Introduction :
La dissertation est redoutée car c’est une épreuve nouvelle pour un élève de classe de première. Si elle est réputée difficile, c’est surtout à cause de ce caractère inédit. Or, il faut savoir que lorsqu’elle est bien traitée, la dissertation permet d’accéder aux meilleures notes de l’examen.
Voici la définition officielle de l’exercice, tel qu’il est présenté par les organisateurs de l’examen : « la dissertation consiste à conduire une réflexion personnelle organisée sur une question littéraire portant sur l’une des œuvres et le parcours associé figurant dans le programme d’œuvres. Le candidat choisit l’un des trois sujets de dissertation, chacun étant en rapport avec l’une des œuvres au programme et son parcours associé. Pour développer son argumentation, le candidat s’appuie sur sa connaissance de l’œuvre et des textes étudiés dans le cadre de l’objet d’étude, ainsi que sur ses lectures et sa culture personnelle. »
En ce dernier point réside la principale difficulté de l’exercice : le correcteur attend une parfaite connaissance de l’œuvre étudiée pendant l’année et du parcours associé ainsi qu’une culture littéraire plus personnelle.
Premier temps : l’analyse du sujet
Premier temps : l’analyse du sujet
Le sujet d’une dissertation littéraire peut se présenter sous deux formes :
- Une citation de l’œuvre suivie d’une question
Exemple 1 : « Moi, j’ai la noblesse du cœur », affirme Julien lors de son procès. Cette formule vous paraît-elle adaptée pour caractériser le héros du roman Le Rouge et le Noir ?
- Une question sans citation
Exemple 2 : Dans le roman de Madame de Lafayette, est-ce la raison qui guide la Princesse de Clèves ?
Exemple 3 : Julien Sorel est-il un personnage romantique ?
Tout d’abord, il faut repérer les mots-clés du sujet et les définir. Ils représenteront la charpente de la dissertation et guideront le raisonnement. C’est dès le début de l’épreuve qu’il faut se fixer un cap cohérent, au risque de faire un hors-sujet. Il faut s’interroger non seulement sur le sens que possèdent ces mots dans le contexte du sujet, mais aussi hors de ce contexte au cas où ils présenteraient une ambiguïté ou une polysémie, pour pouvoir en jouer dans la dissertation.
Voici par exemple les termes clés des trois sujets proposés plus haut et les questions à se poser :
Exemple 1 : L’expression clé est « noblesse du cœur ». Que signifie « noblesse du cœur » de manière générale ? Dans quelles circonstances Julien fait-il preuve de noblesse du cœur ? Le « moi » en tête de phrase a aussi son importance. Pourquoi Julien emploie-t-il ce pronom (il montre que Julien veut se distinguer des autres) ?
Exemple 2 : Les termes clés sont « raison » et « guider ». Que signifie de manière générale « être guidé par la raison » ? Dans le cas de la Princesse de Clèves, à quelles actions de l’héroïne l’expression peut-elle s’appliquer ? À quelles actions ne peut-elle pas l’être ? Que peut-on en conclure sur le personnage ?
Exemple 3 : Le terme « romantique » est à étudier précisément. Fait-on référence ici au romantisme littéraire ou à un romantisme au sens édulcoré actuel, synonyme plutôt de « fleur bleue », de « sensible » ? Quelle signification convient le mieux à Julien ? Pourquoi ?
La question posée, qu’elle soit ou non accompagnée d’une citation de l’œuvre, attend une réponse nuancée puisqu’une dissertation progresse en différentes étapes, chaque grande étape correspondant à une grande partie du plan.
Exemples 1 et 2 : Il faudra étudier les différentes facettes des personnages, montrer en quoi noblesse du cœur et raison ne sont pas leurs seuls moteurs.
Exemple 3 : Il faudra montrer quelles significations du terme « romantique » peuvent correspondre à Julien et si, par certains aspects de sa personnalité, il ne se démarque pas du romantisme.
Ensuite, il faut reformuler la problématique après l’avoir cernée, que ce soit sous la forme d’une question directe ou indirecte. Gardez à l’esprit que la dissertation toute entière est une tentative de réponse à la question.
Exemple 1 : Julien se caractérise-t-il uniquement par la noblesse du cœur ? Est-il sincère ou aveugle lorsqu’il parle ainsi de lui ? Par opposition à qui se définit-il ainsi ?
Exemple 2 : La raison est-elle le seul guide de la princesse ? Quelles autres forces l’animent et comment la princesse tente-t-elle de faire triompher la raison ?
Exemple 3 : En quoi Julien est-il un personnage romantique ? Présente-t-il toutes les caractéristiques des héros représentés dans la littérature romantique ? Est-il seulement romantique en amour ? N’est-il pas parfois opposé aux valeurs du romantisme ?
Deuxième temps : la recherche d’idées
Deuxième temps : la recherche d’idées
L’analyse du sujet a normalement déjà pris un bon quart d’heure. Au bout de quelques minutes, vous aurez trouvé plusieurs pistes possibles pour répondre à la question. Sauf qu’en l’état, ces idées ne valent rien. Il faut les appuyer de références précises à l’œuvre, voire de citations (phrases remarquées pendant l’étude de l’œuvre car particulièrement expressives et révélatrices des grands thèmes qui y sont développés).
Un bon vivier d’exemples susceptibles d’être utilisés se trouve dans les autres textes du corpus ou dans votre culture personnelle. Là, le champ est très large : on ne parle pas nécessairement que de romans, ni même simplement de livres mais aussi de musique, de spectacles, de cinéma, de peinture… Ces références vous permettront d’établir des parallèles, des comparaisons, parfois utiles pour affiner votre propos.
Par exemple, comparer l’attitude de Julien ou de la princesse à un autre personnage peut aider à mieux en définir les particularités, la singularité.
Troisième temps : l’élaboration du plan
Troisième temps : l’élaboration du plan
À ce stade, il est temps de dégager un plan du brouillon. Deux types de plans sont possibles selon le type de question posée : ouverte ou fermée.
Une question fermée appelle comme réponse : oui ou/et non et invite à la confrontation de ces deux positions contradictoires.
Le plan dialectique s’applique au plus grand nombre de sujets. Le devoir doit alors examiner deux aspects opposés du problème, c’est-à-dire peser le pour et le contre. Chaque partie du devoir va donc développer une thèse différente mais complémentaire de l’autre, la seconde thèse venant plutôt nuancer la première que s’y opposer totalement. Chaque paragraphe constituant ces grandes parties va correspondre à un argument étayant une de ces thèses.
Le plan analytique répond à une question ouverte. Regardez la problématique. Si elle est formée sur un modèle du genre : « Pourquoi, selon vous… ? » ou encore « Qu’est-ce qui, selon vous … ? », il s’agit d’une interrogation ouverte qui attend une réponse précise. Dans ce cas, le devoir devra exposer une seule thèse. Et chaque partie correspondra à un argument étayant cette thèse. Il faut donc trouver plusieurs arguments allant dans le sens de cette thèse. Par exemple, ce plan correspondrait au sujet : « Quelle est l’ambition de Julien Sorel ? ». Chaque partie du plan développerait une forme d’ambition (ambition sociale, ambition amoureuse…)
Le plan dialectique ne consiste pas à prouver une chose puis son contraire : il faut réussir à exprimer une pensée suffisamment nuancée pour ne pas se contredire. C’est là toute la difficulté de l’exercice. Concernant la troisième partie, respecter l’adage connu « thèse – antithèse – synthèse » est inutile car la synthèse se fait dans la conclusion et non avant. L’idéal est de trouver une troisième partie qui « botte en touche », c’est-à-dire qui permette de dépasser l’opposition.
Par exemple, pour traiter le sujet : « Est-il juste d’affirmer que Julien Sorel, le héros du roman Le Rouge et le Noir de Stendhal, représente le type même du héros ambitieux ? », on pourrait montrer :
- dans une première partie, que oui, Julien Sorel est le plus souvent mu par son ambition ;
- dans une deuxième partie, montrer qu’il est aussi capable d’émotions sincères dégagées de toute ambition (par exemple, la conquête de madame de Rênal, vécue d’abord comme une conquête sociale, n’est pas dénuée de véritable attachement) ;
- enfin dans une synthèse, on pourrait montrer que l’ambition de Julien n’est qu’une réaction au mépris subit dans son milieu social d’origine et révèle une soif de reconnaissance dont, enfant, il a toujours été privé (c’est en prison par exemple qu’il renoue avec son être profond dégagé de toute ambition).
Une fois le plan déterminé, il faudra construire des parties argumentatives qui développent les thèses et les arguments, en les appuyant, rappelez-vous, sur des exemples précis. Il faut également systématiquement commenter ces exemples. C’est dans ces commentaires que l’expression libre est la plus conseillée. Mais tout ceci se fera au moment de la rédaction, car au brouillon, il faut vous contenter du plan. Rédigez votre plan sur une feuille de brouillon à part. Chaque partie sera composée idéalement de trois sous-parties. Symbolisez-les par des tirets et notez-y les exemples dont vous allez vous servir.
Les titres de vos parties ne doivent pas apparaitre sur votre copie.
Quatrième et dernier temps : la rédaction au propre
Quatrième et dernier temps : la rédaction au propre
Il faut commencer le devoir par une belle introduction, constituée d’un seul paragraphe mais de plusieurs étapes :
- une mise en contexte qui introduit le thème ;
- la citation (si le sujet en comporte une) ;
- la problématique ;
- l’annonce du plan.
N’oubliez pas que chaque paragraphe doit commencer par une phrase introductive, qui annonce l’idée sur le point d’être traitée. Cette idée sera traitée, justement, sur la base d’exemples précis, de citations exactes. Et enfin, le paragraphe devra se terminer par une phrase conclusive, prouvant l’aboutissement du raisonnement. Il est également de bon ton de relier les différentes parties entre elles par des phrases de transition afin de fluidifier la lecture du texte, ce qui est plus agréable pour le correcteur. N’oubliez pas de revenir à la ligne et de marquer un alinéa entre chaque paragraphe, ainsi que de sauter carrément une ligne entre chaque grande partie.
Enfin, la conclusion devra résumer en un seul paragraphe les résultats de la réflexion, mais aussi prendre clairement position si le sujet vous y invite (et c’est souvent le cas). Enfin, il faudra vous efforcer d’élargir la problématique, pourquoi pas par le biais d’une citation si elle est judicieusement choisie. Mais évitez par contre de terminer par une question, le plus souvent sans intérêt ou même complètement hors-sujet.
Ayez le réflexe de TOUJOURS associer un argument (une idée) et un exemple pour le justifier. Pensez toujours : « J’affirme quelque chose ; il faut que je prouve que j’ai raison de l’affirmer ».
La dissertation est une réflexion personnelle, mais n’employez surtout pas la première personne du singulier. Votre implication dans ce que vous écrivez ne doit pas être perçue par le correcteur. Employez des tournures impersonnelles.
Employez des guillemets lorsque vous citez un passage de texte. En français, les guillemets sont « et », les guillemets anglais "et" ne sont utilisés que si l’on a besoin de mettre des guillemets dans un passage déjà entre guillemets. Si vous voulez couper une citation que vous jugez trop longue, symbolisez les mots manquants par […].
Soulignez les titres d’œuvre lorsque vous serez amené à les écrire.
L’orthographe et la syntaxe doivent être particulièrement soignées.
Pensez à garder environ dix minutes en fin d’épreuve pour vous relire.
Conclusion :
Attention au trop fréquent hors-sujet : même si vous avez l’impression d’avoir compris d’emblée ce que l’on attend de vous, ne vous lancez pas dans l’exercice sans avoir rigoureusement identifié et analysé les mots-clés du sujet ET de l’énoncé. Dans cet exercice, le respect des consignes permet d’obtenir une bonne note. Parce que la dissertation est un exercice délicat, la choisir vous apportera les faveurs des correcteurs et les plus hautes notes en cas de réussite. Si vous désirez la tenter au baccalauréat de français, exercez-vous à plusieurs reprises durant votre année de première.