociaux ne sont pas les seuls risques auxquels les individus et les sociétés font face. Il existe également :

  • des risques naturels (on peut penser à l’ouragan Irma qui s’est abattu en 2017 sur de nombreuses îles des Antilles) ;
  • des risques technologiques (la catastrophe nucléaire de Fukushima en 2011) ;
  • ou encore des risques géopolitiques (conflits, crises migratoires, etc.).

La prise de conscience des risques dépend largement du contexte.

  • Par exemple, l’enquête baromètre 2018 ISRN sur la perception des risques et de la sécurité indiquait qu’en 2017, le terrorisme était le problème le plus préoccupant (27 % de l’échantillon interrogé plaçait ce risque en première position, loin devant le chômage qui arrivait en deuxième position).

Une complexification des risques

Depuis les années 1980, certains sociologues insistent sur la montée des risques au sein de nos sociétés. Le sociologue allemand Ulrich Beck a d’ailleurs publié un ouvrage appelé La Société du risque.
Les risques autrefois pris en charge collectivement sont de plus en plus individualisés.

  • L’individu s’est autonomisé, il s’est émancipé et doit désormais prendre plus de décisions quant à sa formation, sa profession, son lieu d’habitation, son conjoint ou encore le nombre d’enfants qu’il souhaite avoir, rendant ainsi les risques plus aléatoires.

De plus, les risques semblent s’être diversifiés avec la « seconde modernité » : de nouveaux risques émergent et sont désormais le produit de la société elle-même.

  • Ulrich Beck insiste par exemple sur la catastrophe nucléaire de Tchernobyl en 1986 ou encore sur la maladie de la vache folle, identifiée la même année.

Avec la modernisation, la gestion des risques semble donc de plus en plus complexe.

Sur quels principes repose la gestion collective des risques ?

Le principe de prévention

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Définition

Prévention :

Principe d’intervention dont le but est de diminuer un certain nombre de risques afin que la probabilité que ces derniers surviennent tende vers zéro.

Il existe aujourd’hui un vaste panel de politiques publiques reposant sur le principe de prévention. Il peut par exemple s’agir de campagne de sensibilisation.

  • Dans les sociétés développées, ce principe s’est d’abord développé dans la médecine et l’hygiène, mais il s’est élargi à bien d’autres domaines : prévention contre le cancer, le sida, l’alcoolisme, l’obésité ou encore le terrorisme.
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À retenir

Le principe est assez simple : plus la prévention est grande, plus la société et les individus qui la composent sont sensibilisés et adoptent alors un comportement permettant de minorer le risque.

Le principe de mutualisation des risques

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Définition

Mutualisation des risques :

Principe permettant de transformer les risques individuels en risques collectifs. Ce principe repose sur des mécanismes d’assurance garantissant le paiement d’indemnités en cas de réalisation d’un risque pour l’individu ayant préalablement versé une prime ou une cotisation.

Le principe de mutualisation est hérité des caisses de solidarité ouvrière, bien antérieures au développement de nos régimes de protection sociale. De nombreuses compagnies d’assurance et de mutuelles privées reposent sur ce principe. La Sécurité sociale en France est également très influencée par ce principe.

Quels sont les effets du partage des risques ?

Les effets positifs

Une amélioration des performances économiques

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À retenir

La prise en charge des risques assure un accroissement du bien-être social.

Prenons l’exemple du tabagisme. Si l’État élabore une campagne de sensibilisation contre les risques liés au tabac, alors les individus seront incités à modifier leurs comportements individuels.
De plus, si tous les individus mutualisent le risque de développer une maladie, alors les individus victimes du tabac pourront être mieux pris en charge.

  • La prise en compte des risques au niveau collectif se révèle bénéfique sur le plan individuel.

Enfin, une prise en charge collective des risques permet de compenser les effets négatifs associés aux risques en redistribuant des prestations sociales corrigeant une diminution de ressources.

  • Ainsi, lors d’une crise économique, l’assurance sociale remplit le rôle de stabilisateur en permettant de maintenir un niveau stable de consommation.
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À retenir

La gestion des risques créé donc une solidarité invisible entre les agents qui améliore les performances économiques au niveau collectif.

Le risque d’aléa moral

Cependant, la prise en charge collective des risques peut s’accompagner d’effets indésirables. Le principal effet négatif est l’aléa moral.

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Définition

Aléa moral :

Situation dans laquelle, lorsque deux agents sont liés par un contrat, l’un d’entre eux peut léser l’autre en raison de la présence d’une asymétrie d’information.

Si un agent (une compagnie d’assurance par exemple) décide de prendre en charge un individu (un conducteur par exemple), alors ce dernier risque de modifier son comportement une fois qu’il sera assuré. Il s’agit d’un aléa moral (ou risque moral) qui n’était pas présent avant la signature du contrat.

  • Ainsi, le fait de couvrir un risque peut entraîner une montée des risques.

Des différences d’exposition et de réaction face aux risques

Des attitudes différentes face aux risques

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Définition

Aversion au risque :

Comportement d’une personne qui, face à un risque, limite sa prise de risque.

Les individus ont tendance à adopter spontanément une aversion au risque.
Prenons l’exemple d’un conducteur qui ralentit avant un radar automatique alors qu’il roule à une vitesse inférieure à la limite autorisée. Cette aversion au risque, hormis les cas de déviance, est partagée par la grande majorité des individus. Toujours est-il que cette tendance n’est pas la même chez tous les individus. Elle dépend en grande partie de la situation individuelle.

  • Un individu exposé à un risque aura une aversion plus grande face à ce risque qu’un individu n’ayant jamais été exposé à ce risque.

Des risques différents en fonction du milieu social et du genre

L’exposition aux risques sociaux varie en fonction de la catégorie socioprofessionnelle.
Au travail, de nombreuses données statistiques tentent de quantifier l’exposition aux risques sanitaires. En 2013, selon l’enquête « Conditions de travail », 86 % des ouvriers déclaraient être amenés à prendre le risque d’être blessés ou accidentés sur leur lieu de travail contre seulement 22 % des cadres et professions intellectuelles supérieures.

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À retenir

La catégorie socioprofessionnelle des ouvriers est bien souvent la plus exposée aux risques professionnels.

  • Par exemple, un ouvrier a plus de probabilités de respirer de la fumée ou de la poussière et d’être en contact avec des produits dangereux qu’un individu de n’importe quelle autre PCS, ce qui peut par la suite générer de nombreuses maladies.

Le genre peut aussi influencer l’exposition aux risques. La socialisation différenciée en fonction du genre conditionne les comportements des individus.
Une récente enquête de l’observatoire national interministériel de la sécurité routière (ONISR) indique qu’en 2017, trois fois plus d’hommes que de femmes sont décédés sur la route en France.
Les causes relevées chez les conducteurs sont, par ordre d’importance : la vitesse excessive ou inadaptée, l’alcool et les stupéfiants.
Pour les conductrices, il s’agit de l’inattention, du non-respect des priorités, et seulement ensuite de la vitesse et de l’alcool.
Enfin, le rapport souligne que 79 % des hommes qui sont décédés sur les routes en 2017 étaient des conducteurs contre seulement 45 % des décès féminins.

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À retenir

On peut en conclure que le fait d’être un homme ou une femme peut fortement influer sur l’exposition aux risques sociaux. La nature et l’intensité des risques sont fortement variables en fonction du genre de l’individu.
D’autres variables telles que l’âge ou encore le lieu de résidence ont également une influence sur les risques sociaux.

La protection sociale : entre logique d’assurance et d’assistance

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Définition

Protection sociale :

Ensemble des dispositifs permettant aux individus ou aux familles de se protéger d'un certain nombre de risques sociaux : maladie, chômage, vieillesse, accidents du travail, handicap, enfants (risque d'appauvrissement).

Ce sont les administrations publiques et les administrations de sécurité sociale qui assurent la protection sociale. Elles mettent en œuvre la solidarité nationale via les prélèvements nécessaires au financement des dépenses de protection sociale.

La Sécurité sociale française

La Sécurité sociale est l’acteur principal de la protection sociale française. Cet organisme a été créé grâce aux ordonnances du 4 octobre 1945. Elle se compose de nombreuses caisses d’assurances sociales obligatoires gérées par l’État et ses partenaires sociaux afin de couvrir les risques sociaux liés à la vieillesse, la maladie, les accidents du travail ou la famille.

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Astuce

On parle de « branches » pour désigner les différentes caisses chargées de prendre en charge chacun de ces risques.

En fonction de l’activité professionnelle, quasiment tous les individus sont rattachés à un régime de Sécurité sociale. Chacun participe donc à son financement en fonction des règles de son propre régime.

Entre logique d’assurance…

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Définition

Assurance :

L’assurance est un système consistant à protéger les individus des conséquences d'un risque si et seulement si ces derniers ont au préalable cotisé pour s’en prémunir.

En France, la protection sociale s’est d’abord construite sur le modèle assurantiel hérité du modèle bismarckien. Le chancelier allemand Bismarck (1815-1898) est en effet le premier à avoir mis en place un système de protection social assurantiel en Allemagne à la fin du XIXe siècle.
Dans ce type de système, les travailleurs versent une cotisation qui est fonction de leur revenu. Cette dernière ouvre un droit à bénéficier d’une couverture proportionnelle au risque pouvant intervenir. Ce système de protection sociale s’est largement inspiré des mutuelles ouvrières (assurances privées) apparues au XIXe siècle. On dit que l’assurance sociale fonctionne d’ailleurs sur le principe de la mutualisation des risques.

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À retenir

En France, on assiste à la généralisation de la Sécurité sociale à tous les travailleurs à partir de 1945.

Elle collecte les cotisations sociales au sein de différentes administrations. Chaque caisse représente une branche couvrant un risque spécifique. Ce sont les travailleurs et les employeurs qui fournissent les cotisations sociales.

  • Les travailleurs cotisent une partie de leur salaire brut (environ 15 % en 2019).
  • Les employeurs, eux, cotisent une autre partie du salaire (environ 30 % des salaires bruts).

En 2016, il existe trois principaux risques couverts en France.

  • La vieillesse (environ 45 % des prestations)

En France, le principal poste de recettes et de dépenses de la Sécurité sociale concerne la branche vieillesse. Cette branche de la protection sociale finance le système de retraites par répartition. Cela signifie que les actifs cotisent pour les retraités. Les cotisations vieillesse sont reversées directement aux retraités (pensions de retraite). La couverture du risque vieillesse fait l’objet de nombreux débats en France, car le vieillissement de la population fait peser un risque croissant sur son financement.

  • Plus les retraités sont nombreux et vivent longtemps, plus le financement par les actifs est compliqué.
  • La maladie (environ 40 % des prestations)
  • La famille (environ 11 % des prestations)
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Attention

En fonction des pays et des époques, il existe différents systèmes d’assurance sociale permettant la gestion collective des risques : l’assurance privée et l’assurance publique.

  • Dans le premier cas, elle est gérée par une entreprise : une mutuelle (entreprise dont le but n’est pas lucratif) ou une compagnie d’assurance. Certaines sont facultatives (assurance vie par exemple) et d’autres sont obligatoires (assurance automobile ou habitation par exemple).
  • En ce qui concerne l’assurance publique (la Sécurité sociale par exemple), le financement se fait grâce aux cotisations sociales prélevées sur les revenus du travail.

…et logique d’assistance

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Définition

Assistance :

Système de protection sociale consistant à accorder aux plus démunis un minimum de ressources sans qu'ils aient eu besoin au préalable de participer au financement du système de protection sociale.

Historiquement, ce modèle de protection sociale apparaît en Angleterre au sortir de la Seconde Guerre mondiale. C’est le modèle beveridgien conçu par l’économiste et homme politique William Beveridge (1879-1963). Il repose sur une logique assistancielle et entend « sortir l’homme du besoin ».

L’assistance sociale est universelle et consiste à verser un minimum de ressource aux plus démunis sans qu’ils aient eu besoin de contribuer au système au préalable. La couverture est universelle et c’est l’État qui assure cette prestation grâce à l’impôt qu’il collecte.

  • La Sécurité sociale française s’est peu à peu ouverte à ce type de logique avec notamment la création en 1988 du revenu minimum d’insertion (RMI) qui deviendra le revenu de solidarité active (RSA) en 2005.

Notons également le déploiement en 2000 de la couverture médicale universelle (CMU), devenue protection universelle maladie (PUMA) en 2016 : elle dote d’une couverture médicale toutes les personnes qui, faute d’un accès à l’emploi, ne peuvent ouvrir des droits au régime d’assurance maladie. Contrairement à d’autres régimes, elle est entièrement gratuite pour les faibles revenus.

Une contribution à la solidarité et à la réduction des inégalités

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Définition

Solidarité :

Lien de dépendance réciproque entre des individus ou des groupes. La solidarité est à la base de toute cohésion sociale.

La protection sociale fait l’objet de nombreuses critiques. Les débats actuels insistent sur la triple crise de l’État-providence :

  • crise de financement (hausse des dépenses et faiblesse des recettes),
  • crise d’efficacité (la pauvreté et les inégalités ont du mal à diminuer depuis la fin des Trente Glorieuses),
  • et enfin, crise de légitimité (les individus questionnent de plus en plus le bien fondé d’un tel système).

Pourtant, en remettant en cause la protection sociale, que resterait-il des liens de solidarité ?
Ce qui est parfois vécu comme une soustraction (on m’enlève tant d’euros de cotisations et d’impôts) s’apparente socialement à une addition (si je cotise, je bénéficie de tant de prestations et mes impôts financent, par exemple, la prévention, la collecte des déchets, l’éducation, etc.).

  • Ainsi, il semblerait que la remise en cause permanente des systèmes de protection sociale s’apparente plus à une idéologie pouvant remettre en cause les liens de solidarité dont les générations actuelles ont hérité.

Un impact sur les inégalités

La protection sociale française à un impact certain sur la réduction des inégalités.
En 2016, les 10 % des ménages français ayant le niveau de vie le plus faible ont un revenu disponible moyen équivalent à 9 100 € par an (environ 760 €/mois). 20 % de cette somme (1 820 €/an) est lié à des minima sociaux et des primes d’activité, 17 % aux allocations logement, 14 % aux prestations familiales.

  • Pour le dire autrement, la moitié du salaire moyen des 10 % les plus pauvres vient d’une assistance sociale.
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À retenir

La France possède actuellement un des systèmes de protection sociale les plus complets au monde. Il s’agit d’un système mixte car il repose d’abord sur une logique assurantielle mais propose aussi une panoplie de mesures assistancielles. On estime que la Sécurité sociale redistribue sous forme de prestations sociales environ 30 % de la richesse nationale (PIB), faisant de la France le premier pays européen en matière de protection sociale en 2016.

Conclusion :

Les risques sociaux évoluent fortement en fonction du degré de développement d’une société. Plus les sociétés se modernisent et plus les risques ont tendance à se complexifier. Certains éléments permettant de diminuer la probabilité qu’un risque survienne sont à prendre en considération : la prévention, l’aversion au risque, la faible exposition ou encore une bonne perception des risques.
Dès lors qu’un risque survient, il entraîne une baisse des ressources et/ou une augmentation des dépenses. Se pose alors la question de la prise en charge du risque. Certaines sociétés ont plutôt développé une gestion privée des risques reposant en parallèle sur l’existence possible de solidarités familiales. D’autres États ont opté pour une gestion collective des risques reposant sur le développement d’un système de protection sociale.