Kant publie Vers la paix perpétuelle alors qu’il est âgé de 70 ans et que la Révolution française secoue l’Europe. Il est important de remettre cet écrit dans son contexte de publication pour comprendre l’importance de sa portée politique. En France, la Terreur vient de s’achever et une guerre oppose la France à l’Autriche et à l’Angleterre. Kant cherche à donner un message d’espérance dans un contexte où la violence est omniprésente. Le problème posé par Kant, à savoir comment organiser juridiquement la paix et instaurer le cosmopolitisme (le fait de ne pas traiter un étranger comme un ennemi) s’inscrit dans une longue tradition philosophique et on trouve alors de multiples projets de paix. Cependant, celui de Kant se démarque des autres car il promet une plus grande liberté humaine.
L’essai de Kant est organisé en trois parties, à savoir une première section contenant trois articles définitifs, deux suppléments et un appendice. La paix est selon Kant une idée nécessaire, qu’il s’agit de mettre en place, par des dispositions juridiques qu’il explique dans Vers la paix perpétuelle. Selon lui, cette idée de paix perpétuelle doit être au fondement de la constitution civile de chaque État, qui doit déjà dans ce sens être républicain. Ainsi, Kant propose de mettre en place trois types de droits à trois échelles : le droit public (à l’échelle nationale), le droit des gens (à l’échelle internationale entre les pays) et le droit cosmopolitique (entre les peuples). La paix est, selon lui, une obligation morale de l’humanité. Cependant, les antagonismes sont à l’origine des sociétés, donc comment amener à la réalisation la paix perpétuelle ? Selon Kant, la Nature a une intentionnalité et elle dirige l’homme vers la paix, en se servant des antagonismes : les hommes, à force de se faire la guerre, vont frôler l’anéantissement et ils seront obligé d’instaurer la paix perpétuelle.
« C’est ainsi que la nature garantit la paix perpétuelle par le mécanisme même des penchants naturels ; et, quoique cette garantie ne soit pas suffisante pour qu’on en puisse prédire (théoriquement) l’avènement, elle suffit au point de vue pratique, et elle nous fait un devoir de tendre à ce but (qui n’est pas purement chimérique). »