Le modèle nazi : en Allemagne, Hitler et la montée du nazisme
Introduction :
Suite à la Première Guerre mondiale et au traité de Versailles, l’Allemagne connait une crise morale, économique et politique. La jeune République de Weimar (1918-1933) a des difficultés à susciter l’adhésion de toute la société et est très fortement contestée par les partis extrémistes, communistes et nationalistes. Suite à la crise de 1929, la Grande Dépression s’installe en Allemagne. Le pays, pris dans un cercle vicieux de chômage et d’inflation, s’enfonce dans la crise. Adolf Hitler, un politicien d’extrême droite à la tête du parti nazi NSDAP, parvient à séduire les électeurs et à être désigné chancelier en janvier 1933. Dans les mois qui suivent, Hitler abolit la république et installe un régime dictatorial et totalitaire : le IIIe Reich (1933-1945).
Nous verrons comment les nazis parviennent à se hisser à la tête de l’Allemagne et comment Hitler met en place un régime dictatorial. Nous nous intéresserons à l’Allemagne nazie en proie à l’embrigadement idéologique et au racisme systématique. Enfin, nous verrons comment Hitler façonne une société tournée vers la guerre et l’agressivité diplomatique.
L’accession au pouvoir des nazis
L’accession au pouvoir des nazis
Profitant de la crise économique et politique qui secoue l’Allemagne au début des années 1930, Adolf Hitler et son parti, le NSDAP (Nationalsozialistische Deutsche Arbeiterpartei), parti national-socialiste des travailleurs allemands), séduisent les électeurs allemands qui cherchent une solution pour sortir de la crise avec une rhétorique populiste et revancharde. Une fois au pouvoir, Hitler transforme le régime en une dictature en quelques mois.
Hitler au pouvoir
Hitler au pouvoir
Après avoir été incarcéré à la suite d’un coup d’État raté en 1923, Adolf Hitler structure son mouvement politique autour d’un ouvrage qu’il rédige en prison : Mein Kampf. Ce livre décrit l’idéologie nationale-socialiste allemande, inspirée du fascisme italien et teinté d’une vision raciste de la société. Si le mouvement nazi reste marginal dans les années 1920, la crise économique des années 1930 augmente sa popularité. Le discours victimaire et populiste de Hitler flatte le peuple. Hitler lui propose des ennemis : les Juifs, les communistes et les vainqueurs de la Grande Guerre. Il propose aussi des solutions simples pour remédier à la crise, passant par une politique ultra-autoritaire.
Hitler s’entoure de deux groupes paramilitaires liés au parti, les SA (Sturmabteilung, section d’assaut) et les SS (Schutzstaffel, escadron de protection), qui diffusent les idées nazies et qui utilisent la violence contre les adversaires politiques d’Hitler. Au printemps 1932, la SA et la SS sont temporairement interdis par le gouvernement Brüning.
En juillet 1932, le parti nazi remporte les élections législatives avec 37 % des voix. Mais en novembre 1932, lors des élections législatives suivantes, le NSDAP descend à 33 %. Hitler s’associe alors à de grands noms de l’industrie, qui font pression sur le président Hindenburg. Ce dernier nomme alors Hitler chancelier, le 30 janvier 1933. Une fois au pouvoir, Hitler manœuvre habilement pour supprimer rapidement la démocratie, avec l’appui populaire.
L’incendie du Reichstag, le parlement allemand, le 28 février 1933 donne l’occasion à Hitler de suspendre les libertés individuelles (en adoptant le décret « Pour la protection du peuple allemand ») et d’éliminer ses rivaux communistes : 4 000 militants d’extrême gauche sont arrêtés et le KPD (le parti communiste) est interdit. Aux élections de mars 1933, qui se déroulent dans un climat de terreur en raison de la violence exercée par la SS et la SA, le NSDAP obtient 44 % des voix et 288 députés. Le 23 mars 1933, estimant que le pays est en danger, Hitler se fait voter les pleins pouvoirs par les députés, ce qui lui donne la capacité de faire arrêter tous ses opposants et d’imposer sa politique sans contestation.
L’incendie du Reichstag dans la nuit du 28 au 29 février 1933
La mise en place d’un régime dictatorial
La mise en place d’un régime dictatorial
Après avoir proclamé la naissance du IIIe Reich le 23 mars 1933, Hitler ne trouve plus aucune résistance à son pouvoir. Il se débarrasse de tous les freins à son pouvoir et applique son programme antidémocratique : les syndicats et partis politiques sont dissous et les opposants arrêtés sont envoyés dans des camps de concentration (le camp de Dachau ouvre dès 1933 pour accueillir les opposants politiques).
IIIe Reich :
Nom donné à l’Empire nazi constitué par Hitler. Il considère en effet son empire comme succédant au Saint Empire Romain germanique (premier Reich, 962-1806) et à l’Empire allemand (1871-1918).
Le 14 juillet 1933, le parti nazi devient le parti unique, seul détenteur du pouvoir politique. Hitler exerce le pouvoir par la force par le biais des SA et des SS. Craignant que les SA n’affaiblissent son pouvoir, il décide de les éliminer malgré leur indéniable fidélité. Durant la nuit des longs couteaux, le 30 juin 1934, les chefs de la SA et divers adversaires de Hitler sont éliminés. Cela permet à Hitler de régner par la terreur, même parmi ses plus proches fidèles.
La mort du président Hindenburg permet à Hitler de fusionner les fonctions de chancelier et de président. Il devient ainsi le Führer de l’Allemagne. Pour légitimer sa politique autoritaire, il organise un plébiscite le 19 aout 1934 et y obtient 90 % de voix favorables, mettant ainsi fin à la république de Weimar.
Une société autoritaire
Une société autoritaire
Hitler établit un État totalitaire et raciste en Allemagne à partir de 1933. Ceci se traduit par des politiques de persécution des minorités raciales, et plus particulièrement des Juifs. Le parti nazi verrouille progressivement la société allemande à l’aide de l’idéologie nazie.
L’antisémitisme d’État
L’antisémitisme d’État
L’idéologie nazie est profondément antisémite et raciste. Hitler considère que les Allemands appartiennent à une race supérieure, la race aryenne, qui doit naturellement dominer le monde. Les Juifs sont particulièrement stigmatisés par les nazis, contre qui est élaborée la politique raciale de Hitler. L’antisémitisme n’est pas une spécificité allemande, il est répandu dans toute l’Europe de l’époque. Hitler le rend systématique et utilise ses pouvoirs pour mettre en place la persécution des Juifs. Par les lois de Nuremberg de 1935, ceux-ci sont déchus de leurs droits civiques, interdits d’exercer des fonctions publiques et sont progressivement exclus de tous les métiers. Les habitations et commerces juifs sont signalés par des indications, et les Juifs sont contraints de porter une étoile jaune en public.
Un autodafé à Berlin, le 11 mai 1933 © Bundesarchiv, Bild 102-14597 / Georg Pahl / CC-BY-SA 3.0
Hitler persécute systématiquement les communautés juives d’Allemagne, qui représentent alors plusieurs millions de citoyens. Les étudiants des universités allemandes mettent en place dès 1933 des autodafés, des rassemblements où ils brûlent des ouvrages écrits par les Juifs. Les politiques antisémites des nazis culminent avec la Nuit de cristal (du 9 au 10 novembre 1938) lorsque les SS mènent un pogrom organisé dans toute l’Allemagne à destination des communautés juives. Le bilan est lourd : 1 000 synagogues et 7 500 entreprises juives ont été pillées, 91 personnes assassinées, 30 000 Juifs arrêtés et déportés, notamment au camp de Dachau.
L’Allemagne embrigadée
L’Allemagne embrigadée
Une fois au pouvoir, Hitler mène une politique d’industrialisation massive afin de relancer l’économie, en panne depuis la crise de 1929. Les secteurs privilégiés sont les industries lourdes et en particulier celles de l’armement. La relance de l’économie permet à Hitler de bénéficier d’un soutien populaire, qu’il prend soin de cultiver grâce à une propagande continue, qui vante ses bienfaits et ceux du régime nazi. Hitler est le Führer, le guide, et développe un culte de la personnalité particulièrement élaboré.
La propagande est omniprésente dans l’Allemagne hitlérienne. Elle est l’œuvre de Joseph Goebbels, le ministre de la Propagande, qui filtre systématiquement les informations par le biais d’une censure omniprésente. Le parti nazi structure la société allemande avec des organisations de jeunesse (Deutsches Jungvolk, la Jeunesse allemande, de 6 à 14 ans, puis Hitlerjugend, la Jeunesse hitlérienne, de 14 à 18 ans) qui permettent d’inculquer l’idéologie nazie aux petits Allemands. L’adhésion à ces organisations devient obligatoire à partir de 1936.
L’embrigadement de la jeunesse et le contrôle permanent de la société, exercé à travers la police politique, la Gestapo, permet au parti nazi de maitriser chaque recoin de l’Allemagne.
Une société tournée vers la guerre
Une société tournée vers la guerre
Hitler reconstruit la société allemande en se basant sur une économie organisée par l’État et privilégiant l’industrie de guerre. Celle-ci lui sert à réaliser ses objectifs agressifs sur la scène politique internationale.
Le réarmement de l’Allemagne
Le réarmement de l’Allemagne
La relance de l’économie allemande passe avant tout par la reconstitution d’une industrie de guerre, pourtant interdite depuis le traité de Versailles de 1919. Hitler désigne en effet ce dernier comme source de tous les malheurs des Allemands et pousse à une politique de réarmement systématique de l’Allemagne. Pour financer cette relance de l’économie, il vend de l’équipement militaire à l’étranger et pousse ses partenaires commerciaux à faire la guerre, comme lors de la guerre du Chaco, en 1935, où les Allemands fournissent les deux belligérants en armement (guerre qui opposa la Bolivie et le Paraguay, voir cours « Les politiques des États face à la crise mondiale »).
En 1935, le pays est réarmé, et Hitler défie ouvertement les restrictions imposées par la Société des Nations. Il impose la conscription, ce qui a pour effet de multiplier par 5 les effectifs de l’armée, jusqu’alors limitée à 100 000 hommes. Hitler se lance également dans la production d’une marine de guerre et d’une aviation de guerre, pourtant interdites par le traité de Versailles. Devant la passivité de ses rivaux, Hitler est conforté dans la poursuite de sa politique de réarmement.
Les SS sont les unités spéciales des nazis
En octobre 1933, Hitler décide de quitter la SDN et la conférence du Désarmement. En 1936, Hitler occupe à nouveau la Rhénanie, région qui était démilitarisée depuis 1919. Malgré les protestations de la France, le Royaume-Uni ne s’oppose pas à la politique de réarmement allemand. En 1936, Hitler soutient massivement le général Franco qui a déclenché une guerre civile en Espagne pour s’emparer du pouvoir. L’Espagne sert de terrain d’expérimentation du matériel militaire allemand et aussi de client pour l’industrie de l’armement.
Une politique extérieure menaçante
Une politique extérieure menaçante
Adolf Hitler est obsédé depuis la fin de la Première Guerre mondiale par deux objectifs de politique internationale : étendre l’Allemagne sur une large partie de l’Europe et se venger du traité de Versailles. Le premier objectif se traduit par l’idée de l’Espace vital (Lebensraum) : Hitler estime que l’Allemagne doit englober toutes les populations allemandes d’Europe et que celles-ci ont un droit privilégié d’occuper des terres à l’est de l’Europe. Ses désirs d’expansion de l’Allemagne se réalisent avec l’Anschluss le 12 mars 1938, lorsque l’Allemagne nazie envahit l’Autriche pour l’annexer. Cette politique d’annexion des territoires germanophones se poursuit avec sa volonté d’annexer les Sudètes, une région de Tchécoslovaquie peuplée d’Allemands.
Après un ultimatum des démocraties et des tractations diplomatiques, les accords de Munich, au cours desquels les ministres français et britanniques Daladier et Chamberlain obtiennent de Hitler une promesse de cesser sa politique d’expansion après les Sudètes, Hitler est autorisé à envahir cette région germanophone de Tchécoslovaquie en octobre 1938.
Aux accords de Munich, le premier ministre britannique Chamberlain (gauche), le premier ministre français Daladier (deuxième à gauche) rencontrent Hitler (deuxième à droite) et le dictateur italien Mussolini (à droite)
Toutefois, quelques mois plus tard, l’armée allemande envahit le reste de la Tchécoslovaquie et entre dans Prague, violant la promesse faite à Munich. La politique d’expansion de Hitler se tourne alors vers la Pologne, État recréé en 1919 sur les ruines de l’Empire allemand (la Pologne existait au XVIIIe siècle mais a été démembrée suite à trois partages successifs entre l’Autriche, la Prusse et la Russie), et dont certains territoires sont occupés d’Allemands, notamment le couloir de Dantzig. Ce territoire, sur le bord de la mer Baltique, a été cédé à la Pologne en 1919 pour lui donner un accès à la mer, mais il coupe de facto le territoire allemand en deux, mécontentant les nationalistes allemands qui y voient une mutilation de leur territoire.
Conclusion :
Profitant de la crise économique de 1929, Adolf Hitler se hisse à la tête de l’Allemagne, imposant une dictature totale sur la société. Sa politique, basée sur l’antisémitisme et le militarisme, domine tous les aspects de la société allemande. La persécution des minorités politiques et ethniques se généralise suivant une logique d’épuration. Adolf Hitler parvient à reconstruire l’armée allemande et mène à la fin des années 1930 une politique agressive et belliciste.