Crédit photo : Agence de presse Meurice, BNF, 1929
Marcel Aymé naît à Joigny en 1902 dans une famille de six enfants. Sa mère décède lorsqu’il a deux ans, et il est alors élevé par ses grands-parents dans le Jura. Il prépare le concours pour l’école polytechnique, mais ses études sont interrompues lorsqu’il contracte la grippe espagnole en 1919. Après son service militaire, en 1923, il s’installe à Paris et multiplie les petits emplois : il est successivement assureur, journaliste, employé de banque…
Il commence à écrire et publie son premier roman, Brûlebois, en 1926. Pendant la guerre, il n’hésite pas à vendre ses nouvelles et ses romans à des journaux collaborationnistes. Cependant, ses textes n’ayant aucune portée politique, il n’est pas inquiété après la guerre. Marcel Aymé crée pourtant la polémique par sa défense acharnée de son ami Robert Brasillach, qui sera exécuté malgré le soutien de nombreux artistes, ainsi que d’autres personnalités proches de l’extrême-droite, comme Céline et Maurice Bardèche. En 1967, il meurt à Montmartre, où l’on peut aujourd’hui admirer une statue rendant hommage à l’un de ses personnages, le Passe-muraille.
La Jument verte
- (1933) Travelingue - (1941) La Vouivre - (1943) Le Passe-muraille - (1943)
Marcel Aymé est l’auteur de plus d’une quinzaine de romans, de dizaines de nouvelles, et d’une dizaine de pièce de théâtre. Il a également écrit deux essais, dont le plus connu est Le Confort intellectuel, en 1949. En dépit de son statut controversé, Marcel Aymé a toujours remporté un franc succès auprès du public.
Il est également traducteur, notamment des Sorcières de Salem d’Arthur Miller, et a écrit pour la jeunesse, avec ses fameux Contes du chat perché.
Influencé par le Jura de son enfance, plusieurs de ses romans se déroulent dans un univers rural qu’il décrit avec tendresse et amusement. Connu pour son inventivité au point de vue de la langue, il utilise le patois franc-comtois et adapte la langue à chacun de ses personnages, en fonction de son milieu social.
L’une des particularités des œuvres de Marcel Aymé, c’est le surgissement du fantastique dans la vie quotidienne. Dans la nouvelle Le Passe-muraille, par exemple, un employé de bureau se découvre soudain le pouvoir de passer à travers les murs. Le merveilleux est également présent dans La Vouivre, qui reprend une figure de la mythologie populaire franc-comtoise.
L’écrivain dérange par son franc-parler et les portraits sans concessions qu’il dépeint dans ses romans, n’épargnant personne. Il est particulièrement ironique vis-à-vis des intellectuels, qu’il ne manque pas de tourner en dérision, notamment dans son roman Travelingue (1941).
« Il avait considéré avec une espèce d'indulgente bonté les membres de la famille Mindeur vaquant à la besogne, pauvres condamnés à mort, comme lui, et qui s'agitaient, pareils à des mites, dans un pli de l'éternité. Et la Vouivre, tranquille et indifférente, regardait ce monde infime défiler devant elle et marcher vers le bout de son destin, qui était à moins d'un quart d'heure. »
La Vouivre , 1943
« On se mit à parler politique. À travers les propos, la révolution apparaissait comme un film “d'une beauté formidable”, dans une atmosphère de rut et de poète maudit, mais aussi comme une romance tiède, morale et attendrissante. »
Travelingue , 1941
« Quand on parle de l’Art, tout le monde se comprend et personne ne sait au juste de quoi il s’agit. Voilà bien le pire danger. Se comprendre à demi-mot entre initiés tout en ne comprenant rien, c’est, je crois, le véritable mal du siècle — un mal qui n’est peut-être pas particulier à la bourgeoisie, mais dont elle est tout de même seule à crever. »
Le Confort intellectuel , 1949
« Comprendre un travail, c'est l'avoir fait plus qu'aux trois quarts. »
Le Passe-muraille , 1943