Utiliser une translation
Introduction :
Nous connaissons plusieurs transformations géométriques : symétrie axiale et centrale, agrandissement et réduction. Dans ce cours, nous allons en découvrir une nouvelle : la translation.
Nous commencerons donc par définir la translation et en donnerons les propriétés. Nous verrons ensuite comment transformer une figure par translation. Enfin, nous apprendrons, grâce à la translation, à construire des frises et des pavages.
La translation
La translation
Définition et propriétés
Définition et propriétés
Regardons une rame de funiculaire qui remonte une pente et que l’on représente à deux instants différents :
Représentation du déplacement d’un funiculaire
Entre les deux instants, le funiculaire :
- a suivi la direction rectiligne donnée par ses rails, la droite $(AA^{\prime})$ ;
- dans le sens de la montée, soit de $A$ vers $A^{\prime}$ ;
- sur une distance $AA^{\prime}=10\ \text{m}$.
- On parle alors de translation.
Translation :
On considère deux points $A$ et $A^{\prime}$.
La translation qui transforme $A$ en $A^{\prime}$ est le glissement défini par :
- une direction : la droite $(AA^{\prime})$ ;
- un sens : de $A$ vers $A^{\prime}$ ;
- une distance, $AA^{\prime}$.
- Sur une figure, on représente ce glissement par une flèche.
En mathématiques, contrairement au sens courant, la direction d’une droite ne dit rien du sens. Par exemple, si on revient à notre funiculaire, la direction est donnée par l’inclinaison de la pente, mais le sens correspond au sens de circulation de la rame : elle monte ou elle descend.
Retenez aussi que deux droites parallèles (confondues ou non) ont la même direction.
Pour le funiculaire, considérons par exemple les points qui forment l’octogone de la cabine, et plus particulièrement ses sommets. Tous ces points suivent un même glissement, identique à celui qui transforme $A$ en $A^{\prime}$ :
- dans la même direction, $(AA^{\prime})$ ;
- dans le même sens, vers l’amont ;
- sur la même distance, $AA^{\prime}=10\ \text{m}$.
Transformation de la cabine par la translation qui transforme A en A’
On dit que la figure $\mathcal R^{\prime}$ est l’image de la figure $\mathcal R$ par la translation qui transforme $A$ en $A^{\prime}$.
Remarques
- On pourrait aussi parler de la translation qui transforme $B$ en $B^{\prime}$, ou $C$ en $C^{\prime}$, ou $D$ en $D^{\prime}$, etc., puisque la direction, le sens et la longueur sont identiques.
- Les flèches qui représentent la translation sont appelées vecteurs ; $\overrightarrow{AA^{\prime}\ }$ est alors la notation du vecteur correspondant à la translation qui transforme $A$ en $A^{\prime}$.
- Dans la suite de ce cours, au lieu de dire « la translation qui transforme $A$ en $A^{\prime}$ », nous dirons, pour alléger, « la translation de vecteur $\overrightarrow{AA^{\prime}\ }$ ».
- Les vecteurs $\overrightarrow{AA^{\prime}\ }$, $\overrightarrow{BB^{\prime}\ }$, $\overrightarrow{CC^{\prime}\ }$, $\overrightarrow{DD^{\prime}\ }$, etc., sont égaux, car ils correspondent à une même translation.
Lors de son déplacement, la rame du funiculaire garde les mêmes dimensions et la même forme. On a alors, par exemple :
- $AB=A^{\prime}B^{\prime}$ ; $DE=D^{\prime}E^{\prime}$ ; $GH=G^{\prime}H^{\prime}$ ; etc. ;
- $\widehat {ABI}=\widehat {A^{\prime}B^{\prime}I^{\prime}}$ ; $\widehat {DEF}=\widehat {D^{\prime}E^{\prime}F^{\prime}}$ ; $\widehat {GHI}=\widehat {G^{\prime}H^{\prime}I^{\prime}}$ ; etc. ;
- $[BI]$ et $[EF]$ sont parallèles, $[B^{\prime}I^{\prime}]$ et $[E^{\prime}F^{\prime}]$ sont aussi parallèles ;
- on peut d’ailleurs aussi remarquer que l’image d’un segment par une translation est un segment qui lui est parallèle.
Ainsi, comme pour la symétrie axiale et centrale, on retrouve des propriétés de conservation.
- La translation conserve les longueurs, les aires, les mesures d’angles, l’alignement et le parallélisme.
- Une figure et son image par une translation sont superposables.
Construire l’image d’une figure par une translation
Construire l’image d’une figure par une translation
Donnons tout d’abord le principe général pour construire l’image d’une figure par une translation.
Pour construire l’image d’une figure par une translation :
- s’il s’agit d’un polygone, on trace l’image de chaque sommet par la translation, puis on joint les sommets consécutifs pour former le polygone image ;
- s’il s’agit d’un cercle (ou d’un demi-cercle), on trace l’image du centre du cercle (ou du demi-cercle) ; cette image sera le centre du cercle (ou du demi-cercle) image, qui aura le même rayon, puisque la translation conserve les longueurs.
- S’il s’agit d’un demi-cercle, on veillera à le tracer du « même côté ».
Translation et parallélogramme
Avant d’entrer dans le détail de la construction d’une image, étudions le lien entre translation et parallélogramme, en reprenant notre exemple du funiculaire. Nous nous intéressons plus particulièrement au point $F^{\prime}$, image du point $F$ par la translation de vecteur $\overrightarrow{AA^{\prime}\ }$.
Translation et parallélogramme
Comme $F^{\prime}$ est l’image de $F$ par la translation de vecteur $\overrightarrow{AA^{\prime}\ }$ :
- les droites $(AA^{\prime})$ et $(FF^{\prime})$ ont la même direction ; autrement dit, elles sont parallèles ;
- les longueurs $AA^{\prime}$ et $FF^{\prime}$ sont égales (à $10\ \text{m}$).
$AFF^{\prime}A^{\prime}$ est donc un quadrilatère qui a deux côtés opposés, $[AA^{\prime}]$ et $[FF^{\prime}]$, parallèles et de même longueur.
Or, nous avons la propriété suivante : si un quadrilatère (non croisé) possède deux côtés opposés parallèles et de même longueur, alors c’est un parallélogramme.
- Le quadrilatère (non croisé) $AFF^{\prime}A^{\prime}$ est donc un parallélogramme.
Ainsi, construire l’image d’un point par une translation revient à construire un parallélogramme. Pour cela, on pourra utiliser une règle et un compas, comme nous allons le voir.
Méthode 1 : Comment, avec une règle et un compas, construire l’image d’une figure par une translation
Soit $ABC$ un triangle rectangle en $B$. $I$ est le milieu de $[AB]$. On trace le demi-cercle de centre $I$ et de rayon $IA$, puis on place les points $P$ et $P^{\prime}$ suivants :
Représentation de la figure
On cherche à construire l’image de cette figure, formée par le triangle et le demi-cercle, par la translation de vecteur $\overrightarrow{PP^{\prime}\ }$.
On note :
- $A^{\prime}$ l’image du point $A$ par cette translation ;
- $B^{\prime}$ l’image de $B$ ;
- $C^{\prime}$ l’image de $C$ ;
- $I^{\prime}$ l’image de $I$.
En se reposant sur le lien entre translation et parallélogramme que nous avons vu, nous allons construire :
- le point $A^{\prime}$, image de $A$, tel que $PAA^{\prime}P^{\prime}$ est un parallélogramme ;
- le point $B^{\prime}$, image de $B$, tel que $PBB^{\prime}P^{\prime}$ est un parallélogramme ;
- le point $C^{\prime}$, image de $C$, tel que $PCC^{\prime}P^{\prime}$ est un parallélogramme ;
- le point $I^{\prime}$, image de $I$, tel que $PII^{\prime}P^{\prime}$ est un parallélogramme.
- Commençons par $A^{\prime}$.
- On place la pointe du compas sur $P$, et on règle l’écartement du compas sur la longueur de $[PP^{\prime}]$.
- On pointe ensuite le compas sur le point $A$ et on trace un arc de cercle (en étudiant la direction et le sens du vecteur $\overrightarrow{PP^{\prime}\ }$, on sait grosso modo où situer cet arc – on peut le tracer assez long, si on a un doute).
Tracé de l’arc de cercle de centre A et de rayon PP’
- On pointe maintenant le compas sur $P$, et on règle l’écartement pour obtenir la longueur $PA$.
- On place la pointe sur $P^{\prime}$ et on reporte la longueur réglée en traçant un arc qui coupe celui tracé plus tôt : on place ainsi le point $A^{\prime}$ tel que $PAA^{\prime}P^{\prime}$ est un parallélogramme, et $A^{\prime}$ est l’image du point $A$ par la translation de vecteur $\overrightarrow{PP^{\prime}\ }$.
A’, point d’intersection de l’arc de cercle de centre A et de rayon PP’ et de l’arc de cercle de centre P’ et de rayon PA
On a ici représenté le parallélogramme et la flèche de $A$ vers $A^{\prime}$, pour mettre en évidence :
- le parallélogramme $PAA^{\prime}P^{\prime}$ ;
- le glissement de $A$ en $A^{\prime}$, selon la même direction que $(PP^{\prime})$, dans le même sens et sur la même longueur.
Dans la pratique, sauf, si vous préférez le faire pour bien visualiser les choses ou si l’énoncé vous le demande, ce ne sera pas indispensable, les deux arcs tracés au compas suffisent ; cela allégera la construction.
- On fait de même pour placer le point $B^{\prime}$, image de $B$ et point d’intersection :
- d’un arc de cercle de centre $B$ et de rayon $PP^{\prime}$,
- et d’un arc de cercle de centre $P^{\prime}$ et de rayon $PB$.
- Ainsi, le point $B^{\prime}$ est tel que $PBB^{\prime}P^{\prime}$ est un parallélogramme : c’est l’image de B par la translation de vecteur $\overrightarrow{PP^{\prime}\ }$.
B’, point d’intersection de l’arc de cercle de centre B et de rayon PP’ et de l’arc de cercle de centre P’ et de rayon PB
- Pour les points $C^{\prime}$ et $I^{\prime}$, images respectivement de $C$ et $I$, on fait de même :
Construction des points images
- On peut maintenant tracer les segments pour former l’image du triangle $ABC$ par la translation de vecteur $\overrightarrow{PP^{\prime}\ }$. On obtient le triangle $A^{\prime}B^{\prime}C^{\prime}$ ; comme la translation conserve les angles, il est rectangle en $B^{\prime}$.
- On peut aussi tracer le demi-cercle de centre $I^{\prime}$ et de rayon $I^{\prime}A^{\prime}$, « en dessous » du segment $[A^{\prime}B^{\prime}]$, qui est l’image du demi-cercle de centre $I$ et de rayon $IA$.
- On efface, si on le souhaite, les traits de construction.
Images du triangle et du demi-cercle par la translation
Remarque :
Si le point dont l’image est à construire se trouve sur la droite $(PP^{\prime})$, il suffit de reporter la longueur $PP^{\prime}$ sur la droite à partir du point initial, en respectant le sens.
- Il y a d’autres façons de tracer un parallélogramme. On peut, si on préfère, par exemple pour tracer $A^{\prime}$, tracer la parallèle à $(PP^{\prime})$ passant par $A$, puis reporter la longueur $PP^{\prime}$ à partir de $A$ sur cette droite.
- On peut aussi se servir des propriétés de conservation de la translation. Par exemple, une fois les points $A^{\prime}$ et $B^{\prime}$ placés, on peut placer $I^{\prime}$ comme milieu du segment $[A^{\prime}B^{\prime}]$, puisque $I$ est le milieu de $[AB]$.
Méthode 2 : Comment, grâce à un quadrillage, construire l’image d’une figure par une translation
Tout devient plus simple si la figure est tracée sur un quadrillage.
On s’intéresse à la même figure que dans la première méthode, cette fois tracée sur un quadrillage, et on s’intéresse désormais à l’image de la figure par la translation de vecteur $\overrightarrow{TT^{\prime}\ }$.
Représentation de la figure sur un quadrillage
- Ici, il suffit de regarder la flèche du vecteur $\overrightarrow{TT^{\prime}\ }$ et de compter les carreaux horizontalement et verticalement qui correspondent au trajet de $T$ vers $T^{\prime}$ :
Légende
Img-11 Trajet de T à T’
- On peut tracer maintenant l’image $A^{\prime}$ de $A$ par la translation, en comptant le même nombre de carreaux à partir de $A$, soit $6$ carreaux vers la gauche et $1$ carreau vers le haut.
- La flèche représentant le vecteur $\overrightarrow{AA^{\prime}\ }$ possède la même direction, le même sens et la même longueur que celle du vecteur $\overrightarrow{TT^{\prime}\ }$ :
A’, image du point A
- On fait de même pour les points $B$, $C$ et $I$, toujours en comptant les carreaux :
Construction des points B’, C’ et I’
On pourrait aussi construire $I^{\prime}$, $B^{\prime}$ et $C^{\prime}$ à partir du point $A^{\prime}$ et en se servant des carreaux et des propriétés de conservation de la translation :
- $I$ est à $2$ carreaux vers la droite de $A$, donc $I^{\prime}$ est à $2$ carreaux vers la droite de $A^{\prime}$ ;
- $B$ est à $2$ carreaux vers la droite de $I$, donc $B^{\prime}$ est à $2$ carreaux vers la droite de $I^{\prime}$ ;
- $C$ est à $3$ carreaux vers le haut de $B$, donc $C^{\prime}$ est à $3$ carreaux vers la haut de $B^{\prime}$.
- On peut maintenant compléter, avec la règle et le compas, en construisant le triangle $A^{\prime}B^{\prime}C^{\prime}$ rectangle en $B^{\prime}$ et le demi-cercle de centre $I^{\prime}$ et de rayon $I^{\prime}A^{\prime}$ :
Construction des images du triangle ABC et du demi-cercle de centre I et de rayon AI
Frises et pavages
Frises et pavages
Dans cette partie, à partir de la notion de translation que nous venons de découvrir, nous définirons ce que sont les frises et les pavages en mathématiques.
En fait, on connaît bien ces « objets » mathématiques, car ils sont utilisés depuis l’Antiquité, et on en trouve des exemples un peu partout : dans nos logements, en regardant le carrelage ou la faïence d’une cuisine ou d’une salle de bain ; en architecture, pour les ornements des façades des bâtiments publics ou religieux ; ou en peinture décorative, pour des vases ou des assiettes.
Regardons par exemple ce détail d’une très ancienne décoration, que nous allons reproduire à l’aide de translations successives :
Détail d’une peinture ornementale mésopotamienne
Frises
Frises
De cette illustration, modélisons géométriquement une « ligne », avec des carrés (et des rectangles) :
Exemple de frise
- Cette bande où se répète « horizontalement » un même motif s’appelle une frise.
Frise :
Une frise est une bande du plan (une zone comprise entre deux droites parallèles) dans laquelle un même motif est régulièrement reproduit par une même translation.
- Ce motif répété est appelé motif de base.
Dans notre exemple, en évitant toute redondance et tout manque, on peut l’identifier :
Motif de base
Il suffit maintenant de trouver la translation qui permet de répéter le motif de base en respectant la frise.
Motif de base et translation
Un motif de base peut être lui-même obtenu par transformation d’un motif élémentaire (symétrie axiale ou centrale par exemple).
Par exemple sur la frise suivante, où une « goutte » forme, avec son image par une symétrie centrale, le motif de base, répété par translation :
Motif de base obtenue par symétrie centrale
Pavages
Pavages
Reprenons la frise de la décoration mésopotamienne, et répétons-la cette fois « verticalement » :
Exemple de pavage
Ainsi, pour obtenir cette représentation, le motif de base que nous avons identifié plus haut est répété :
- « horizontalement », pour obtenir donc une frise ;
- et « verticalement », pour « couvrir » une portion du plan.
Il n’y a aucun vide laissé par les répétitions du motif de base, et celles-ci ne se chevauchent jamais.
- On obtient ainsi un pavage.
Pavage :
Un pavage est une portion du plan dans laquelle un motif de base est régulièrement reproduit, sans superposition ni vide laissé, par deux translations de directions différentes.
Nous pouvons identifier les deux translations pour notre pavage :
Motif de base et translations
Notre exemple est assez simple : les directions des deux translations sont horizontales et verticales, et donc perpendiculaires. Ce ne sera pas toujours le cas.
Utiliser les propriétés de conservation des aires
Utiliser les propriétés de conservation des aires
Syd veut reproduire sur une portion de mur le pavage que nous avons étudié, dont le motif de base est, pour rappel :
Motif de base
En inscrivant ce motif dans un carré de côté $10\ \text{cm}$, il calcule que l’aire des parties orange vaut $36\ \text{cm}^2$, et il en déduit que celle des parties crème vaut $64\ \text{cm}^2$.
Syd souhaite obtenir :
- $15$ motifs sur une ligne ;
- $20$ motifs sur une colonne.
- Il souhaite connaître l’aire totale de la partie à peindre en orange et de celle à peindre en crème.
Syd a, en réalité, fait le plus gros du travail en calculant ces aires pour le motif de base.
Une translation conserve les aires, ainsi il suffit d’utiliser ses résultats.
Le nombre total de motifs sera égal à :
$$15\times 20=300$$
- L’aire totale des parties orange sera donc égale à :
$$300\times 36\ \text{cm}^2=10\,800\ \text{cm}^2=\boxed{1,08\ \text{m}^2}$$
- Et, de la même façon, l’aire totale des parties crème sera égale à :
$$300\times 64\ \text{cm}^2=19\,200\ \text{cm}^2=\boxed{1,92\ \text{m}^2}$$
Conclusion :
Nous connaissons maintenant une nouvelle transformation du plan : la translation, qui possède, comme les symétries, des propriétés de conservation.
Nous avons aussi appris les définitions mathématiques des frises et des pavages. Vous pouvez maintenant les identifier, chez vous ou à l’extérieur, car, dans la nature aussi, les pavages sont fréquents :
Abeille sur un rayon de miel (© Matthew T. Rader, CC BY-SA 4.0)
À vous de déterminer le motif de base de ce pavage et les translations associées !