Du patrimoine individuel au patrimoine mondial
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Introduction :
Le terme patrimoine dérive du latin patrimonium, qui désigne l’ensemble des biens et des droits hérités du père. Initialement, la notion de patrimoine possède donc une dimension juridique puisqu’elle désigne la transmission des biens acquis au sein d’une famille patriarcale (dominée par le père).
Or, depuis la fin du XIXe siècle, cette notion s’est progressivement élargie. En effet, à partir de cette époque le patrimoine est considéré comme un ensemble de biens et de pratiques représentatifs du passé des sociétés et de leurs histoires et chargés d’une valeur symbolique si forte qu’elle justifie sa conservation et sa transmission aux générations suivantes.
Nous allons nous efforcer de saisir ici l’évolution progressive de la notion de patrimoine et son universalisation avec la création de la notion de patrimoine mondial par l’Unesco dans les années 1970.
La construction et l’élargissement de la notion de patrimoine
La construction et l’élargissement de la notion de patrimoine
Dès l’Antiquité, la notion de patrimoine va commencer à évoluer : certains biens, de privés, vont en effet acquérir une dimension collective notamment en raison de leur caractère sacré. Cependant, c’est au Moyen Âge qu’on va voir émerger les prémices de cette évolution.
La longue construction de la notion de patrimoine
La longue construction de la notion de patrimoine
Les prémices de la notion de patrimoine apparaissent au Moyen Âge avec les premières réflexions autour de la sauvegarde d’objets investis d’une valeur symbolique ou religieuse. Ces objets sont les reliques des saints et les regalia mais aussi les édifices anciens, et les collections des bibliothèques royales et princières.
Regalia :
Ensemble d’objets symboliques liés à la royauté. En France par exemple, les regalia de la monarchie française sont l’ensemble d'objets symboliques utilisés lors du sacre des souverains, comme la Sainte Ampoule, la fiole qui aurait contenue l’huile utilisée lors du baptême du roi Clovis (466-511).
Ce n’est cependant pas à l’État monarchique que l’on doit les premières initiatives de préservation de l’intégrité des monuments et reliques anciens. Les rois, par exemple, n’hésitaient pas à détruire tout ou partie d’un château afin de l’agrémenter à leur goût. Quant aux élites ecclésiastiques, elles n’hésitaient pas à faire détruire les monuments antiques païens. Il faudra attendre la Renaissance et le règne de François Ier (1515-1547) pour que les élites aristocratiques développent un goût prononcé pour l’anticomanie, c’est-à-dire la collection d’objets anciens. Cependant, ces collections aristocratiques visaient avant tout, par l’accumulation d’œuvres d’art, à démontrer le goût et la richesse de leurs propriétaires.
À l’époque moderne, le développement des voyages parmi l’aristocratie ainsi que la diffusion de l’imprimerie, vont contribuer à modifier le regard sur les vestiges du passé. Entre le XVIIe et le XIXe siècle se développe le Grand Tour, un long voyage en Europe effectué par les jeunes gens issus des plus riches familles de l’aristocratie et de la bourgeoisie européennes. Ce voyage d’éducation, qui durait plusieurs années, était l’aboutissement des études des élites sociales de l’époque. Ces études étaient majoritairement fondées sur les humanités grecques et latines. Le Grand Tour, dont la destination privilégiée était l’Italie, avait notamment pour effet de mettre la haute société européenne et les artistes en contact avec l’art antique et, par ricochet, de développer le goût pour les vestiges antiques. En ce sens, le Grand Tour participa activement à la patrimonialisation. Des guides sont en effet édités et diffusés à travers l’Europe à partir de la fin du XVIIIe siècle qui recensent les vestiges et autres monuments que les jeunes gens fortunés qui parcourent le continent doivent impérativement voir. Ils répertorient également les itinéraires à suivre pour y parvenir.
Patrimonialisation :
Processus socio-culturel, juridique ou politique par lequel un monument, un bien ou une pratique se transforme en objet du patrimoine digne de conservation et de restauration.
Cependant, il faut attendre la fin de l’époque moderne (fin XVIIIe siècle) pour assister aux premières initiatives de sauvegarde du patrimoine. À partir de la Révolution, ce mouvement, d’abord local, va se développer grâce à l’essor de la presse.
Désignant pendant l’Antiquité l’ensemble des biens hérités du père, la notion de patrimoine a progressivement évolué au cours de l’histoire pour désigner un bien reconnu digne de conservation, de restauration et de transmission par une société. C’est avec la Révolution que le processus de patrimonialisation va commencer à véritablement prendre de l’ampleur.
b. Le patrimoine en France : un héritage au profit des générations futures
La Révolution est un moment charnière dans la construction de la notion de patrimoine en France. À partir de l’an II (1794), est dressé l’inventaire des biens du clergé et de la noblesse.
- Cet inventaire fonde le principe de patrimonialisation.
Il consacre le rassemblement des œuvres d’art au profit de la nation en raison de leur valeur esthétique, symbolique et historique. En effet, l’inventaire ne répertorie pas uniquement les monuments historiques et les demeures de la noblesse et du clergé, mais aussi les œuvres qui s’y trouvaient. Désormais, la peinture, la sculpture ou encore la gravure constituent des domaines artistiques répertoriés dans les inventaires nationaux. Dans un manuel rédigé sous l’autorité de la Commission contemporaine des Arts, créée par la Convention sous la Révolution, sobrement intitulé Instruction sur la manière d'inventorier et de conserver, dans toute l'étendue de la République, tous les objets qui peuvent servir aux arts, aux sciences, et à l'enseignement le médecin Félix Vicq d’Azyr définit le premier les principes fondateurs de la notion de patrimoine.
Au XIXe siècle, intellectuels, artistes et écrivains se mobilisent à leur tour en faveur du patrimoine et de sa préservation. En 1832, dans un article intitulé « Guerre aux démolisseurs » Victor Hugo s’élève contre les destructions de monuments historiques. Il écrit : « il faut le dire et le dire haut, cette démolition de la vieille France, que nous avons dénoncée plusieurs fois sous la Restauration, se continue avec plus d’acharnement et de barbarie que jamais ».
Les monuments de culte, notamment, sont au cœur des combats menés en faveur du patrimoine à l’aube de la Première Guerre mondiale. Dans le pamphlet La grande pitié des églises de France, qui constitue le recueil de discours ayant été prononcés devant l’Assemblée nationale entre 1910 et 1914, l’écrivain et député Maurice Barrès mène campagne pour la défense des églises menacées de ruine dans le contexte de la loi de séparation des Églises et de l’État de 1905, qui prive l’Église de ses financements étatiques. Faute d’entretien, le patrimoine religieux français se trouve alors en péril, en particulier les églises rurales.
- L’objectif de Barrès est de mener à une prise de conscience de l’opinion publique et à un amendement de la loi afin de sauver les églises qu’il considère comme un « trésor national » patrimonial digne d’être préservé.
Ce combat aboutira au vote de la loi de 1913 sur les monuments historiques et à la création, l’année suivante, de la Caisse des monuments historiques. Cette loi demeure encore aujourd’hui la pierre angulaire du dispositif de protection et de conservation du patrimoine monumental et mobilier en France. La principale disposition de la loi est le classement d’office du bien immobilier présentant un intérêt patrimonial, qu’il appartienne à une personne publique ou privée, et dont la conservation présente un intérêt pour la société (au sens d’État) du point de vue de l’art ou de l’histoire. La demande de classement peut être soumise par le propriétaire du bien ou peut se faire sans son aval. Une fois un bien classé au titre des monuments historiques, il ne peut ni être détruit, ni déplacé ni même faire l’objet d’un quelconque travail de restauration ou de réparation sans autorisation préalable de l’administration. Il s’agit donc d’une limitation forte faite au droit de propriété.
Les destructions patrimoniales survenues au cours des deux guerres mondiales vont mettre en lumière à l’échelle internationale la problématique de la sauvegarde du patrimoine. Des ONG, mais également des organisations internationales (OI), vont s’emparer de la question et s’engager en faveur de la protection des patrimoines culturel et naturel. En 1948, l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) est créée, suivie par la fondation, en 1965, du Conseil international des monuments et sites historiques dans le monde (ICOMOS) qui a pour mission la protection des monuments et sites historiques et naturels à travers le monde.
Il s’agit d’une nouvelle étape dans l’évolution de la notion de patrimoine, qui intègre désormais, outre les vestiges historiques issus du travail humain, des éléments naturels et environnementaux.
- Ainsi patrimoine n’est plus seulement considéré comme un bien privé ou national, mais comme un héritage de l’humanité dans son ensemble.
La Révolution marque un tournant dans l’évolution de la notion de patrimoine. Désormais, les vestiges du passé sont considérés comme un héritage national devant être préservé afin d’être transmis aux générations futures. Cependant, les destructions engendrées par les deux guerres mondiales vont voir l’émergence d’une nouvelle conception du patrimoine comme héritage de l’humanité.
Le patrimoine mondial de l’Unesco
Le patrimoine mondial de l’Unesco
À partir de la fin du XIXe siècle, les sociétés se saisissent de la notion de patrimoine et deviennent des acteurs de la patrimonialisation.
Acteurs et construction du patrimoine mondial
Acteurs et construction du patrimoine mondial
Depuis le XIXe siècle, de plus en plus d’acteurs (ONG, OI, groupes de pression, milieux politiques et associatifs, etc.) se mobilisent à travers le monde contribuant à élargir la notion de patrimoine.
Le National Trust for Places of Historic Interest or Natural Beauty fondé au Royaume-Uni en 1895, est une association à but non lucratif qui a pour mission de conserver et de mettre en valeur des monuments et des sites remarquables à travers tout le Royaume-Uni. Fort de 55 000 bénévoles et second propriétaire foncier du royaume derrière la monarchie, le National Trust participe ainsi à la sauvegarde de sites naturels sur plus de 1200 kilomètres de côtes et met en valeur plus de 300 monuments qui vont du site mégalithique à des édifices industriels en passant par bon nombre de manoirs et de châteaux.
Un événement historique au lendemain de la Seconde Guerre mondiale contribua particulièrement à cette internationalisation de la notion de patrimoine : la création de l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture, l’Unesco. Créée à la fin de la Seconde Guerre mondiale, l’Unesco a pour mission d’assurer le maintien de la concorde entre les peuples en facilitant les échanges culturels et la coopération scientifique entre eux. Au cours de ses premières années d’existence, les activités de l’Unesco ont principalement été orientées en direction de la lutte contre le racisme et en faveur de la promotion de l’enseignement primaire obligatoire, gratuit et universel dans les pays en voie de développement. À partir de 1960 cependant, l’Unesco va également se mobiliser en faveur de la préservation du patrimoine à l’échelle mondiale. En 1954, le premier ministre égyptien Gamal Abdel Nasser (qui deviendra président entre 1956 et 1970) décida de construire un grand barrage sur le Nil, à Assouan, non seulement afin d’augmenter les surfaces cultivables irriguées de l’Égypte, mais aussi afin de produire de l’électricité et de limiter la crue du Nil en aval du barrage. Cependant, la mise en eau du barrage menaçait l’existence du petit et du grand temple d’Abou Simbel, construits sous le règne et sur l’ordre du pharaon Ramsès II, qui régna de -1279 à -1213. Le 8 mars 1960, alors que débutaient les travaux du barrage, l’Unesco lança une campagne internationale pour sauvegarder les monuments de Nubie (région de l’extrême Sud de l’Égypte) menacés d’être engloutis par les eaux du lac de retenue du barrage.
La préservation des deux temples a fait l’objet d’une attention sans précédent au niveau international. L’appel lancé par l’Unesco a en effet débouché sur des fouilles archéologiques de grande envergure dans la région, qui ont conduit à l’inventaire de centaines de sites patrimoniaux et au sauvetage de plusieurs milliers d’artefacts. Surtout, la campagne a permis de lever les financements nécessaires pour déplacer plusieurs temples vers des points plus élevés, afin de les mettre à l’abri de la montée des eaux. Les plus célèbres de ces temples étaient ceux d’Abou Simbel. Concrètement, les temples ont été sciés en blocs de plusieurs tonnes chacun et réassemblés entre 1964 et 1968.
Temples d’Abou Simbel sur les rives du lac Nasser, 2004, CC Dennis Jarvis, BY-SA
Le sauvetage des temples d’Abou Simbel rencontra un écho planétaire et contribua à imposer la thématique du patrimoine au sein des institutions internationales. C’est dans ce contexte que fut adoptée en 1972 par la conférence générale de l’Unesco, la Convention pour la protection du patrimoine mondial culturel et naturel.
Convention :
Accord entre plusieurs États ou organisations internationales comportant l’octroi et l’acceptation réciproques de droits et d'obligations.
La convention reconnaît l’existence de lieux (monuments, espaces naturels) dotés d’une valeur universelle et exceptionnelle qui, à ce titre, devraient faire partie du patrimoine commun de l’humanité. Dans ce contexte, les États signataires reçoivent pour mission commune d’identifier et de sauvegarder le patrimoine naturel et culturel le plus remarquable de la planète.
- La convention fait de la protection de l’environnement et des biens culturels un héritage commun de l’humanité.
Tout comme le patrimoine national en France, le patrimoine mondial est inventorié. En 2019, 1121 sites étaient inscrits sur la liste du patrimoine mondial par l’Unesco. Cependant, ce patrimoine est très concentré géographiquement. La moitié se trouve en Europe et en Amérique du Nord comme le démontre la carte ci-dessous. Avec 51 sites, l’Italie est le pays qui possède aujourd’hui le plus de sites inscrits au patrimoine mondial de l’humanité.
Cette concentration occidentale est due à la fois à une prise de conscience plus tardive de la notion de patrimoine dans l’espace extra-occidental et à un certain « occidentalo-centrisme » (une attention plus importante adressée à l’Occident qu’aux autres parties du monde) de la part des instances de gouvernance du patrimoine mondial.
À partir de la fin du XIXe siècle, la création d’associations permet la multiplication des acteurs de la patrimonialisation dans plusieurs pays. Avec la ratification de la convention pour la protection du patrimoine culturel et naturel de l’Unesco, le patrimoine fut élevé au rang d’héritage commun de l’humanité, tandis que sa définition s’élargit au patrimoine naturel.
Un patrimoine de plus en plus diversifié
Un patrimoine de plus en plus diversifié
La patrimonialisation s’est ensuite étendue à des objets et des pratiques culturelles. En 2003, l’Unesco a en effet élargi la notion de patrimoine mondial en l’étendant au patrimoine culturel immatériel à travers la Convention de la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel. Concrètement, cela signifie que des pratiques ou expressions culturelles comme la gastronomie française, ou le savoir-faire des potières de Sejnane, ville du Nord de la Tunisie, sont reconnues comme dignes d’intérêt culturel, protégées et mises en valeur.
Certains éléments du patrimoine culturel immatériel concernent des territoires et des sociétés très éloignées culturellement et géographiquement, mais uni par certaines pratiques artistiques, culturelles ou esthétiques.
C’est notamment le cas de la fauconnerie, ajoutée à la liste du patrimoine immatériel de l’humanité en 2016 comme un patrimoine humain vivant à l’initiative d’une part, de pays européens, comme la France, l’Allemagne ou encore l’Espagne et la Belgique, mais également asiatiques (Mongolie, Pakistan) et d’autre part, du Moyen-Orient comme l’Arabie Saoudite ou encore les Émirats Arabes Unis. La fauconnerie est une pratique qui peut varier d’un pays à l’autre, cependant, les méthodes de dressage des oiseaux de proie et les buts poursuivis sont les mêmes, ce qui justifie son classement au patrimoine culturel immatériel.
Patrimoine culturel immatériel :
Ensemble de traditions orales ou d’expressions vivantes héritées de nos ancêtres et transmises à nos descendants, comme les arts du spectacle, les connaissances liées à la nature, à l’univers ou le savoir-faire nécessaire à l’artisanat traditionnel.
La patrimonialisation s’élargit aussi à des sites récents.
La ville du Havre, entièrement détruite par les bombardements alliés au cours de la Seconde Guerre mondiale et reconstruite à l’issue de la guerre, est inscrite au patrimoine mondial de l’Unesco depuis 2005.
La France a d’ailleurs créé en 1999 un label spécifique « Patrimoine du XXe siècle », qui regroupe des milliers de monuments patrimoniaux comme le monument aux morts de la Côte-Saint-André en Isère.
Enfin, la patrimonialisation s’étend à des paysages, naturels comme artificiels. Les États-Unis furent le premier pays à mettre en œuvre une vaste politique de protection de la nature et des paysages. Dès le XIXe siècle, le pays se dota de nombreux parcs nationaux. En 1872, le président Ulysses Simpson Grant créa le premier parc national du monde à Yellowstone. D’une superficie de plus de 8900 kilomètres carrés, le parc, situé à cheval entre les états du Wyoming, de l’Idaho et du Montana est inscrit au patrimoine mondial de l’Unesco depuis 1978. Outre de nombreux grands mammifères, comme des ours noirs ou des bisons sauvages, le parc a permis la préservation d’une importante forêt subalpine. Chaque année, plus de trois millions de visiteurs s’y pressent, en particulier pour admirer les nombreux geysers et sources d’eau chaude qu’il abrite. Le parc recèle en effet les deux tiers des geysers de la planète dont le geyser Old Faithful, un des plus grands geysers d’eau chaude et de vapeur au monde.
En France, à partir de la loi Malraux promulguée en 1962, la notion de patrimoine a été étendue à des quartiers historiques, comme le Vieux-Lyon.
Quartier du Vieux Lyon, 2017, CC Jorge Franganillo, BY-SA
Enfin, la notion de patrimoine s’est encore diversifiée en 1992, avec la création par l’Unesco de la catégorie des paysages culturels.
Paysages culturels :
Sites qui renvoient à des techniques spécifiques d’utilisation des terres qui en assurent et maintiennent la diversité biologique ou qui, associés dans l’esprit des populations à des croyances, ainsi qu’à des pratiques artistiques et coutumières très fortes, témoignent d'une relation spirituelle d’exception entre les humains et la nature.
Parmi les 114 sites inscrits au patrimoine mondial dans cette catégorie, on peut donner l’exemple des sites sacrés et chemins de pèlerinage bouddhiques dans les monts Kii au Japon, qui associent une ancienne tradition culturelle et religieuse, les pélérinages bouddhistes et shintoïstes dans les nombreux temples de la région, et la protection de l’environnement naturel avoisinant.
Le temple Seiganto-ji fait partie des sites sacrés et chemins de pèlerinage bouddhiques dans les monts Kii, 2014, CC Tetsuhiro Terada, BY-SA
La notion de patrimonialisation s’est élargie au cours du XXe siècle à des sites naturels riches en biodiversité et des paysages historiques urbains liés à des traditions souvent pluriséculaires et, à ce titre, dignes d’être préservés et transmis aux générations futures. Au patrimoine matériel est également venu se greffer le patrimoine immatériel, qui regroupe un ensemble de traditions orales, de savoirs et de savoir-faire qui constituent un legs historique de l’humanité.
Conclusion :
Initialement considéré comme un bien hérité du père, le patrimoine a acquis une nouvelle dimension à partir du Moyen Âge. Cependant, il faudra attendre le siècle des Lumières, avec le développement du Grand Tour puis la Révolution, pour que le patrimoine soit considéré comme l’ensemble des vestiges du passé d’une société dignes d’être préservés et transmis aux générations futures.
En France en particulier, la question du patrimoine va entraîner une prise de conscience de l’opinion publique qui va aboutir au vote de la loi de 1913 sur les monuments historiques, limitant de fait le droit de propriété. Les destructions patrimoniales opérées lors des deux guerres mondiales vont marquer un tournant décisif dans la prise de conscience de la nécessité de préserver le patrimoine culturel et naturel. C’est dans ce contexte que l’Unesco, créée en 1945, va affirmer, quelques années plus tard, la notion de patrimoine mondial, élevant ce dernier au rang d’héritage commun de l’humanité lors de la ratification de la Convention pour la protection du patrimoine mondial culturel et naturel en 1972. Cette internationalisation de la notion de patrimoine va s’accompagner de son élargissement avec la définition par l’Unesco d’un patrimoine culturel immatériel à partir de 2003 et la reconnaissance de la valeur patrimoniale de certains monuments contemporains récents, comme le viaduc de Millau, auquel la France a attribué le label « Patrimoine du XXe siècle ».