Juste la fin du monde
La construction de la pièce
La construction de la pièce
- la pièce s’inscrit dans la tradition du théâtre classique via plusieurs éléments :
- la liste des personnages ;
- la division en scènes ;
- les trois parties que sont le prologue, l’intermède et l’épilogue.
- Le prologue rappelle la tragédie (antique) puisqu’il annonce une fatalité.
- L’intermède est un moment confus où on voit les personnages entrer et sortir de la scène, comme s’ils se cherchaient, se tournant autour sans parvenir à se saisir.
- L’épilogue se démarque du reste du texte parce qu’il évoque un regret associé à un souvenir.
- Le prologue est, avec l’épilogue, le seul moment où le spectateur (ou le lecteur) peut sentir la parole vraie et sensible de Louis, celle qui motive le sujet de la pièce.
- Les dialogues des deux parties sont :
- des monologues qui se succèdent
- ou des répliques qui ne s’adressent qu’indirectement à Louis.
- C’est pourquoi il est possible de voir cette écriture comme une succession de récitatifs. Chacun des personnages, à tour de rôle, récite une partition qu’il avait sur le cœur.
Dire le non-dit
Dire le non-dit
- L’intrigue de la pièce est basée sur l’impossibilité des personnages à se parler.
- Pour faire comprendre cette difficulté de communication, Lagarce crée des effets de collage dans le discours :
- l’insertion de l’intermède entre les deux parties ;
- le prologue et l’épilogue au passé (alors que la pièce est au présent) ;
- les prises de paroles solitaires mises bout à bout.
- L’ellipse ne se fait pas sentir au niveau de la composition de la pièce, mais au sein des phrases : la famille peine à trouver ses mots, se corrige etc.
- Par ces procédés, la communication est toujours remise en question et se réfugie dans les blancs du texte.
- À l’inverse, Lagarce invente aussi des prises de paroles abondantes dans lesquelles le propos se perd :
- les monologues abreuvent ceux qui les écoutent d’un flot de détails superflus ;
- ils noient les révélations (on ne sait pas pourquoi Louis est parti) et les douleurs.
Une impuissance de la parole ?
Une impuissance de la parole ?
- Dans le texte, l’humour est encore un frein supplémentaire à l’aveu.
- Lagarce utilise le comique du second degré pour rendre un peu plus grinçante, par contraste, la dimension tragique de sa pièce.
- Il se moque des grands moments qui rythment la vie familiale : naissance, éducation, mariage, travail, argent, maladie, etc.
- Pour ce faire, il recourt à l’ironie, au lapsus, à l’absurde ou encore à l’humour noir.
- Le silence obstiné de Louis est à l’origine d’une foultitude de situations drolatiques, mais ambiguës, qui l’isolent de plus en plus.
- Toute l’ironie de la pièce repose sur cette situation : le spectateur sait de Louis quelque chose que les autres personnages ne savent pas (il va mourir).
- Il n’est donc pas possible de se ranger pleinement du côté des autres membres de la famille, il n’est possible que de juger de la gravité de ce qu’ils disent, comme si nous étions dans la tête de Louis.
- En retournant parmi les siens, Louis a cru pouvoir les associer à son malheur et y puiser un apaisement.
- En réalité, il assiste plutôt à son procès et reste impuissant face aux flots de reproches.
- Pire encore, en le regardant ainsi agoniser nous sommes, nous lecteurs ou spectateurs, des curieux.