Crédit photo : Paul Nadar, 1896
José-Maria de Heredia naît à Cuba en 1842. Il est envoyé étudier en France dès l’âge de neuf ans, et y demeure jusqu’en 1859. Il passe ensuite un an à La Havane, où il étudie la littérature espagnole. Il retourne en France pour s’inscrire en faculté de droit. Mais le jeune Heredia préfère la littérature au droit, et se rapproche des poètes parnassiens et notamment de Leconte de l’Isle, qu’il admire beaucoup. Ses poèmes lui valent une certaine notoriété, et ses professeurs le trouvent sérieux et cultivé.
Suite à la parution de son premier recueil de poèmes, il est admis à l’Académie française en 1894. Il y est actif, notamment en tant que membre de la Commission du Dictionnaire, et conservateur de la bibliothèque d’Arsenal. Son engagement pour la littérature se reflète également dans la création de la Société de poètes français, avec Sully Prudhomme. À partir de 1902, sa santé se dégrade, et il décède trois ans plus tard dans son lieu de résidence secondaire, le château de Bourdonné.
Les Trophées - (1893)
José-Maria de Heredia est connu pour ses poèmes, réunis en un seul recueil intitulé Les Trophées, mais aussi pour ses traductions de l’espagnol, et notamment de la Véridique histoire de la conquête de la Nouvelle-Espagne, par le capitaine Bernal Diaz del Castillo.
La poésie de De Heredia appartient à la mouvance esthétique du Parnasse, qui valorise une poésie érudite, sobre, et impersonnelle. Ce mouvement refuse tout engagement social ou politique, reprenant à son compte l’adage de Théophile Gautier : « l’art pour l’art ».
Heredia est avant tout un poète de la mise en scène, qui se sert des mots pour peindre de véritables tableaux. Sa poésie est technique, mais dynamique. Il est loin de la modernité des symbolistes, pour qui l’art n’est pas une représentation du réel, mais le lieu de l’expression du subjectif et de l’intime. La poésie de De Heredia, au contraire, représente des personnages ou des paysages dans un style coloré, très pictural.
« C’est alors qu’apparut, tout hérissé de flèches,
Rouge du flux vermeil de ses blessures fraîches,
Sous la pourpre flottante et l’airain rutilant,
Au fracas des buccins qui sonnaient leur fanfare,
Superbe, maîtrisant son cheval qui s’effare,
Sur le ciel enflammé, l’Imperator sanglant. »
« Soir de bataille »
Les Trophées , 1893
« Pour que le sang joyeux dompte l’esprit morose,
Il faut, tout parfumé du sel des goëmons,
Que le souffle atlantique emplisse tes poumons ;
Arvor t’offre ses caps que la mer blanche arrose. »
« Bretagne »
Les Trophées , 1893
« L’homme et la bête, tels que le beau monstre antique,
Sont entrés dans la mer, et nus, libres, sans frein,
Parmi la brume d’or de l’âcre pulvérin,
Sur le ciel embrasé font un groupe athlétique. »
« Le Bain »
Les Trophées , 1893
« Criblant le dôme obscur, Midi splendide y rôde
Et, sur mes cils mi-clos alanguis de sommeil,
De mille éclairs furtifs forme un réseau vermeil
Qui s’allonge et se croise à travers l’ombre chaude. »
« La Sieste »
Les Trophées , 1893