Un exemple de flux migratoire : le cas du Maghreb
Introduction :
Jamais l’humain n’a été aussi mobile qu’au XXIe siècle. Ces flux de mobilité humaine peuvent prendre plusieurs formes. De nature migratoire ou touristique, ils peuvent aussi être continentaux ou internationaux.
Quoiqu’il en soit, ils affectent toujours à la fois le pays de départ et le pays d’arrivée. Afin d’expliquer l’impact des mouvements de population sur une région, nous allons ensemble étudier l’exemple des flux migratoires au Maghreb.
L’exemple du Maghreb nous permet de comprendre les logiques des mobilités humaines, qu’elles soient économiques, géopolitiques ou touristiques. Après avoir étudié les migrations économiques et géopolitiques, nous nous attarderons sur le cas du tourisme entre le Maghreb et l’Europe. Enfin, nous nous intéresserons aux enjeux que soulève cette étude de cas.
Les migrations économiques et géopolitiques
Les migrations économiques et géopolitiques
Localisation du Maghreb
Localisation du Maghreb
Maghreb :
Le Maghreb est une région située en Afrique du Nord constituée du Maroc, de l’Algérie et de la Tunisie.
- On y inclut parfois la Mauritanie, la Libye et une partie du Sahara occidental ; on parle alors de « Grand Maghreb ».
Maghreb et Grand Maghreb
Situation économique du Maghreb
Situation économique du Maghreb
Les flux migratoires entre le Maghreb et l’Europe sont très dynamiques et très actifs. Ils s’expliquent tout d’abord par la précarité économique de cette région du monde. Le chômage est en effet très élevé, et le taux de pauvreté alarmant.
Seuil de pauvreté :
Le seuil de pauvreté varie selon les pays, puisqu’il définit le niveau de revenu en dessous duquel une famille est considérée comme pauvre dans un pays donné.
C’est pourquoi, au Maghreb, où 30 % de la population vit avec moins de deux dollars par jour, on estime en fait qu’en moyenne, 20 % de la population vit en dessous du seuil de pauvreté.
Le Maghreb est également une région qui connaît un taux d’alphabétisation très faible.
Taux d’alphabétisation :
Le taux d’alphabétisation est la proportion de la population qui sait lire et écrire.
De plus, l’accès aux infrastructures (écoles ou hôpitaux) demeure compliquée et surtout très inégalitaire : les campagnes du Maghreb sont en effet isolées et délaissées. Tous ces facteurs motivent beaucoup de maghrébins à quitter leur pays, c’est-à-dire émigrer, pour s’installer à l’étranger, donc immigrer.
Les deux termes se ressemblent mais doivent être différenciés :
- émigrer c’est l’action de quitter son pays natal ;
- immigrer, c’est l’action de s’installer dans un pays étranger.
- Donc l’un implique l’autre et vice-versa.
Migrations légales et clandestines
Migrations légales et clandestines
Il faut replacer les migrations du Maghreb vers l’Europe dans le contexte méditerranéen. Les géographes estiment en effet que le monde méditerranéen est divisé au nord par une Europe riche, avec des droits sociaux nombreux, une stabilité politique forte, et un taux de fécondité faible.
Taux de fécondité :
Le taux de fécondité désigne le nombre moyen d’enfants par femme au sein d’une population.
Au sud de la Méditerranée, au contraire, le taux de pauvreté est inquiétant, l’autoritarisme politique est la norme, les droits sociaux sont inexistants tandis que le taux de fécondité est très élevé.
Dans ce contexte économique et social troublé, l’émigration est une réalité massive. Mais, il existe plusieurs types d’émigration :
- l’émigration légale, notamment par le biais du regroupement familial. Cela signifie que lorsqu’un immigré est installé légalement dans un pays d’accueil, il peut demander à faire venir sa famille sur le territoire ;
- l’émigration illégale, ou clandestine. Le Maroc n’est éloigné de l’Espagne que d’à peine une dizaine de kilomètres. C’est pourquoi le détroit de Gibraltar est devenu la frontière naturelle de l’Europe, et la plaque tournante des migrations clandestines.
Le détroit de Gibraltar
La notion de frontière a été bouleversée au sein de l’Union européenne depuis 1995 et le début de l’espace Schengen. Ses seules frontières sont donc les frontières extérieures. Et le détroit de Gibraltar en est une.
Espace Schengen :
Il s’agit d’une zone géographique en Europe permettant la libre circulation des marchandises et des individus.
L’ampleur de cette émigration clandestine rend difficile les estimations exactes d’émigrés maghrébins. Un chiffre néanmoins peut en donner une certaine idée : on estime que 10 % de la population marocaine vit en Europe.
Mais c’est également un point de transit : chaque année des milliers de clandestins qui souhaitent atteindre l’Europe transitent par le Maroc pour tenter de rentrer illégalement en Espagne par l’intermédiaire du détroit de Gibraltar. Le Maroc a d’ailleurs du mal à surveiller ses frontières, qui s’étendent sur plus de 3 000 km et qui possèdent en plus des enclaves espagnoles.
Enclave :
Une enclave est un territoire situé à l’intérieur d’un autre territoire.
En effet, sur le territoire marocain, il existe deux villes qui appartiennent à l’Espagne : Ceuta et Melilla.
Malgré la militarisation des frontières marocaines et européennes, les migrations sont toujours plus importantes.
Les flux touristiques
Les flux touristiques
Généralités
Généralités
Pour comprendre le thème complexe des mobilités dans le monde, il faut également connaître les logiques des flux touristiques.
Si les migrations économiques s’effectuent en grande partie du Sud vers le Nord, les flux touristiques, eux, s’effectuent davantage du Nord vers le Sud.
Les flux migratoires entre le Maghreb et l’Europe
L’exemple de la Tunisie
L’exemple de la Tunisie
Depuis les années 2000, le tourisme européen au Maghreb était en constante augmentation. Ce tourisme de masse s’explique avant tout par le climat avantageux de la Méditerranée, mais aussi par l’attrait culturel et la beauté de ces régions : on parle d’un tourisme balnéaire de masse.
Afin d’accueillir les touristes européens, le Maghreb a dû adapter ses infrastructures. C’est un investissement qui rapporte car les retombées économiques pour la région ne sont pas négligeables. Dans le cas de la Tunisie, par exemple, le tourisme représente près de 7 % du PIB (produit intérieur brut) total. Le tourisme en Tunisie permet la création de très nombreux emplois, alors même que le taux de chômage au Maghreb est extrêmement élevé.
Le tourisme représente donc l’une des principales sources de richesse du pays.
Toutefois, l’impact du tourisme en Tunisie n’est pas toujours positif. Comme partout dans le monde, les littoraux sont les premiers touchés par le développement touristique. À partir du moment où une grande quantité de personnes se concentre sur un territoire réduit, ce territoire est soumis à un phénomène d’érosion, c’est-à-dire de dégradation.
Dans le cas des littoraux tunisiens, la dégradation du littoral est particulièrement marquée. La pollution augmente également, et notamment la pollution de l’eau.
Les défis soulevés par les flux migratoires
Les défis soulevés par les flux migratoires
Des flux nécessaires à l’économie
Des flux nécessaires à l’économie
Qu’ils soient volontaires ou non, qu’ils se réalisent en direction du Nord ou du Sud, les flux migratoires sont indispensables pour l’économie des pays du Sud. Or, cette dépendance soulève des questions.
C’est particulièrement évident dans le cas du tourisme, qui dynamise littéralement les pays du Maghreb, et est un vecteur majeur du développement économique de la région. Mais depuis 2014 et les attentats commis au Maghreb, notamment en Tunisie, la fréquentation touristique de la région est en chute libre. Ce coup de frein subi par le secteur touche donc toute l’économie du pays.
Une autre dépendance économique existe, celle engendrée par les remises.
Remises :
Les remises sont les envois d’argent que les émigrés réalisent à destination de leur famille restée au pays.
En effet, les émigrés installés en Europe, de manière clandestine ou de manière légale, participent activement à l’économie de leur pays. Au niveau mondial, les remises ont été de l’ordre de 500 milliards de dollars en 2012. Au Maroc ces remises représentent un total supérieur à l’aide publique au développement.
Des flux qui révèlent les inégalités de développement
Des flux qui révèlent les inégalités de développement
L’hôtel Balima, à Rabat au Maroc © Nawalbennani
Des migrants tentent de passer la frontière entre le Maroc et l’enclave espagnole de Melilla. Agence Reuters © Jesus Blasco de Avellaneda
Sur ces deux photos, il s’agit bien du même pays, le Maroc, mais on y observe deux réalités sociales opposées. Ces deux photos représentent les deux types de flux différents : les flux vers le Nord, risqués et souvent clandestins, et les flux vers le Sud, essentiellement touristiques.
Ces deux types de flux correspondent à des inégalités de développement frappantes. Ces inégalités représentent le défi majeur que le monde va devoir affronter au XXIe siècle. À ce défi s’ajoute celui de l’environnement : l’érosion des littoraux du Maghreb ainsi que la pollution de l’eau en raison de la pression touristique sont autant de signaux d’alarme qui incitent les autorités à développer des alternatives.
Conclusion :
Les flux de mobilité humaine entre l’Europe et le Maghreb sont donc complexes. Pour des raisons économiques, nombreux sont les maghrébins à avoir emprunté légalement ou illégalement la route pour l’Europe.
De là, par l’intermédiaire des remises, ils favorisent l’économie de leur pays d’origine. Les flux touristiques, du Nord vers le Sud, contribuent aussi au développement des pays du Maghreb mais démontrent également la dépendance économique de la région et ses limites.
On peut le voir clairement à l’issue de ce cours, plus que jamais, les flux de mobilité humaine participent pleinement à la mondialisation et à l’imbrication des économies internationales.