La France : mobilités, transports et enjeux d’aménagement
Introduction :
Le transport a un rôle majeur dans la vie économique et sociale d’un pays. Permettre la mobilité à ses administrés, c’est leur permettre l’accès à l’emploi, au logement, à la santé ou encore aux loisirs. Un pays développé comme la France dispose de moyens de transport diversifiés, qu’ils soient individuels ou collectifs. Les acteurs privés sont en concurrence pour exploiter ces différents modes de déplacement. Pour les pouvoirs publics, il s’agit d’aménager le territoire afin de permettre à chacun d’obtenir les services de transport les plus adaptés.
Dans une première partie, nous étudierons les caractéristiques du système de transport en France. Dans un second temps, nous verrons quels sont les acteurs du transport et la répartition des rôles de chacun. Enfin, nous nous intéresserons aux nouveaux enjeux soulevés par le secteur.
Un système de transport multimodal
Un système de transport multimodal
Les moyens de transports en France
Les moyens de transports en France
Les moyens de transports sont un outil de la mobilité. Il faut distinguer les mobilités pendulaires des mobilités ponctuelles ou saisonnières (congés, etc.).
Mobilités pendulaires :
Les mobilités pendulaires désignent les déplacements quotidiens domicile-travail.
L’automobile est le moyen de transport privilégié pour les trajets courts et les mobilités pendulaires. Le parc automobile français dépassait 39 millions de véhicules en 2017.
La France bénéficie d’un réseau autoroutier très dense, supérieur à 11 000 km aujourd’hui contre 143 km en 1960. Ce développement de l’autoroute entraine mécaniquement un développement économique pour le territoire concerné. Ainsi, on constate que des villes reliées par l’autoroute et le TGV à Paris, comme Le Mans, ont connu une croissance économique là où d’autres, moins reliées, ont stagné. Comme les routes nationales, les autoroutes sont gérées par l’État.
On appelle « routes secondaires » les autres voies destinées aux véhicules à moteur, c'est-à-dire les routes départementales et les voies communales. Elles représentent la majeure partie des voies de transport routier français et permettent de relier l’ensemble du territoire.
Les autres moyens de transport sont, par définition, des moyens de transport collectifs.
Le transport routier de voyageurs rentre dans cette catégorie : bus pour les trajets courts et cars pour les longues distances.
Le chemin de fer permet le transport de passagers mais aussi de marchandises ou d’animaux. En France, l’exploitation est confiée à la SNCF (Société Nationale des Chemins de Fer français). C’est un établissement public qui a bénéficié depuis sa création d’un monopole (unique à proposer ce service) sur les différents types de transport ferroviaire. Petit à petit, la SNCF est mise en concurrence avec d’autres entreprises, dans le cadre de l’homogénéisation des pratiques dans l’Union européenne.
Dans le domaine aéronautique, la France se distingue par la capacité d’accueil de ses aéroports. L’Aéroport De Paris (ADP) accueille ainsi 83 millions de passagers annuels à Roissy-Charles-de-Gaulle (93) et Orly (94). L’aéroport de Roissy est le deuxième aéroport d’Europe après celui de Londres-Heathrow. La France bénéficie donc d’une offre de transport diversifiée et multimodale (transport de plusieurs manières).
Ajoutons que le mode de déplacement dépend de l’accessibilité des transports mais aussi du territoire sur lequel on souhaite l’implanter. Par exemple, un espace très accidenté rend difficile l’exploitation de routes à grande vitesse. Ainsi, sur une île volcanique et montagneuse comme la Guadeloupe, on ne trouve pas d’autoroute. Les routes les plus rapides sont des routes nationales. On retrouve les mêmes difficultés sur un territoire comme la Corse en France métropolitaine.
La France bénéficie donc d’un tissu de transport diversifié et fonctionnel. Cependant, étudier l’organisation du transport en France revient à s’interroger sur la place prépondérante de Paris.
La macrocéphalie parisienne
La macrocéphalie parisienne
La France se distingue à tous les niveaux par une macrocéphalie parisienne.
Macrocéphalie :
Ce terme signifie « grosse tête » en grec. Il désigne le fait qu’une ville a une importance disproportionnée sur un territoire, au point que cela crée un déséquilibre avec les autres.
En effet, la France est historiquement un État centralisé. Paris s’est développée comme capitale politique mais aussi comme capitale économique ou encore culturelle. Son importance, à tous les niveaux, a tendance à éclipser les autres villes françaises. C’est loin d’être le cas de tous nos voisins européens. Un pays comme l’Allemagne se distingue par la présence de plusieurs capitales sur son territoire. Si la capitale politique est Berlin, la ville n’a pas la force économique de Munich ou Francfort.
Ainsi, Paris est la seule ville mondiale française, c’est-à-dire qu’elle a une forte influence au niveau international : cela se caractérise par la présence de l’UNESCO (organisme des Nations-Unies), de l’OCDE (Organisme de Commerce et Économie).
Dès lors, la macrocéphalie parisienne se traduit par une centralisation des différents modes de transport.
Quant au trafic aérien, les aéroports de Paris sont bien plus capacitaires que les aéroports de province. Comme on l’a vu, l’Aéroport de Paris accueille chaque année 83 millions de passagers. Le 3e aéroport de France, Nice, n’atteint pas les 10 millions.
L’offre de transport sur le territoire est organisée selon les décisions d’aménagement des acteurs publics ainsi que par l’exploitation par des acteurs privés.
Les acteurs du transport en France
Les acteurs du transport en France
Une mise en concurrence d’acteurs privés et semi-publics
Une mise en concurrence d’acteurs privés et semi-publics
Le transport et l’accès à la mobilité relèvent pour beaucoup du service public. Certains politiques et universitaires évoquent un « droit à la mobilité ».
Mobilité :
La mobilité désigne un changement de lieu.
En effet, pouvoir se déplacer librement a des conséquences directes sur la qualité de vie puisque cela peut donner :
- accès à un emploi ;
- accès à une formation ;
- accès aux soins (hôpitaux, pharmacie, médecins, etc.).
Cependant, les compagnies de transport semi-publiques ont aujourd’hui une exigence de rentabilité. Ainsi, la SNCF a fermé 5 000 km de voies depuis 1978 en raison d’un trafic trop faible ou d’installations vétustes dans lesquelles la compagnie n’a pas souhaité investir. Le chemin de fer présente des atouts car il est plus écologique et sécuritaire que le routier ou l’aérien.
Cependant, la SNCF est concurrencée par les autres modes de transport :
- le déplacement en avion sur les lignes domestiques (à l’intérieur du pays) est en croissance constante, y compris s’il existe l’alternative du train ;
- en 2015, le secteur du transport en autocars a été libéralisé par la loi Macron (Emmanuel Macron était alors ministre de l'Economie de François Hollande). En 2018, ce secteur a représenté 9 millions de voyageurs longue distance en cars. De plus, les acteurs du transport sur le territoire sont dans leur majorité des acteurs privés :
- les compagnies aériennes sont privatisées (même si l’État possède moins de 15 % du capital d’Air France) ;
- les compagnies gérant les transports publics des communes comme les tramways, les métros ou les lignes de bus sont des grandes FTN comme Keolis ou Transdev ;
- les compagnies d’autocars sont pour la plupart des filiales des mêmes grands groupes privés du transport public.
Paris fait figure d’exception. La RATP (Régie autonome des transports parisiens), établissement public, a le monopole sur le réseau de transport public parisien (bus, métro, tramway). L’État en est le seul actionnaire.
Malgré la mise en concurrence de plus en plus forte des différents acteurs privés, le rôle des acteurs publics reste prépondérant. L’État et les collectivités locales deviennent des aménageurs et non plus des exploitants directs.
Le rôle d’aménageur de l’État et des collectivités locales
Le rôle d’aménageur de l’État et des collectivités locales
L’État et les collectivités locales restent des acteurs majeurs dans les politiques d’aménagement, qui incluent la problématique du transport.
Aménager un territoire, c’est faire en sorte que chaque habitant du pays ait accès aux mêmes services et aux mêmes équipements, sans que cela ne coûte trop cher au contribuable.
Dans chaque commune, il existe en France un Plan de déplacements urbains (PDU). Ce document est élaboré par la ville dans le respect du Code des Transports. Il détermine l’organisation des transports sur le territoire, qu’il s’agisse du transport de voyageurs ou du transport de marchandises. Il règle aussi les problématiques de stationnement. Cela signifie qu’une compagnie privée de transport ne peut pas s’implanter librement sur le territoire.
Une ville comme Lyon propose à ses administrés des transports publics divers : lignes de bus, métro, trolleybus, tramway… Pour choisir l’entreprise qui exploite ces lignes, la commune doit lancer un appel d’offres. Actuellement, la société Keolis est l’exploitant de la quasi-totalité des lignes jusqu’en 2022, date à laquelle un nouvel appel d’offres (recherche au meilleur prix et du meilleur service d’une entreprise privée prestataire) sera lancé.
L’intégration de la France à la mondialisation implique de nouveaux enjeux. En effet, les politiques de transport doivent dorénavant inclure le développement durable. De même, le transport devient plus que jamais une « vitrine » pour la représentation de la France à l’étranger.
De nouveaux enjeux
De nouveaux enjeux
Le transport, enjeu de développement durable
Le transport, enjeu de développement durable
Depuis les années 1980, la prise de conscience généralisée autour du changement global entraine une modification des comportements vis-à-vis de la pollution environnementale. Or, quel que soit le mode de transport choisi, se déplacer autrement qu’en mobilité douce génère une pollution.
Mobilité douce ou écomobilité :
La mobilité douce désigne les modes de transport sans moteur et n’émettant pas de gaz à effet de serre. Elle comporte donc la marche à pied, le vélo ou encore la trottinette. Elle est de plus en plus développée dans les grandes villes.
Le secteur des transports représente 1/3 de la consommation d'énergie finale en France en 2015 et est le principal émetteur de CO2 (39 % des émissions totales).
Dans cet ensemble, 80 % des émissions sont dues au transport routier (voitures, camions, cars). L’avion est également consommateur avec 15 % des émissions de CO2 du secteur du transport.
Dès lors, les différents acteurs doivent prendre en compte le développement durable dans les politiques liées à la mobilité.
En 1987, le Rapport Brundtland est publié par l’ONU. Il préconise le développement durable pour répondre aux enjeux économiques, sociaux et environnementaux du XXIe siècle. Il consiste à « répondre aux besoins des générations présentes sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs ».
Cette prise en compte peut se faire par de multiples leviers :
- par la loi : la prise en compte des enjeux environnementaux est désormais obligatoire dans le développement des politiques de transports. Par exemple, un bilan écologique est introduit dans le Plan de Développement Urbain ;
- par une surveillance accrue des émissions de CO2 des véhicules : obligation pour les transporteurs d’afficher les émissions de CO2 liées à leurs prestations, vignette Crit’Air à Paris et dans les départements limitrophes, contrôle technique renforcé, etc. ;
- par la volonté des acteurs publics ou privés, à travers la RSE (Responsabilité Sociétale des Entreprises) qui les incite à présenter un bilan favorable en termes de développement durable.
L’entreprise de transport de voyageurs Transdev publie régulièrement une documentation vantant leurs progrès en matière de respect de l’environnement : lignes de bus électriques, développement de modèles de bus hybrides, mises en place de lignes permettant des mobilités alternatives (piétons, vélo), etc.
Malgré ces précautions, le transport reste un pollueur majeur. Lors des pics de pollution autour des grandes villes, la mesure privilégiée reste la réduction du nombre de véhicules : circulation alternée, fermeture de voies d’accès, etc.
L’enjeu écologique est majeur au XXIe siècle dans le développement de l’offre de transport. Fréquemment, il se heurte aux exigences de rentabilité des compagnies. Rappelons que le développement durable repose sur trois piliers : l’environnement et le social y ont leur part mais le volet économique n’est pas à négliger.
Le transport, enjeu de rayonnement pour la France à l’étranger
Le transport, enjeu de rayonnement pour la France à l’étranger
La France est depuis la seconde moitié du XXe siècle un acteur majeur du transport dans le monde. Au XXIe siècle, l’insertion de la France dans la mondialisation impose qu’elle soit compétitrice dans des secteurs stratégiques.
Son rayonnement est d’abord lié au développement des LGV (Lignes à Grande Vitesse).
Le premier pays à avoir mis en place les LGV est le Japon avec le Shinkansen en 1964. Cependant, la France est le second pays à avoir développé un train à grande vitesse, le TGV, en 1981. Ces trains sont conçus et produits par l’entreprise Alstom. À ce jour, le TGV français est détenteur du record de vitesse sur rail avec un train ayant atteint 574,8 km/h en 2007. Si la majorité des TGV circulent en France et sont exploités par la SNCF, d’autres lignes existent :
- entre la France et d’autres pays européens (Thalys vers l’Allemagne, la Belgique et les Pays-Bas ; Eurostar vers le Royaume-Uni ; Lyria vers la Suisse) ;
- en Espagne (AVE) ;
- en Corée du Sud.
Un train à grande vitesse de conception Alstom, sur le réseau coréen KTX (Korea Train Express) ©Minseong Kim – CC BY-SA 4.0
Concernant les mobilités pendulaires uniquement, de nouveaux modes de déplacement très récents sont regardés depuis l’étranger et apportent un rayonnement certain au secteur du transport français : les véhicules autonomes.
Véhicule autonome :
Un véhicule autonome est un véhicule qui se déplace sans conducteur. Muni de capteurs, il détecte les obstacles et est capable de circuler sur la voie publique sans causer de dommages.
La première expérimentation mondiale de ce mode de transport en milieu ouvert a eu lieu à Lyon en 2016. Les véhicules, baptisés Navly, sont mis en service par la société française Keolis et desservent une zone piétonne, dans l’écoquartier Confluence.
Une navette autonome Navly, à Lyon (2017) ©Guilhem Vellut - CC BY 2.0
L’entreprise concurrente Transdev expérimente également des véhicules autonomes comme les EasyMile ou la Zoé du groupe Renault. Conjointement avec la Métropole Rouen-Normandie et l’État, le groupe a lancé la première expérimentation mondiale de véhicules autonomes en milieu ouvert à la circulation routière à Rouen, en 2017.
Le modèle EasyMile EZ 10, conçu à Toulouse, s’exporte à l’étranger comme en Allemagne ou ici à Tallin (Estonie) ©Pjotr Mahhonin – CC BY-SA 4.0
Dans des secteurs stratégiques mais très coûteux comme l’aéronautique, un pays seul ne peut être concurrentiel. Ainsi, Airbus est un constructeur aéronautique européen multisite dont le siège est à Toulouse. Les sites d’assemblage sont disséminés sur plusieurs sites européens (Allemagne, Royaume-Uni, Belgique, France et Espagne). Cela permet au groupe d’être de taille à concurrencer le géant américain Boeing.
Conclusion :
La question des transports regroupe en France différents modes de déplacement, individuels ou collectifs, qui déterminent l’accessibilité des territoires. L’espace français est marqué par la macrocéphalie parisienne : la capitale attire les flux, qu’ils soient des flux de personnes, des flux de marchandises ou même des flux numériques. L’accessibilité à une mobilité efficace est pourtant un avantage majeur dans la vie quotidienne des personnes : accès à l’emploi facilitée, proximité des centres de soins, etc.
Le secteur du transport en France est aujourd’hui dominé par des acteurs privés. Cependant, le rôle d’aménageur de l’État et des collectivités locales reste prépondérant. Enfin, on a vu que le transport d’aujourd'hui doit répondre à de nouveaux enjeux : le développement durable d’une part et l’insertion à la mondialisation d’autre part.