L'émergence d'une société urbaine
Introduction :
À partir du XIe siècle, les sociétés d’Europe occidentale entrent dans une phase de mutation. La population augmente, de nouvelles inventions facilitent les transports et les échanges commerciaux se développent considérablement. Les populations viennent s’installer autour des châteaux et des abbayes ou près d’anciennes cités romaines. De nouvelles villes, peuplées et animées, apparaissent. Ces changements entrainent la formation d’une société urbaine variée, dont les marchands et les artisans sont des acteurs majeurs.
Dans cette leçon, nous allons nous pencher sur l’émergence d’une nouvelle société urbaine, en Occident, entre le XIe et le XVe siècle.
Dans une première partie, nous analyserons les villes, qui gagnent en importance au Moyen Âge. Dans une deuxième partie, nous verrons que ces villes sont les lieux privilégiés du commerce et de l’artisanat. Enfin, dans une troisième partie, nous étudierons la diversité de la nouvelle société urbaine.
L’essor des villes
L’essor des villes
La croissance démographique et le développement des bourgs
La croissance démographique et le développement des bourgs
Au XIe siècle, la croissance démographique et la paix en Europe occidentale expliquent le développement des villes.
Les populations se regroupent dans des lieux favorables à la circulation : dans des ports, près des ponts, à des croisements de routes et également au pied des châteaux forts et autour des abbayes.
On appelle ces villes des bourgs. Leurs habitants sont des bourgeois.
Les bourgs sont entourés d’une enceinte, c’est-à-dire d’une muraille. Au-delà de cette enceinte qui protège la ville s’étendent les faubourgs, comme on peut le voir sur cette image.
À l’intérieur des remparts, les rues étroites sont bordées de maisons en bois.
Lieu de sociabilité par excellence, la place du marché est souvent entourée de beaux édifices.
La ville est divisée en paroisses et chaque paroisse possède sa propre église.
À partir du XIIe siècle, d’immenses cathédrales sont construites dans les grandes villes.
Au début du XIVe siècle, environ 20 % des européens vivent dans des villes, mais la plupart d’entre elles ne comptent alors que quelques milliers d’habitants.
Cependant, dans cette Europe médiévale se dessinent déjà de grandes villes. Certaines comptent plus de 100 000 habitants. C’est le cas de Venise et Milan dans le Nord de l’Italie ou encore de Bruges en Europe du Nord.
La conquête des libertés
La conquête des libertés
Les bourgeois, comme les paysans dans les campagnes, sont soumis à l’autorité d’un seigneur. Néanmoins, à partir de la fin du XIe siècle, les habitants des bourgs obtiennent du seigneur une charte de franchises.
Charte de franchises :
C’est un document qui accorde des libertés aux habitants des bourgs.
Ces bourgs deviennent alors des communes, et se dotent d’un conseil de commune.
Conseil communal :
C’est un conseil qui se réunit dans l’hôtel de ville, rédige les règlements, gère l’organisation de la ville et son entretien. C’est aussi lui qui lève les impôts.
Cependant, le Conseil de commune se retrouve très vite dominé par quelques personnes et notamment par les grandes familles marchandes.
Aussi, à la fin du XIIIe siècle, de nombreuses révoltes éclatent : le peuple ne supporte plus d’être écarté du pouvoir et soumis aux puissants marchands.
En effet, cet essor considérable des villes s’accompagne de la naissance d’un nouveau monde urbain dans lequel les marchands et les artisans jouent un rôle central.
La ville, un monde de marchands et d’artisans
La ville, un monde de marchands et d’artisans
Le marché, la place centrale de la ville
Le marché, la place centrale de la ville
À partir du XIe siècle, le commerce s’intensifie. Il y a beaucoup plus de produits à vendre grâce à l’augmentation de la production agricole et artisanale.
Les routes sont moins dangereuses et les méthodes de transports plus efficaces, sur mer comme sur terre. Les villageois vont alors vendre leurs produits, c’est-à-dire des céréales, des œufs, du lait, des légumes ou encore de la viande aux habitants des villes, qui ne cessent de voir leur nombre augmenter.
Dans la ville, la place du marché est le lieu central de la vie marchande. C’est là que l’on vient vendre et acheter les produits locaux.
Les villes et le grand commerce
Les villes et le grand commerce
Les villes sont également actrices du commerce qui se développe à l’échelle de l’Europe occidentale. On l’appelle le « grand commerce ». Les marchands d’Italie, de Flandre et d’Allemagne s’échangent leurs produits dans des foires.
Foires :
Il s’agit de grands marchés qui durent plusieurs jours et qui se tiennent à des dates régulières sur les routes commerciales.
Ainsi, les foires de Champagne sont les principales foires sur les routes commerciales qui mènent du Nord de l’Italie à la Flandre. Les négociants y échangent de nombreuses marchandises, parmi lesquelles des étoffes et des épices.
- L’essor du commerce stimule une autre activité : l’artisanat.
L’artisanat et les villes
L’artisanat et les villes
Les villes sont peuplées d’artisans. On y trouve de nombreux boulangers et pâtissiers. Il y a également de plus en plus de bouchers, car la consommation de viande des citadins augmente à cette période. Par ailleurs, de nouveaux produits amenés grâce au grand commerce permettent de diversifier l’artisanat urbain. Les artisans vont désormais fabriquer des tissus de laine, de coton ou de soie. Ils travaillent aussi le cuir.
Les artisans se regroupent souvent en quartiers, où ils disposent d’ateliers et de boutiques ouverts sur la rue. On dit alors que les boutiques ont « pignon sur rue ».
Dans chaque atelier un maître emploie des compagnons ainsi que des apprentis.
Maître :
On appelle maître le patron de l’atelier.
Compagnons :
Travailleurs formés et salariés.
Apprentis :
Jeunes travailleurs qui apprennent leur métier auprès du maître.
Les artisans exerçant la même profession se regroupent dans des associations appelées « corporations » ou « métiers ». Ces corporations fixent les conditions de travail de chaque métier et la façon de fabriquer les produits afin d’assurer la qualité de la production.
Les artisans et commerçants font partie d’une nouvelle société urbaine, une société de plus en plus diversifiée et fortement inégalitaire.
Une nouvelle société urbaine
Une nouvelle société urbaine
Une société diversifiée et hiérarchisée
Une société diversifiée et hiérarchisée
Au sommet de la nouvelle société urbaine, on trouve les nobles et les grands marchands.
Ces derniers ont acquis leur fortune grâce au grand commerce, mais aussi grâce aux terres qu’ils ont achetées et qu’ils louent ainsi qu’à l’argent qu’ils prêtent en demandant des intérêts. Ils vivent dans de belles maisons, souvent situées dans le centre de la ville.
Ces grands marchands dirigent également bien souvent le Conseil communal.
La majorité de la population des villes quant à elle est composée d’artisans et de petits commerçants. Il y aussi des clercs et des domestiques. Les nombreux pauvres, qui font de petits métiers ou qui mendient, forment le bas de cette échelle sociale urbaine.
La forte présence de l’Église au sein des villes
La forte présence de l’Église au sein des villes
L’Église est très présente dans la ville.
On voit apparaitre à cette époque des ordres mendiants.
Ordres mendiants :
Les ordres mendiants sont des groupes de moines, tels que les Franciscains ou les Dominicains, qui vivent de la mendicité et se consacrent à l’enseignement de la religion.
Ils renforcent l’emprise de l’Église sur les populations urbaines.
Le pape Innocent III approuve la règle de saint François : c’est la naissance des Franciscains. Scène du retable de Saint François recevant les stigmates de Giotto, fin du XIIIe siècle. Musée du Louvre, Paris
L’Église prend également en charge l’enseignement.
L’enseignement le plus avancé est réalisé dans des écoles épiscopales.
Écoles épiscopales :
Écoles qui dépendent de l’évêque.
À partir du XIIIe siècle, l’Église ouvre des universités dans les grandes villes. Elles dépendent directement du pape.
Enfin, l’Église fait l’aumône, c’est-à-dire des dons, aux pauvres et crée des hôpitaux, appelés hôtels-Dieu. Sur cette miniature, on peut observer l’hôtel-Dieu de Paris où les moniales soignent des malades.
L’hôtel-Dieu de Paris, où les moniales soignent des malades. Miniature du Livre des propriétés des choses, XIIIe-XIVe siècle, BNF, Paris
Conclusion :
La forte croissance démographique, l’augmentation de la production agricole et le développement du commerce entraînent un essor urbain sans précédent, entre le XIe et le XVe siècle. Il y a de plus en plus de villes, et leur nombre d’habitants augmente considérablement. Ces villes ont une fonction économique, politique et religieuse. La nouvelle société urbaine qui se développe au Moyen Âge est une société diversifiée, hiérarchisée et fortement inégalitaire.