L’Autre Tartuffe ou la Mère coupable fait partie de la trilogie que Beaumarchais a consacrée au personnage de Figaro, après Le Barbier de Séville et Le Mariage de Figaro. On y retrouve Figaro et sa femme Suzanne, le comte Almaviva et sa femme Rosine.
Les premières représentations, en 1792, ne connurent pas le succès que les pièces précédentes laissaient attendre. Mais la pièce, reprise en 1797, trouva finalement son public. Elle reste aujourd’hui moins représentée et moins lue que les deux premiers volets de la trilogie.
Figaro : Valet d’Almaviva. Dévoué à Almaviva, mais faisant preuve d’indépendance d’esprit, il est rusé, vif et enjoué. Comme dans les pièces précédentes, c’est lui qui sauve la situation. Suzanne : Femme de Figaro, elle est aussi la femme de chambre de la comtesse. Elle sert de confidente à sa maîtresse. Aussi intelligente que son mari, elle cherche à protéger les intérêts de la comtesse. Le comte Almaviva : Les deux premiers volets de la trilogie le présentaient en homme quelque peu frivole et libertin, mais l’âge l’a rendu plus raisonnable. La comtesse, Rosine : Femme d’Almaviva. Bien qu’elle aime son mari, on apprend qu’elle a eu une liaison avec Chérubin, personnage qui apparaît dans Le Mariage de Figaro. Honoré Bégearss : Ancien secrétaire du comte, c’est en réalité un intrigant qui projette de s’accaparer la fortune d’Almaviva. Léon : Second fils d’Almaviva, on apprend qu’il est en fait le fils illégitime de la comtesse et de Chérubin. Il est amoureux de Florestine. Florestine : Pupille d’Almaviva, dont elle est en réalité la fille illégitime. Elle est amoureuse de Léon.
La ruse et la manipulation : Le titre de la pièce, L’autre Tartuffe, qui fait référence à la pièce de Molière, indique d’emblée que la ruse et la manipulation seront l’un des grands ressorts de la pièce. Bégearss est en effet un personnage hypocrite qui, sous couvert d’aider le comte, cache des intention malhonnêtes. Mais Figaro est également un manipulateur, bien que son but soit de protéger les intérêts de son maître.
Le double jeu des personnages court tout au long de la pièce puisque Léon et Florestine ont eux aussi une identité secrète, inconnue d’eux au début de la pièce. De même, le comte et la comtesse gardent le secret de leur adultère. Ainsi, chacun a quelque chose à cacher. Le mariage : Le mariage est un autre thème important de la pièce, comme dans les deux volets précédents. Il s’agit en apparence d’une comédie classique de mariage, qui reprend les schémas habituels : identités cachées, obstacles et révélations finales. Mais la grande originalité est que la pièce ne se conclut par aucun mariage. Le drame : Plus grave qu’elle n’y paraît, la pièce mêle la comédie et le drame. C’est qu’elle témoigne des changements que la société connaît depuis la Révolution. La famille Almaviva s’est installée dans le Paris révolutionnaire, le comte se fait appeler « monsieur » plutôt que « monseigneur », et Léon est membre d’un club politique libéral et admirateur de Washington. Depuis la Révolution, le divorce est légal et c’est donc une vraie dissolution qui menace la famille Almaviva, reflet de cette période de transition entre deux époques contradictoires. Si l’ordre est rétabli à la fin de la pièce, l’absence de mariage souligne la gravité nouvelle de Beaumarchais.
Acte I
Acte I
Figaro et Suzanne doutent de l’honnêteté d’Honoré Bégearss, ancien secrétaire du comte Almaviva. Alors que le fils aîné d’Almaviva vient de mourir, Figaro a l’impression que Bégearss cherche à instaurer la discorde entre les membres de la famille Almaviva afin d’épouser Florestine et de s’enrichir. Figaro et Suzanne décident de passer à l’action.
Bégearss se confie justement à Suzanne : il veut épouser Florestine et écarter Léon, le second fils d’Almaviva, pour lequel il prévoit un lointain voyage en compagnie de Figaro.
Le comte Almaviva révèle à Bégearss qu’il doute d’être le père de Léon : celui-ci serait le fils de Chérubin, son ancien page. Il envisage de léguer toute sa fortune à Florestine, sa pupille.
Comme il vaut prouver la culpabilité de sa femme, il remplace son portrait par celui de Chérubin dans un bracelet de la comtesse. Comme Bégearss tient le coffret à bijoux de la comtesse, il prétend l’avoir cassé et met à jour un double fond où sont cachées des lettres échangées par Chérubin et Rosine. Almaviva s’empare d’une de ces lettres pour qu’elle lui serve de preuve.
Acte II
Acte II
Cette lettre révèle au comte que Léon est bien le fils de Chérubin. Il éprouve de la tristesse plutôt que de la colère.
Bégearss confie à Florestine qu’Almaviva est son père et la jeune fille en est très heureuse.
Suzanne rapporte à Figaro ce qu’elle a appris.
Figaro, qui surveille la maison, a découvert une lettre que Bégearss a reçue d’un banquier irlandais et par laquelle il espère pouvoir le confondre.
Bégearss a observé Florestine qui offrait des fleurs à Léon et il lui dit qu’elle ne peut épouser son propre frère. Elle en est désespérée et repousse Léon.
Suzanne s’impatiente et voudrait dénoncer Bégearss, mais Figaro a un autre plan.
Léon va demander des explications à Bégearss et veut le provoquer en duel si celui-ci refuse de s’expliquer. Bégearss lui révèle alors que Florestine est la fille d’Almaviva et qu’il ne peut donc l’épouser. Les deux hommes se réconcilient.
Pendant ce temps, le comte Almaviva renvoie Léon, à la grande colère de Figaro. Almaviva réplique en demandant à Figaro les trois millions d’or ramenés de Cadix, mais ceux-ci ont été déposé chez monsieur Fal, le notaire.
Bégearss suggère à Almaviva qu’il a trop privilégié Figaro et qu’il serait sage de l’éloigner. Le comte tombe d’accord et décide de demander à Figaro d’accompagner Léon en voyage.
Acte III
Acte III
La comtesse s’étonne du comportement étrange de Florestine et dit à Suzanne qu’elle fait confiance à Bégearss.
Celui-ci lui apprend que Florestine est la fille de son mari, et qu’elle ne peut donc épouser son frère. Il lui propose d’épouser Florestine afin de sauver l’honneur de la famille et de cacher le secret de la filiation de Léon. La comtesse accepte. Bégearss lui demande de brûler ses lettres.
Almaviva déclare à sa femme qu’il voudrait que Bégearss épouse Florestine : la comtesse est d’accord. Le mariage est décidé pour le soir même.
Une fois seul avec le comte, Bégearss lui suggère d’écarter rapidement Léon pour que le mariage se déroule sans problème.
Almaviva donne à Bégearss un reçu qui lui permettra de retirer les trois millions d’or chez le notaire.
Acte IV
Acte IV
Léon expose à Bégearss sa tristesse d’être chassé de la maison de son père. Bégearss lui explique la raison de cette mise à l’écart : Florestine est sa sœur et leur amour n’est pas possible. Il lui suggère de demander de l’aide à sa mère.
La comtesse essaie effectivement de plaider la cause de son fils, mais le comte se met en colère. Il lui dit alors qu’il sait que Léon n’est pas son fils et il lui montre la lettre qu’elle avait écrite à Chérubin. Il lui reprocher de porter encore son portrait sur elle : lorsque la comtesse regarde son bracelet et voit l’image de son amant, elle s’évanouit. Le comte va chercher de l’aide.
Léon, qui était caché, se porte au secours de sa mère. Il se sent coupable de cette situation. Lorsqu’Almaviva revient, Léon lui dit qu’il est prêt à abandonner son nom, ses titres et ses biens et à se faire soldat pour sauver l’honneur de la famille. Le comte refuse. La comtesse dit à son mari qu’elle sait que Florestine est sa fille. Elle s’étonne aussi de voir cette lettre en possession du comte alors qu’elle a brûlé toute sa correspondance. Figaro explique alors que c’est Bégearss qui a remis la lettre au comte. Le comte se souvient que c’est Bégearss qui a découvert le double fond dans le coffret à bijoux et qui lui a dit de conserver une lettre, mais il continue à croire qu’il est innocent. Suzanne révèle alors que Bégearss connaissait depuis le début ces lettres et qu’il a intrigué.
Figaro va plus loin dans ses révélations : il montre la lettre du notaire irlandais et se dépêche d’aller chez monsieur Fal afin que Bégearss ne récupère par l’argent du comte.
Acte V
Acte V
Bégearss est déjà marié en Irlande. La famille Almaviva comprend que son but était de s’accaparer la fortune du comte. Le mariage n’aura pas lieu.
Le comte apprend à Florestine qu’elle est sa fille et qu’il n’est pas le père de Léon.
Bégearss rend finalement l’argent au comte grâce à l’intervention de Figaro. Le comte pardonne à la comtesse. Figaro refuse la récompense de deux milles louis que le comte lui offre.
« L'injure ne profite à personne, elle n'est pas de bon goût. »« SUZANNE accourt, regarde, et dit très vivement à l'oreille de Figaro :
C'est lui que la pupille épouse. – Il a la promesse du comte. – Il guérira Léon de son amour. – Il détachera Florestine. – Il fera consentir madame. – Il te chasse de la maison. – Il cloître ma maîtresse en attendant que l'on divorce. – Fait déshériter le jeune homme, et me rend maîtresse de tout. Voilà les nouvelles du jour.
(Elle s'enfuit.) »« Les misérables femmes, en se laissant séduire, ne savent guère les maux qu'elles apprêtent ! Elles vont, elles vont… Les affronts s'accumulent… et le monde injuste et léger accuse un père qui se tait, qui dévore en secret ses peines ! On le taxe de dureté pour les sentiments qu'il refuse au fruit d'un coupable adultère !… Nos désordres, à nous, ne leur enlèvent presque rien ; ne peuvent, du moins, leur ravir la certitude d'être mères, ce bien inestimable de la maternité ! Tandis que leur moindre caprice, un goût, une étourderie légère, détruit dans l'homme le bonheur… Le bonheur de toute sa vie, la sécurité d'être père. – Ah ! Ce n'est point légèrement qu'on a donné tant d'importance à la fidélité des femmes ! Le bien, le mal de la société, sont attachés à leur conduite ; le paradis ou l'enfer des familles dépend à tout jamais de l'opinion qu'elles ont donnée d'elles. »« BÉGÉARSS bas à Florestine :
Eh bien ! Mademoiselle, avez-vous deviné l'époux qu'on vous destine ?
FLORESTINE, avec joie :
Sur qui puis-je porter les yeux ? L’époux qu’il me destine est, dit-il, dans cette maison. Je vois l'excès de sa bonté : ce ne peut être que Léon ; mais moi, sans biens, dois-je abuser…
BÉGEARSS, d'un ton terrible :
Qui ? Léon ! Son fils, votre frère ! »