Auteur
Gérard de Nerval
Biographie

Crédit photo : Félix Nadar

Gérard de Nerval, de son vrai nom Gérard Labrunie, est né à Paris en 1808. Sa mère meurt quand il n’a que deux ans alors qu’elle accompagne son mari, médecin militaire de la Grande Armée. Nerval est élevé en Valois, dans la propriété de son oncle maternel.

Au retour de son père en 1814, il le suit à Paris. Il fait des études au collège Charlemagne où il se lie d’amitié avec Théophile Gautier. Cette époque marque le début de sa passion pour l’écriture.

Bientôt, il fréquente les écrivains romantiques du Cénacle, tels que Victor Hugo, Pétrus Borel ou Charles Nodier. En 1830, il prend part à la fameuse « bataille d’Hernani » aux côtés de Théophile Gautier. De 1834 jusqu’à sa mort, Nerval voyage beaucoup, notamment en Orient. Il se mêle à la vie de bohème de l’époque et se serait pris d’une passion désespérée pour l’actrice Jenny Colon.

En 1841, Nerval est atteint d’une première crise mentale. Il apprend la mort de sa bien-aimée en 1842 et, pendant près de dix ans, ne vit que de petits métiers dans l’édition ou dans le journalisme. Mais, en 1853 sa maladie le reprend pour ne plus le quitter : des accès de démence et des séjours chez le docteur Blanche se succèdent. Sa folie lui laisse quelques moments de lucidité, desquels naîtront ses chefs-d’œuvre. Mais le 26 janvier 1855, il est retrouvé pendu dans une rue parisienne.

Bibliographie sélective

Voyage en Orient - (1851)
Sylvie - (1853)
Les Filles du feu - (1854)
Les Chimères - (1854)
Aurélia - (1855)

Œuvre

Nerval écrit son premier recueil de poésies à seize ans. Il est fortement inspiré par les épopées napoléoniennes et la littérature germanique dont il sera un excellent traducteur ; il traduit notamment le Faust de Goethe en 1828.

En 1852, Nerval publie un recueil de récits et portraits intitulé Les Illuminés, dans lequel il se montre fasciné par la question de l’identité dédoublée. En 1853, paraissent ses Odelettes, dont le ton et le style persisteront jusqu’aux Chimères qui regroupent douze sonnets parus à la suite du recueil de nouvelles Filles du feu (1854). Ces textes expriment la nature du mal qui hante Nerval, le mal d’« El Desdichado », égaré dans ses souvenirs et condamné à la quête incessante de son identité.

Écrite en 1853, Sylvie est la plus célèbre nouvelle de Nerval. Il y met en scène un personnage déchiré par sa mémoire et ses fantasmes. Dans la nouvelle Aurélia (1855), Nerval reprend le thème obsessionnel de la double quête de soi et de la femme perdue. Le narrateur s’y laisse aller au songe, à la mélancolie et à la folie, comme pour accéder à l’au-delà.

Nerval partagea avec le romantisme les thèmes de l’Orient, du mythe féminin ou du Moi, mais ne fut jamais annexé à ce mouvement. Il fut un précurseur du symbolisme et du surréalisme.

Citations

« Tout m’était expliqué par ce souvenir à demi rêvé. Cet amour vague et sans espoir, conçu pour une femme de théâtre, qui tous les soirs me prenait à l’heure du spectacle, pour ne me quitter qu’à l’heure du sommeil, avait son germe dans le souvenir d’Adrienne, fleur de la nuit éclose à la pâle clarté de la lune, fantôme rose et blond glissant sur l’herbe verte à demi baignée de blanches vapeurs. — La ressemblance d’une figure oubliée depuis des années se dessinait désormais avec une netteté singulière ; c’était un crayon estompé par le temps qui se faisait peinture, comme ces vieux croquis de maîtres admirés dans un musée, dont on retrouve ailleurs l’original éblouissant.
Aimer une religieuse sous la forme d’une actrice !… et si c’était la même ! — Il y a de quoi devenir fou ! »
Sylvie , 1853

« Je suis le ténébreux — le veuf, — l’inconsolé,
Le prince d’Aquitaine à la tour abolie :
Ma seule Étoile est morte, — et mon luth constellé
Porte le Soleil noir de la Mélancolie. »

« El Desdichado »
Les Chimères , 1854

« Souvent dans l’être obscur habite un Dieu caché ;
Et comme un œil naissant couvert par ses paupières,
Un pur esprit s’accroît sous l’écorce des pierres ! »

« Vers Dorés »
Les Chimères , 1854

« Le Rêve est une seconde vie. Je n’ai pu percer sans frémir ces portes d’ivoire ou de cornes qui nous séparent du monde invisible. Les premiers instants du sommeil sont l’image de la mort ; un engourdissement nébuleux saisit notre pensée, et nous ne pouvons déterminer l’instant précis où le moi, sous une autre forme, continue l’œuvre de l’existence. »
Aurélia , 1855