Les évolutions d’un monde rural toujours majoritaire
Introduction :
Au XIXe siècle, le Second Empire voit l’industrialisation provoquer une mutation importante de la société française. Pourtant, à cette époque, le monde rural concentre l’essentiel de la population du pays.
Nous allons donc voir dans ce cours quelles sont les principales caractéristiques du monde rural sous le Second Empire.
Pour cela, la première partie de ce cours permettra d’étudier la diversité du monde rural, tandis que la deuxième partie sera axée sur les évolutions des campagnes à la même époque.
La diversité du monde rural sous le Second Empire
La diversité du monde rural sous le Second Empire
Le monde rural constitue l’essentiel de la population (19 millions en 1866). Il est marqué par une grande diversité sociale.
Jules Breton, Le Rappel des glaneuses,1859, huile sur toile, 90,5 x 176 cm, Musée d’Orsay, Paris ©Jaime Villate
Si 1 % des propriétaires détiennent 1/3 de la terre, la majorité des paysans sont de petits propriétaires pratiquant la polyculture. Ils constituent un socle électoral solide, réticent à la république sociale en 1848, et soutien du Second Empire à partir de 1852. Parmi ces petits paysans, nombreux sont ceux qui exploitent la terre en faire-valoir direct, tandis que le métayage et le fermage sont en recul. La langue parlée est bien souvent locale.
Léon Augustin Lhermitte, La Paye des moissonneurs, 1882, huile sur toile, 215 x 272 cm, Musée d’Orsay, Paris ©The Athenaeum
Faire-valoir direct :
Mode d’exploitation de la terre dans lequel l’exploitant est propriétaire de la terre qu’il cultive.
Métayage :
Mode d’exploitation de la terre dans lequel l’exploitant n’est pas propriétaire de la terre et verse une part de sa production au propriétaire.
Fermage :
Mode d’exploitation de la terre dans lequel l’exploitant n’est pas propriétaire de la terre et paye un loyer en espèces au propriétaire.
Le monde rural est aussi marqué par la présence des notables : maire, curé, instituteur, grands propriétaires souvent légitimistes, qui traduisent des hiérarchies sociales encore fortes.
Notables :
Groupe social dominant au sein de la société du Second Empire. On trouve fréquemment dans ce groupe le maire, le médecin, le curé, les gens de justice, les grands patrons et les grands propriétaires.
Légitimiste :
Partisan du retour de la branche des Bourbons sur le trône en France.
Les évolutions des campagnes sous le Second Empire
Les évolutions des campagnes sous le Second Empire
La modernisation des campagnes
La modernisation des campagnes
Le Second Empire napoléonien met l’accent sur le développement des chemins de fer qui permettent l’ouverture des marchés et la circulation des idées.
Cérémonie de l'inauguration du chemin de fer de Chartres, 1849, lithographie
C’est le début de la spécialisation de certaines régions agricoles (comme le Languedoc pour la vigne). Le salaire agricole progresse rapidement à l’échelle du pays et incite les plus fortunés à investir dans les machines (faucheuses, batteuses à vapeur) et les engrais. La Société des agriculteurs de France est fondée en 1867. Elle regroupe surtout de grands propriétaires nobles. La modernisation agricole provoque aussi le départ d’ouvriers agricoles vers les villes, c’est le début de l’« exode » rural.
L’essor du machinisme par la révolution agricole : une batteuse en 1881
La persistance de conditions de vie difficiles
La persistance de conditions de vie difficiles
Malgré ces évolutions, les situations sociales restent très diverses et de nombreux paysans sont encore touchés par un état de misère extrême, en dépit des solidarités villageoises.
Le Second Empire lance également de grands travaux de modernisation des campagnes avec l’asséchement des marais dans les Landes et en Sologne. Ces grands travaux d’assainissement ont pour but d’améliorer les conditions de vie des paysans de ces régions.
La politisation des campagnes
La politisation des campagnes
Les progrès de la politisation des campagnes
Les progrès de la politisation des campagnes
La politisation des campagnes s’accélère et se réalise par le haut et par le bas. Par le haut, ce sont les débats politiques nationaux qui y sont suivis. La participation à la vie politique nationale se réalise soit par le suffrage universel (comme refus d’un impôt appelé impôt des 45 centimes en 1848), soit par la manifestation (comme le refus du coup d’État du 2 décembre 1851 dans le Var). La politisation par le bas emprunte des formes de contestations plus traditionnelles comme les chansons, les charivaris que l’on retrouve ainsi dans le Languedoc pour dénoncer l’action des fonctionnaires locaux.
Charivari :
Pratique ancienne visant à provoquer un vacarme important (huées, sifflets, bruits de casseroles) devant la maison de celui dont le groupe désapprouve les actions.
Une géographie électorale marquée et pérenne
Une géographie électorale marquée et pérenne
Les hiérarchies sociales sont cependant très présentes et influencent fortement la géographie du vote.
Hiérarchies sociales :
Structuration d’une société de façon pyramidale entre des groupes sociaux dominants et d’autres dominés.
On distingue ainsi les départements « blancs » (influencés par les monarchistes) des départements « rouges » (démocrates-socialistes influencés par les républicains) où les hiérarchies sociales semblent moins peser. Globalement, ce sont cependant les campagnes qui font reculer la République sociale en 1849.
Puis, sous le Second Empire jusqu’en 1860, ce sont les campagnes qui assurent un soutien solide au régime de Napoléon III. Après cette date, le traité de libre-échange avec l’Angleterre et la baisse relative du revenu agricole amènent cependant une perception plus critique du pouvoir.
Libre-échange :
Système économique dans lequel le commerce international n’est pas ou peu entravé par des barrières douanières.
Conclusion :
Pendant le Second Empire, le monde rural représente la majorité de la population française. La plupart des paysans pratiquent la polyculture sur de petites exploitations dont ils sont propriétaires. Réticents aux idées nouvelles et donc à la République sociale, ils soutiennent le Second Empire, mais sont influencés par les notables. Ce soutien restera sans faille, jusqu’au traité de libre-échange avec l’Angleterre qui entraîne la baisse des revenus agricoles en 1860.
Tout au long de cette période, les campagnes se modernisent. Le progrès déclenche l’exode rural. Malgré ces évolutions, les situations sociales restent inégales et de nombreux paysans doivent faire face à une misère extrême.
En parallèle, la politisation des campagnes s’accélère. Cependant, les hiérarchies sociales influencent fortement les votes.