Les recompositions des espaces ruraux français
Introduction :
Dans le monde entier, les espaces ruraux connaissent d’importants changements. Ils offrent de nouvelles fonctions, à la fois productives, résidentielles, touristiques et récréatives.
Dans ce cours, nous nous intéresserons spécifiquement aux mutations des espaces ruraux français. Pour cela, nous étudierons tout d’abord la recomposition de leurs fonctions productives. Ensuite, nous nous pencherons sur la pression urbaine croissante et les liens accrus avec les espaces urbains. Enfin, nous verrons que les dynamiques démographiques et résidentielles varient selon le type d’espace rural.
La recomposition des fonctions productives
La recomposition des fonctions productives
Les mutations des systèmes agricoles
Les mutations des systèmes agricoles
La France se situe au premier rang des puissances agricoles européennes et au cinquième rang mondial, avec 72 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2017.
Soutenue par les mesures de la politique agricole commune (PAC) de l’Union européenne, la puissance agricole française repose sur quatre secteurs : la production de céréales, les produits laitiers, le sucre et les vins et spiritueux.
Ces systèmes agricoles performants connaissent toutefois des difficultés liées à la concurrence mondiale, au vieillissement du monde paysan et à l’image parfois négative associée aux productions intensives. Face aux préoccupations sanitaires et environnementales, on remarque une réelle prise de conscience des consommateurs, notamment urbains, qui recourent de plus en plus aux circuits courts. Ces préoccupations ont aussi suscité le développement de l’agriculture biologique ou raisonnée.
Circuit court :
Mode de commercialisation des productions agricoles par la vente directe ou avec un intermédiaire maximum entre le producteur et le consommateur.
Certaines productions liées à l’innovation représentent un enjeu pour l’avenir, notamment avec les perspectives des biocarburants et le développement d’énergies renouvelables.
Des fonctions productives diversifiées
Des fonctions productives diversifiées
Le renouveau des campagnes françaises s’appuie également sur la diversification de leurs fonctions productives. Ainsi, des activités productives non agricoles se développent.
Le tourisme vert (basé sur la fréquentation des espaces ruraux) connaît un succès croissant. En 2017, il représentait le tiers des nuitées touristiques du pays.
- L’offre est variée, avec près de 18 000 hôtels, 8 000 campings et 32 000 chambres d’hôtes au cœur des espaces ruraux.
Le tourisme rural s’appuie, lui, sur des ressources territoriales diversifiées, comme les produits du terroir, les paysages ou un patrimoine rural spécifique.
Terroir :
Territoire aux caractéristiques spécifiques qui donne son identité à une production artisanale ou alimentaire.
Ces éléments sont promus, à toutes les échelles, par des acteurs publics et privés, dans une logique de valorisation des terroirs. Ils sont également mis en avant dans le cadre de l’agritourisme.
Agritourisme :
Tourisme agricole, basé sur l’accueil dans les exploitations agricoles (tourisme à la ferme).
On trouve également des implantations industrielles rurales, avec le développement de clusters spécifiquement ruraux autour de savoir-faire locaux hérités : c’est notamment le cas de la Mecanic Vallée entre Tulle, Figeac et Rodez, dédiée à la mécanique de précision.
Les zones industrielles, artisanales ou tertiaires rurales se multiplient également dans les campagnes en périphérie des villes. C’est une des conséquences de la périurbanisation.
Amazon dispose ainsi de cinq entrepôts logistiques ou de distribution pour un total de 500 000 m2 dans les zones rurales françaises, comme par exemple à Lauwin-Planque (Hauts-de-France), à Saran (Centre Val-de-Loire) ou à Sevrey (Bourgogne-Franche-Comté).
Une pression urbaine croissante et des liens accrus avec les espaces urbains
Une pression urbaine croissante et des liens accrus avec les espaces urbains
Les conséquences de l’étalement urbain et de la périurbanisation
Les conséquences de l’étalement urbain et de la périurbanisation
La France connaît un processus d’étalement urbain et de périurbanisation importants.
- Les terres agricoles représentent 51 % du territoire et les zones boisées 40 %.
- En 2017, les sols artificialisés occupaient 9,3 % du territoire et progressent chaque année de 0,8 % depuis 2010.
- On estime que chaque année 60 000 hectares (soit la superficie d’un département comme l’Oise) sont artificialisés pour être destinés à l’habitat, aux zones d’activités ou aux infrastructures de transports.
- La périurbanisation conduit aux mutations des paysages ruraux, qui voient les lotissements se multiplier.
L’intensification des liens entre espaces ruraux et espaces urbains
L’intensification des liens entre espaces ruraux et espaces urbains
La périurbanisation entraîne des mobilités entre espaces urbains et espaces ruraux. Ces mobilités ne cessent de croître.
Les urbains choisissent de résider dans les espaces ruraux pour bénéficier d’une qualité de vie supérieure marquée par un logement plus vaste et l’accès à un jardin et à la nature. Ils travaillent cependant dans la ou les villes proches, au sein des couronnes périurbaines.
Les liens sont donc forts entre espaces urbains et espaces ruraux, en raison de la fonction résidentielle croissante des espaces ruraux.
Les espaces ruraux sont également investis du rôle de « nourrir les urbains » ; des liens forts s’établissent donc entre producteurs locaux et espaces urbains.
On constate ainsi le développement de l’agriculture périurbaine dans le cadre des AMAP et de l’engouement pour le locavorisme dans le cadre des préoccupations environnementales et sanitaires.
AMAP (association pour le maintien d’une agriculture paysanne ou de proximité) :
Partenariat entre un groupe de consommateurs et un producteur en vue de la commercialisation régulière de sa production.
Locavorisme :
Mouvement qui soutient la consommation de nourriture produite dans un rayon maximum de 250 km autour du lieu de résidence.
Des dynamiques démographiques et résidentielles diverses
Des dynamiques démographiques et résidentielles diverses
La renaissance rurale
La renaissance rurale
Certaines campagnes françaises connaissent un processus de renaissance rurale.
En effet, depuis les recensements de 1975 et 1982, on remarque une reprise démographique rurale liée aux mobilités résidentielles vers les espaces ruraux proches des villes ou dans les régions littorales.
Certains espaces ruraux deviennent ainsi attractifs aux yeux notamment des néo-ruraux qui choisissent de quitter les villes et leurs désagréments pour investir et s’installer à la campagne.
Il s’agit généralement de populations aisées et jeunes qui revitalisent les espaces ruraux sélectionnés en raison de leur attractivité et de leur qualité de connexion aux réseaux de transport et de communication.
La population et le développement de ces espaces ruraux progressent grâce à :
- des activités productives variées (agriculture, artisanat, etc.) ;
- une multifonctionnalité de plus en plus importante ;
- l’économie présentielle (consommation des produits locaux, services à la personne, offre de loisirs et activités culturelles, etc.).
Économie présentielle :
Production de biens et de services basée sur les besoins des personnes présentes sur un territoire.
Vieillissement et déprise de certains espaces ruraux
Vieillissement et déprise de certains espaces ruraux
Cependant, certains espaces ruraux connaissent une déprise importante. Ces espaces sont, en général, mal ou peu connectés et constituent le rural profond.
Situés en marge des infrastructures, ils connaissent un vieillissement et une diminution de leur population et sont confrontés aux fermetures des services publics dans le cadre de leur réorganisation et redistribution, impulsées par l’État.
En Bourgogne-Franche-Comté, l’hyper-ruralité concerne 425 000 personnes, soit 15 % de la population régionale, dont près du tiers (30 %) a plus de 65 ans et réside dans 1 489 communes. Ces difficultés concernent notamment les espaces de montagne (le Massif central, les Vosges, les Alpes du Sud) et certaines zones enclavées (Morvan, la Bretagne intérieure).
Hyper-ruralité :
Caractéristiques des espaces de très faible densité marqués par l’enclavement, le vieillissement de la population, le manque d’accessibilité et de services.
Toutefois, certains espaces en déprise peuvent connaître un développement touristique en raison d’intérêts paysagers ou patrimoniaux.
Conclusion :
Ainsi, les systèmes agricoles français tentent d’innover pour faire face aux enjeux auxquels ils sont confrontés, et les campagnes françaises diversifient leurs fonctions récréatives en développant plusieurs types de tourisme. Une pression urbaine pèse sur les espaces ruraux, qui voient leurs sols artificialisés pour accueillir diverses habitations et infrastructures. Pour autant, les liens entre espaces urbains et espaces ruraux n’ont jamais été aussi forts : une partie de la population urbaine se tourne vers les campagnes pour leur cadre de vie de qualité. Cela renforce les mobilités, mais aussi l’engouement pour la consommation de nourriture produite localement. Toutefois, les espaces ruraux connaissent différentes dynamiques. Certains se renouvellent avec l’arrivée d’une population plus jeune quand d’autres souffrent de la déprise.