S’engager en faveur d’une démocratie environnementale
Introduction :
La démocratie environnementale désigne le fonctionnement d’une société dans laquelle les citoyens, les associations et les pouvoirs publics échangent entre eux pour construire une politique environnementale qui permette d’accélérer la transition écologique du pays. Ces différents acteurs influencent le débat public, alertent les consciences et agissent, ensemble, pour préserver les milieux naturels, protéger la biodiversité et encourager les pratiques éco-responsables.
Après avoir étudié dans une première partie l’action des citoyens au service de la transition écologique, la deuxième partie sera consacrée au rôle clé exercé par les associations. Enfin, la troisième partie traitera plus particulièrement de l’action de la jeunesse en matière environnementale.
Pouvoirs publics :
Ensemble des autorités et institutions (gouvernement, collectivités territoriales) chargées de concevoir les lois et d’appliquer une politique qui organise le fonctionnement de la société.
Les citoyens au cœur de la démocratie environnementale
Les citoyens au cœur de la démocratie environnementale
L’engagement des citoyens en faveur d’un plus grand respect de l’environnement peut s’exprimer de différentes de manières, notamment en votant lors des élections.
Le mouvement écologiste est apparu en France au début des années 1970, au lendemain des événements de mai 68. Ses principales idées s’organisent alors autour d’une critique de la société de consommation et d’un rejet des pratiques agricoles basées sur l’utilisation massive d’engrais et de pesticides. Antoine Waechter, fondateur du parti Les Verts en 1984, dénonce également les risques liés au développement de l’énergie nucléaire et milite en faveur d’un plus grand respect de la biodiversité.
Mouvement écologiste :
Ensemble d’associations et d’organisations politiques qui défendent des idées en faveur d’un plus grand respect de l’environnement.
Les événements de mai 68 désignent une série de grèves et de manifestations qui ont eu lieu en France en mai et juin 1968. Ce mouvement social est d’abord mené par la jeunesse avant d’être rejoint par des millions d’ouvriers. Les étudiants dénoncent le fonctionnement d’une société qu’ils considèrent trop traditionnelle, tandis que les ouvriers réclament avant tout une amélioration des conditions de travail ainsi qu’une hausse des salaires.
Le mouvement écologiste a d’abord suscité peu d’intérêt de la part des électeurs dans les années 1970 et 1980. C’est à partir de la fin des années 1990 que leurs idées commencent à peser davantage dans la vie politique française, témoignant ainsi d’une sensibilité plus forte de la population envers les enjeux environnementaux.
Lors des élections législatives organisées en juillet 2024, Les Écologistes, nom du principal parti écologiste né de la fusion entre les deux anciens partis Europe Écologie et Les Verts, a rejoint une coalition politique avec d’autres partis de gauche afin de former le Nouveau Front populaire. À l’issue des élections, Les Écologistes disposent d’un groupe de 38 députés siégeant à l’Assemblée nationale.
La mobilisation des citoyens peut également prendre d’autres formes, notamment lors d’événements tels que les « marches du climat » organisées chaque année depuis 2018 dans les grandes métropoles mondiales. L’objectif est de sensibiliser le plus largement possible la population sur l’urgence climatique et d’inciter les pouvoirs politiques à agir plus rapidement et plus efficacement.
Lors de sa première édition, la « marche du climat » organisée sous l’impulsion de la militante suédoise Greta Thunberg fut un grand succès. Environ 50 000 personnes manifestèrent dans les rues de Paris.
Rassemblement devant l’hôtel de ville de Paris lors de la première marche du climat organisée en 2018
L’engagement citoyen en faveur d’un meilleur respect de l’environnement peut également passer par une mobilisation citoyenne plus locale. En effet, selon le code de l’urbanisme, un projet d’aménagement, qu’il s’agisse de la création d’un aéroport, d’une usine ou d’immeubles de logements, doit faire l’objet d’une consultation de la population qui peut ainsi s’informer et s’interroger sur l’impact de cet aménagement sur l’environnement. Des recours juridiques peuvent ensuite être déposés pour modifier ou même stopper un projet d’aménagement.
Code de l’urbanisme :
Ensemble des textes de loi et des réglementations en lien avec l’aménagement urbain.
Recours juridique :
Action menée par une ou plusieurs personnes visant à faire valoir leurs droits ou à obtenir réparation.
Ainsi, en 2020, les habitants de la vallée de Clairvaux, regroupés dans une association locale appelée « Préservons la vallée de Clairvaux », se sont opposés à un projet d’implantation d’usine de fabrication de bitume à Ville-sous-la Ferté, commune située dans le département de l’Aube. Dénonçant des nuisances probables sur la santé ainsi que d’inévitables pollutions, un recours juridique a été déposé par cette association. Le tribunal administratif lui a finalement donné raison en mars 2020 en annulant définitivement la mise en œuvre du projet.
La mobilisation citoyenne contre des projets d’aménagement peut prendre une ampleur plus importante, notamment lorsque des ZAD sont installées sur le lieu d’un futur aménagement.
Zone à défendre (ZAD) :
Territoire occupé illégalement pour empêcher la mise en œuvre d’un projet d’aménagement considéré comme nuisible pour l’environnement. Les occupants de la ZAD sont appelés des « zadistes ».
Ainsi, le projet de création d’un nouvel aéroport à Notre-Dame-des Landes, dans l’agglomération de Nantes a suscité une très vive opposition d’une partie de la population soutenue par plusieurs associations de défense de l’environnement. L’installation de l’aéroport aurait entraîné la disparition de nombreuses exploitations et aurait eu un impact très négatif sur un territoire considéré comme fragile. L’espace prévu pour l’implantation du nouvel aéroport a été occupé pendant plusieurs années par des habitants, des agriculteurs et des militants d’association, appelés « zadistes », bloquant ainsi la mise en œuvre du projet.
Afin de débloquer cette situation, François Hollande, alors président de la République, décide en 2016 l’organisation d’une consultation locale de la population. À la question posée « Êtes-vous favorable au projet de transfert de l’aéroport de Nantes-Atlantique sur la commune de Notre-Dame-des-Landes ? », 51 % des votants ont répondu par l’affirmative. Le projet d’aménagement est donc validé sans toutefois entraîner l’évacuation de la ZAD, où les tensions étaient régulières avec la gendarmerie.
Afin de sortir de cette crise, Édouard Philippe, alors premier ministre, décide l’abandon de ce projet en janvier 2018. Quelques mois plus tard, en avril 2018, la décision fut prise d’évacuer la ZAD, suscitant de violents affrontements entre les « zadistes » et la gendarmerie.
Les citoyens jouent un rôle déterminant dans la protection de l’environnement. Grâce à des initiatives locales et à des actions militantes, les citoyens font entendre leur voix et font pression sur le pouvoir politique.
Les associations, des acteurs influents de la démocratie environnementale
Les associations, des acteurs influents de la démocratie environnementale
Les associations jouent un rôle primordial dans la défense de l’environnement.
- Elles agissent pour sensibiliser la population, dénoncer des activités illégales ou faire pression sur le pouvoir politique afin de faire évoluer le cadre juridique.
France Nature Environnement (FNE) est une des plus importantes ONG française spécialisée dans les questions environnementales. Elle mobilise plusieurs centaines de milliers de citoyens à son service, dont une très grande partie de bénévoles. Cette organisation mène des actions de sensibilisation auprès de la population. Elle milite en faveur d’une meilleure protection des milieux naturels ainsi que pour une gestion durable des ressources de la planète. Ses équipes rencontrent également les élus (maires, députés, sénateurs etc.) et participent au débat public, dans les médias notamment. Comme toutes les ONG, France Nature Environnement fonctionne grâce aux dons des citoyens et des entreprises.
Organisation non gouvernementale (ONG) :
Association indépendante de l’État, à but non lucratif, qui œuvre dans des domaines comme l’humanitaire, l’environnement ou les droits humains.
À l’échelle départementale, en Haute-Loire par exemple, FNE participe au programme « Manger local et bio » qui vise à accompagner les établissements qui mettent en place une démarche d’alimentation durable dans leur cantine. FNE soutient également le programme « La nuit, je vis » qui vise à sensibiliser la population aux effets néfastes des éclairages urbains nocturnes sur la reproduction, et donc la survie, de certaines espaces animales telles que les vers luisants.
L’ONG Sea Shepherd est une ONG particulièrement engagée dans la protection de la faune marine et la lutte contre la surpêche. Ses actions sont souvent spectaculaires et très médiatisées. L’association est notamment connue pour ses interventions menées contre des bateaux japonais pratiquant illégalement la pêche à la baleine. En France, Sea Shepherd dénonce les ravages de la pêche illégale, en particulier dans les eaux protégées de la mer Méditerranée ainsi qu’au large de la Bretagne. Sea Shepherb est également très investie dans la défense et la protection des dauphins en incitant les citoyens à lui signaler, via une adresse mail, tout échouage de ce mammifère sur les côtes françaises, notamment dans le golfe de Gascogne.
Aux côtés des ONG, certaines associations sont plutôt considérées comme des lobbys. Elles cherchent avant tout à faire pression sur les décideurs politiques et les chefs d’entreprises afin d’accélérer la transition écologique.
Ainsi, Réseau Action Climat rédige des rapports et rencontre les élus afin de faire évoluer le droit environnemental.
Lobby :
Groupe de pression qui cherche à influencer les décisions politiques ou législatives en fonction de ses intérêts.
En 2019, trois ONG spécialisée dans les questions environnementales, Greenpeace, Oxfam et Notre affaire à tous, lancent une pétition en ligne qui recueille 2,3 millions de signatures. Elles dénoncent l’inaction de l’État français face au dérèglement climatique. À leurs yeux, la politique environnementale du pays est un échec car les engagements sur les objectifs de réduction d’émissions de gaz à effet de serre sur la période allant de 2015 à 2018 n’ont pas été respectés. Une plainte est alors déposée contre l’État. Cette « affaire du siècle, telle qu’elle est nommée par un des magistrats en charge du dossier, va aboutir à un premier jugement rendu en février 2021 qui condamne l’État français pour son inaction.
Les associations jouent un rôle clé pour défendre l’environnement et dénoncer certaines pratiques illégales ou dangereuses pour la préservation de la biodiversité (rôle de « vigie »).
Grâce à des actions de terrain, à des campagnes de sensibilisation, elles informent la population et incitent les décideurs politiques à accélérer la transition écologique.
Encourager l’engagement de la jeunesse pour construire une véritable démocratie environnementale
Encourager l’engagement de la jeunesse pour construire une véritable démocratie environnementale
La popularité auprès de la jeunesse de l’activiste Greta Grunberg, lycéenne suédoise, à l’origine de la première marche du climat en 2018, est un signe de leur intérêt pour les questions environnementales.
- Les jeunes générations interrogent désormais leurs aînés sur leurs choix passés (société de consommation, agriculture intensive, « capitalisme sauvage »…) et sur leur responsabilité dans le dérèglement climatique.
Une grande partie de la jeunesse cherche à développer des pratiques de consommation différentes qui soient plus responsables et plus durables, notamment en privilégiant les achats en circuits courts ou en limitant leurs transports en avion.
Cet intérêt des jeunes se transforme parfois même en éco-anxiété face aux nombreuses urgences environnementales dont nos sociétés doivent se saisir.
Éco-anxiété :
Sentiment d’angoisse causé par la prise de conscience des conséquences des dégradations de l’environnement (pollutions, perte de biodiversité…) et du changement climatique sur l’avenir de la population.
Un sondage réalisé en décembre 2023, indique que 71 % des jeunes entre 18 et 30 ans se considèrent engagés dans la lutte pour l’environnement. En revanche, 63 % des jeunes souhaiteraient davantage s’investir dans ce domaine mais ne savent pas comment faire pour y parvenir.
Une des réponses de l’État à ce besoin d’engagement de la jeunesse, fut de créer en 2019 le Service national universel (SNU) qui s’adresse à des jeunes volontaires entre 15 et 17 ans. Le SNU s’organise en deux temps :
- un séjour de cohésion de 12 jours dans un groupe composé d’une centaine de jeunes qui se déroule dans un autre département ;
- une mission d’intérêt général pour un service d’au moins 84 heures réparties sur plusieurs semaines. Différentes thématiques d’engagement sont proposées aux volontaires. Ils peuvent par exemple s’engager dans une association de protection de l’environnement en participant, notamment à des actions de prévention. Ceux qui le souhaitent peuvent ensuite prolonger leur engagement en exerçant une mission d’intérêt général plus longue, sur plusieurs mois.
Mission d’intérêt général :
Activité bénévole visant à répondre aux besoins de la société.
Au sein du lycée, les élèves peuvent également se mobiliser sur des actions en lien avec le développement durable.
Des éco-délégués sont désormais élus dans chaque classe. Leur principale mission est de sensibiliser leurs camarades aux enjeux liés à l’environnement et à la transition écologique.
Le conseil de la vie lycéenne (CVL) peut organiser des actions en lien avec la préservation de la planète. Dans de nombreux lycées, lors de la « semaine verte », des opérations de nettoyage des espaces verts du lycée sont par exemple organisées.
Conseil de la vie lycéenne (CVC) :
Instance au sein des lycées où les élèves participent directement aux actions qui les concernent. Cela permet aux élèves de s’exprimer sur des sujets tels que la vie scolaire, la santé, l’organisation des événements et l’environnement.
La « semaine verte » est organisée dans les établissements scolaires pour sensibiliser les élèves et leurs professeurs aux enjeux environnementaux.
Des ateliers de recyclage sont organisés ainsi que des conférences sur le changement climatique ou des opérations de nettoyage des espaces extérieurs. C’est aussi l’occasion d’encourager les élèves à adopter des pratiques écoresponsables dans une logique de développement durable.
Dans d’autres établissements, le CVL peut proposer différents projets, tels que l’installation d’un système de compostage des déchets alimentaires à la cantine, une plus grande végétalisation des cours de récréation ou l’installation de nouveaux abris pour les vélos pour encourager l’utilisation de ce mode de transports par les élèves.
La jeunesse joue un rôle fondamental pour accélérer la transition écologique. Son besoin d’engagement pour la sécurisation de son propre avenir et au service des autres peut, notamment, s’exercer au sein de la société, mais aussi à l’échelle du lycée, en proposant des actions concrètes qui encouragent les jeunes à avoir des comportements plus écoresponsables.
Conclusion :
S’engager en faveur d’une démocratie environnementale est essentiel pour relever les défis de demain et limiter les conséquences du dérèglement climatique sur notre vie quotidienne.
Impliquer le plus grand nombre de citoyens et d’associations sur tout le territoire dans l’élaboration d’une politique environnementale la rend, en retour, plus légitime et augmente considérablement ses chances de succès.