Les Odes sont la première grande œuvre de Ronsard. Cet ensemble de poèmes est à la fois novateur et critique vis-à-vis de certains poètes contemporains, ce qui le fait mal recevoir par la cour. Ronsard ne fait en effet pas preuve d’allégeance à ses prédécesseurs à la mode. Il ne rompt pas pour autant avec toute tradition, et ses admirateurs ont vu dans l’auteur des Odes un « Pindare français ». Critiqués par certains, admirés par d’autres, les Odes ne passèrent pas inaperçues et marquèrent avec succès l’entrée de Ronsard en poésie.
Les thèmes entremêlés : Ronsard reprend à Pindare le principe d’un entrelacement de thèmes divers. Pindare employait à ce propos l’image du tissu ou de la broderie. La force et la délicatesse de ces odes est précisément de ne pas se contenter de schémas et techniques éprouvées, mais de les réinventer ou d’y injecter un peu de la subjectivité du poète grâce à ces entrecroisements. La célébration : Exploitant pleinement le genre de l’ode, Ronsard se livre ici à une poésie de la célébration : célébration des rois et des seigneurs, des poètes et des savants, des arbres et des ruisseaux, des amis et de l’amour. La solitude : Mais il s’agit aussi d’une poésie de la solitude et de la méditation, attentive à la nature et réfléchissant au sens à donner à la vie. C’est cette recherche de sens qui est le vrai objet de la poésie de Ronsard et qui en constitue en même temps la réponse : la poésie est en effet à la fois source de plaisirs terrestres et d’immortalité.
Livre I : Pindare
Livre I : Pindare
Ce livre est écrit sous l’influence de Pindare, dont Ronsard reprend la manière et l’inspiration. Comme Pindare, Ronsard fait ici l’éloge de grandes figures de son époque, en usant pour cela, comme son modèle grec, de mythes et d’une abondance de qualificatifs élogieux.
On peut cependant distinguer différentes tendances dans ces exercices d’admirations.
Les odes peuvent effet porter sur les grands de son temps : le roi, la reine, Marguerite de France, le cardinal de Guise, etc. La grandeur politique et les succès militaires sont loués.
Mais Ronsard fait également l’éloge de poètes et d’humanistes : du Bellay, Jean Dorat, Antoine de Baïf, Bertrand Bergier, etc.
Ronsard opère ainsi un rapprochement entre ces deux univers et semble dire qu’un poète vaut autant qu’un roi, que la valeur intellectuelle est aussi importante que la valeur militaire. Le parallèle est d’autant plus fort qu’il chante dans un même mouvement les succès militaires et le combat des poètes contre l’ignorance.
Ce faisant, c’est surtout de la poésie que Ronsard fait l’éloge. Le message est clair : la poésie est nécessaire pour immortaliser les grands hommes, et les poètes sont les maîtres de l’immortalité.
Livres II, III et IV : Horace
Livres II, III et IV : Horace
L’inspiration de ces livres puise cette-fois ci du côté d’Horace.
Ce n’est plus la cour et les honneurs qui intéressent Ronsard ici, mais la célébration de la nature et plus particulièrement du Vendômois natal.
Entremêlé avec le motif de la nature, Ronsard décrit les bonheurs de l’amitié et du partage des plaisirs simples de la vie selon une philosophie épicurienne qui ne le quittera plus.
Mais ce sont également les plaisirs amoureux qui font l’objet de ces livres.
Cassandre est la principale figure féminine, mais on croise aussi Macée, Marguerite, ainsi que d’autres femmes qui ne sont pas nommées.
Ronsard chante la joie d’aimer, se détournant de l’amour pétrarquiste au profit d’un amour accompli et joyeux, celui du plaisir partagé. S’y mêle la conscience du temps qui fuit et qui incite à la jouissance de l’instant présent.
« Mignonne, allons voir si la rose
Qui ce matin avait déclose
Sa robe de pourpre au soleil,
A point perdu cette vesprée
Les plis de sa robe pourprée,
Et son teint au vôtre pareil. »« J’ai l’esprit tout ennuyé
D’avoir trop étudié
Les phénomènes d’Arate ;
Il est temps que je m’ébatte
Et que j’aille aux champs jouer.
Bons Dieux ! qui voudrait louer
Ceux qui collés sur un livre,
N’ont jamais souci de vivre ? »« Quand je suis vingt ou trente mois
Sans retourner en Vendômois,
Plein de pensées vagabondes,
Plein d’un remords et d’un souci,
Aux rochers je me plains ainsi,
Aux bois, aux antres et aux ondes.
Rochers, bien que soyez âgés
De trois mil ans, vous ne changez
Jamais ni d’état ni de forme ;
Mais toujours ma jeunesse fuit,
Et la vieillesse qui me suit,
De jeune en vieillard me transforme. »« L’Été, je dors ou repose
Sur ton herbe, où je compose,
Caché sous tes saules verts,
Je ne sais quoi, qui ta gloire
Enverra par l’Univers,
Commandant à la Mémoire
Que tu vives par mes vers. »