L’érosion, phénomène naturel et inexorable
Introduction :
Indépendamment du relief, tous les sols sont naturellement soumis à l’érosion. La cause peut être l’eau, le vent ou encore le travail du sol. Sous l’impact de ces éléments, le sol se détache, se déplace et se dépose. L’érosion peut être lente et passer inaperçue, ou se produire à un rythme inquiétant et être responsable de lourdes pertes de terre. Aujourd'hui, cette dégradation des sols contribue à l'appauvrissement des écosystèmes et met en danger la qualité de vie, voire même la survie de certaines populations vulnérables.
Après avoir étudié les différents types d’érosion, nous verrons comment cela entraîne la transformation du relief. Pour illustrer nos propos, nous nous pencherons plus précisément sur l’exemple du Vercors.
Les processus d’érosion
Les processus d’érosion
L’érosion des sols entraîne la dispersion des sédiments et donc également des particules de pollution qu’ils contiennent.
Érosion :
Usure et transformation de l’écorce terrestre par les agents atmosphériques, hydrologiques ou par l’action de l’homme.
Les sols agricoles souffrent particulièrement de cette érosion.
Une catastrophe géologique due à une surexploitation agricole s’est produite aux États-Unis dans les années 1930 : le Dust Bowl. Une série de tempêtes de poussière, associée à une intense sécheresse, ont détruit toutes les récoltes et les pâturages.
Ensevelissement dû à une tempête de poussière à Dallas (Dakota du sud)
Les sols ont un comportement différent en termes de vulnérabilité à l’érosion, c’est l’érodabilité.
Érodabilité :
L’érodabilité du sol est une mesure de la facilité avec laquelle le sol est érodé.
La stabilité structurale est un indice de la résistance de la désagrégation. Elle mesure la cohésion des agrégats et la capacité du sol à ne pas se désagréger. La texture du sol joue un rôle dans cette stabilité structurale.
Plusieurs processus participent à l’érosion des sols.
Le détachement
Le détachement
Pour que les particules du sol soient transportées, elles doivent dans un premier temps être détachées. Ce détachement peut être dû à l’impact des gouttes de pluie (appelé splash), allié au ruissellement. L’énergie nécessaire à ce détachement est très importante car :
- soit le sol est cohésif et il faut surmonter l’attraction entre les particules pour les mettre en mouvement ;
- soit le sol est non-cohésif et il faut lutter contre la gravité avant la mise en mouvement des particules dans l’eau.
Splash :
L’effet splash désigne une éclaboussure provoquée par l’impact des gouttes de pluie sur un sol qui subira alors une érosion.
Le transport
Le transport
Le transport, qui est le mouvement des particules, peut s’effectuer dans l’air par splash ou dans l’eau par ruissellement. Le débit et la vitesse d’écoulement peuvent avoir des effets différents : des particules de petite taille peuvent être gardées en mouvement pendant une longue durée, tandis que les particules plus grossières sont déposées rapidement, ce qui provoque un tri des particules par taille.
Le dépôt
Le dépôt
Les particules qui sont transportées se déposent tôt ou tard. Ce dépôt peut se faire sur la route, dans un fossé, une rivière etc. Tout comme pour le transport, la vitesse d’écoulement influence le dépôt des particules selon leur granulométrie (taille).
La gravité est centrale dans le processus d’érosion. Elle agit en effet sur l’eau (érosion hydrique), sur les masses atmosphériques (érosion éolienne), sur les masses de glace (érosion glaciaire) et sur les solides (érosion gravitaire). Dans tous ces types d’érosion on retrouve les trois étapes de détachement, transport et dépôt des particules.
Les facteurs d’érosion
Les facteurs d’érosion
La végétation protège la surface du sol. Les formes et l’importance de l’érosion sont liées à la couverture végétale dans un milieu donné. La densité du couvert végétal (une protection contre l’érosion n’est possible qu’à partir de $40$ à $50\,\%$ de couverture végétale) et le type de végétation ont donc un impact sur l’érosion.
Les tiges et les branches freinent le détachement par ruissellement et le transport des particules. Quant aux racines, elles forment un réseau qui maintient le sol en place, lui permettant ainsi de résister au détachement.
Les feuilles mortes et les débris végétaux constituent une couverture qui protège la surface de l’impact des gouttes, freine le ruissellement et enrichit le sol de matière organique.
- C’est pourquoi la destruction brutale de la végétation peut entraîner une érosion accélérée.
Certains autres facteurs influencent l’intensité du processus de détachement, de transport et de dépôt.
Le climat
Le climat
La pluie est un facteur important. Son intensité, son débit et sa répartition saisonnière influent sur l’érosion des sols.
En outre, le vent de par son transport des sédiments, est un autre facteur d'érosion.
Il a davantage d’impact dans les régions sèches où la végétation est quasi-absente, comme les déserts par exemple.
Une arche naturelle sculptée par l’érosion du vent en Jordanie ©EtanJ.Tal
La topographie
La topographie
Il faut également prendre en compte la topographie, c’est-à-dire l’inclinaison et la longueur de la pente, la présence de concavités ou convexités et les zones de concentration de ruissellement.
- La pente favorise une vitesse d’écoulement maximale.
Les activités humaines
Les activités humaines
L’organisation des parcelles cultivées et le travail du sol par des outils agricoles ont un impact sur l’érosion des sols. En effet, plus la taille des parcelles agricoles est grande, plus l’érosion est aggravée, puisqu’on obtient de grandes surfaces dépourvues de haies.
La présence de haies permet de couper le vent et de retenir le ruissellement.
En ce qui concerne le travail du sol, l’agriculteur retourne la terre régulièrement pour les semences, ce qui permet une aération des sols.
A contrario, l’utilisation du tracteur peut jouer un rôle dans la stabilisation des agrégats et le ralentissement du ruissellement.
Le mode d’exploitation par l’Homme (défrichements, pacages, coupes, incendies, végétation artificielle, vastes surfaces livrées aux troupeaux) crée une érosion anthropogène.
Érosion anthropogène :
L’érosion anthropogène est une érosion due aux actions de l’homme.
Les différents types d’érosion
Les différents types d’érosion
L’érosion hydrique
L’érosion hydrique
La vitesse et l’ampleur de l’érosion causée par l’eau dépendent de la pluie et du ruissellement : plus un épisode de pluie est intense et dure longtemps, plus le risque d’érosion est élevé.
L’impact des gouttes de pluie sur la surface du sol peut briser les agrégats et disperser les particules sur le sol. Évidemment, les particules plus légères sont facilement emportées par les éclaboussures d’eau de pluie et par les eaux de ruissellement. Il faudra plus d’énergie pour les particules plus lourdes. Ce sera d’autant plus vrai lors d’orages brefs et violents. Sur les terrains en pente, l’eau commence à ruisseler à la surface si l’excédent d’eau n’est plus absorbé par le sol ou si l’eau est piégée à la surface. Le gel, l’encroûtement ou le compactage du sol intensifient le ruissellement.
Il existe quatre formes d’érosion hydrique :
- L’érosion en nappe : c’est l’enlèvement graduel et uniforme du sol superficiel par l’eau de ruissellement sans formation de rigoles ni de ravines.
- L’érosion en rigoles : lorsque les eaux de ruissellement se concentrent, cela forme des filets et des rigoles.
L’érosion en rigoles ©VolkerPrasuhn
- L’érosion par ravinement : le sol est plus profondément entaillé que dans le cas des rigoles.
L’érosion par ravinement ©AgriculturalResearchService
- L’érosion des berges : cette érosion est due à l’affouillement, le sapement et l’effondrement des berges, des cours d’eau naturels et des canaux de drainage.
L’érosion des berges ©MickGarratt
L’érosion éolienne
L’érosion éolienne
Le vent qui balaie la surface du sol entraîne facilement des particules. Le transport se fait selon trois modes :
- la suspension : les particules très fines comme les poussières sont transportées en suspension dans l'air, parfois sur de très grandes distances ;
- la saltation : les particules de taille moyenne comme les sables se déplacent par bonds successifs ;
- le roulement ou traction : sous l’effet du vent ou entrainées par les autres particules, les plus grosses se déplacent par roulement ou traction à la surface du sol.
Les modes de transports des particules par érosion éoliennne
L’érodabilité du sol, la rugosité de sa surface, le climat, mais aussi la couverture végétale, impactent l’action du vent dans l’érosion des sols.
En effet, les sols lisses opposent peu de résistance à l’action du vent, de même des sols au taux d’humidité moindre, ou dépourvus de couverture végétale ou d’arbres faisant obstacle au vent.
Vermilion Cliffs
Parfois les érosions se cumulent.
- Les Vermilion Cliffs, par exemple, présentent une érosion à la fois hydrique et éolienne.
L’érosion chimique
L’érosion chimique
En plus des érosions mécaniques comme celles que nous venons de traiter, il existe des érosions chimiques dues à la décomposition des roches. Ce phénomène de dissolution des roches donne des karsts.
Karst :
Les karsts sont des paysages qui se développent essentiellement en région calcaire dans lesquelles l’eau a creusé de nombreuses cavités.
D’autres roches que les calcaires sont solubles : la silice, les carbonates, le gypse ou les sulfates. Les phénomènes d’altération comme l’hydratation, l’oxydation et l’hydrolyse modifient les minéraux des roches.
Les effets de l’érosion
Les effets de l’érosion
L’érosion : une menace grandissante pour la sécurité alimentaire
L’érosion : une menace grandissante pour la sécurité alimentaire
« Avec la dégradation et l'appauvrissement des ressources en terres, différents systèmes de production de subsistance essentiels se retrouvent menacés à l'échelle mondiale. Cette menace représente un sérieux défi pour nourrir une population qui devrait atteindre les 9 milliards d'habitants d'ici 2050 »
D’après un nouveau rapport de la FAO (organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture).
À cause de cela, sur tous les continents, de vastes zones sont touchées par la dégradation des terres, avec des incidences particulières. La plus grande menace est la perte de qualité des sols, suivie de la perte de biodiversité et de l'appauvrissement des ressources en eau. Certaines zones sont impactées par des pratiques d’exploitation qui entraînent l’érosion hydrique et éolienne, la perte de matière organique, des tassements de la couche cultivable, la perte de nutriments voire même la pollution des sols.
L’érosion : une transformation des paysages
L’érosion : une transformation des paysages
Prenons pour exemple le Vercors qui est un massif montagneux des Préalpes françaises. Il est formé de différentes roches calcaires dues à des phases de sédimentation anciennes. Depuis $1\,\text{million}$ d’années, les glaciers ainsi que l’eau ont érodé ce calcaire pour donner des gorges, des cirques, des grottes et des gouffres.
Gorge :
Une gorge est un passage encaissé entre deux reliefs, dû à l’érosion hydrique sur des roches sédimentaires.
Cirque :
Un cirque est une enceinte circulaire, formée par une dépression glaciaire, volcanique ou une reculée (érosion) karstique.
Formation du mont Aiguille
Le mont Aiguille est un mont du Vercors, formé d’une carapace calcaire au sommet surplombant des terrains marneux. Une ancienne érosion des Hauts-Plateaux du Vercors a séparé ce mont. Le creusement des vallons par les torrents a fait reculer la falaise qui borde le plateau, permettant ainsi au mont Aiguille d’avoir une position avancée.
Marne :
La marne est une roche sédimentaire formée de calcaire et d’argile.
La transformation à l’origine du mont Aiguille est le résultat d’une érosion lente, cependant certains paysages sont affectés beaucoup plus rapidement par l’érosion. C’est le cas notamment sur la côte, où certaines habitations qui ont été construites alors que la côte était à distance raisonnable se retrouvent menacées par l’érosion des falaises ou des dunes causée par les vagues.
Conclusion :
L’érosion est due à différents facteurs, elle se manifeste de différentes façons et ses effets sont divers, autant sur la biodiversité que sur la pérennisation des paysages. Ces pertes en sol (disparition de quantités importantes de sol) peuvent avoir de graves conséquences environnementales :
- les poussières soulevées par l’érosion éolienne polluent l’air et peuvent impacter la santé humaine ;
- les sédiments dus à l’érosion hydrique causent la turbidité de l’eau dans certains cours et réduit le volume des réservoirs aqueux.
De nombreux sols érodés ne servent plus à une production agricole, la matière organique disparaît et le volume disponible pour les racines diminue. Il est donc important de lutter contre cette érosion.