BACCALAURÉAT GÉNÉRAL
SESSION 2016
PHYSIQUE-CHIMIE
Série : S
Durée de l’épreuve : 3 heures 30. Coefficient : 6
ENSEIGNEMENT OBLIGATOIRE |
L’usage de la calculatrice est autorisé
Ce sujet comporte trois exercices.
Le candidat doit traiter les trois exercices qui sont indépendants les uns des autres.
EXERCICE I : DE L’EFFET DOPPLER À SES APPLICATIONS (6 points)
Christian Doppler, savant autrichien, propose en 1842 une explication de la modification de la fréquence du son perçu par un observateur immobile lorsque la source sonore est en mouvement. Buys-Ballot, scientifique hollandais, vérifie expérimentalement la théorie de Doppler en 1845, en enregistrant le décalage en fréquence d’un son provenant d’un train en mouvement et perçu par un observateur immobile.
On se propose de présenter l’effet Doppler puis de l’illustrer au travers de deux applications.
1. Mouvement relatif d’une source sonore et d’un détecteur
Nous nous intéressons dans un premier temps au changement de fréquence associé au mouvement relatif d’une source sonore S et d’un détecteur placé au point M (figure 1). Le référentiel d’étude est le référentiel terrestre dans lequel le détecteur est immobile. Une source S émet des « bips » sonores à intervalles de temps réguliers dont la période d’émission est notée $T_0$. Le signal sonore se propage à la célérité $v_{son}$ par rapport au référentiel terrestre.
Figure 1. Schéma représentant une source sonore immobile (cas A), puis en mouvement (cas B).
1.1. Cas A :la source S est immobile en $x = 0$ et le détecteur M, situé à la distance d, perçoit chaque bip sonore avec un retard lié à la durée de propagation du signal.
1.1.1. Définir par une phrase, en utilisant l’expression « bips sonores », la fréquence $f_0$ de ce signal périodique.
1.1.2. Comparer la période temporelle T des bips sonores perçus par le détecteur à la période d’émission $T_0$.
1.2. Cas B : la source S, initialement en $x = 0$, se déplace à une vitesse constante $V_S$ suivant l’axe $Ox$ en direction du détecteur immobile. La vitesse vS est inférieure à la célérité vson. On suppose que la source reste à gauche du détecteur.
Le détecteur perçoit alors les différents bips séparés d’une durée $T'=T_0 ( 1-\frac{V_s}{V_{son}} )$
Indiquer si la fréquence f ’ des bips perçus par le détecteur est inférieure ou supérieure à la fréquence $f_0$ avec laquelle les bips sont émis par la source S. Justifier.
2. La vélocimétrie Doppler en médecine
La médecine fait appel à l’effet Doppler pour mesurer la vitesse d’écoulement du sang dans les vaisseaux sanguins (figure 2).
Un émetteur produit des ondes ultrasonores qui traversent la paroi d’un vaisseau sanguin. Pour simplifier, on suppose que lorsque le faisceau ultrasonore traverse des tissus biologiques, il rencontre :
- des cibles fixes sur lesquelles il se réfléchit sans modification de la fréquence ;
- des cibles mobiles, comme les globules rouges du sang, sur lesquelles il se réfléchit avec une modification de la fréquence ultrasonore par effet Doppler (figure 3).
Figure 2. Vitesse moyenne du sang dans différents vaisseaux sanguins.
Figure 3. Principe de la mesure d’une vitesse d’écoulement sanguin par effet Doppler (échelle non respectée).
L’onde ultrasonore émise, de fréquence $f_E = 10\ \text{MHz}$, se réfléchit sur les globules rouges qui sont animés d’une vitesse v. L’onde réfléchie est ensuite détectée par le récepteur.
La vitesse v des globules rouges dans le vaisseau sanguin est donnée par la relation $V=\frac{V_{ultrason}}{2cos\theta}.\frac{\Delta f}{f_E}$ où $\Delta f$ est le décalage en fréquence entre l’onde émise et l’onde réfléchie, $V_{ultrason}$ la célérité des ultrasons dans le sang et $\theta$ l’angle défini sur la figure 3.
On donne $v_\text{ultrason} = 1,57 × 103\ \text{m} \cdot \text{s}^{-1}$ et $\theta= 45\degree$.
2.1. Le décalage en fréquence mesuré par le récepteur est de 1,5 kHz. Identifier le(s) type(s) de vaisseaux sanguins dont il pourrait s’agir.
2.2. Pour les mêmes vaisseaux sanguins et dans les mêmes conditions de mesure, on augmente la fréquence des ultrasons émis $f_E$. Indiquer comment évolue le décalage en fréquence $\Delta\ f$. Justifier.
3. Détermination de la vitesse d’un hélicoptère par effet Doppler
On s’intéresse à un son émis par un hélicoptère et perçu par un observateur immobile. La valeur de la fréquence de l’onde sonore émise par l’hélicoptère est $f_0 = 8,1 \times 10^2\ \text{Hz}$. On se place dans le référentiel terrestre pour toute la suite de cette partie.
Les portions de cercles des figures 4 et 5 ci-dessous donnent les maxima d’amplitude de l’onde sonore à un instant donné. Le point A schématise l’hélicoptère. Dans le cas de la figure 4, l’hélicoptère est immobile. Dans le cas de la figure 5, il se déplace à vitesse constante le long de l’axe et vers l’observateur placé au point O. La célérité du son dans l’air est indépendante de sa fréquence.
Figure 4. L’hélicoptère est immobile.
Figure 5. L’hélicoptère est en mouvement.
3.1. Déterminer, avec un maximum de précision, la longueur d’onde $\lambda_0$ de l’onde sonore perçue par l’observateur lorsque l’hélicoptère est immobile, puis la longueur d’onde $\lambda'$ lorsque l’hélicoptère est en mouvement rectiligne uniforme.
3.2. En déduire une estimation de la valeur de la célérité de l’onde sonore. Commenter la valeur obtenue.
3.3. Déterminer la fréquence du son perçu par l’observateur lorsque l’hélicoptère est en mouvement. Cette valeur est-elle en accord avec le résultat de la question 1.2. ? Comment la perception du son est-elle modifiée ?
3.4. En déduire la valeur de la vitesse de l’hélicoptère. Cette valeur vous paraît-elle réaliste ?
EXERCICE II : DE LA BETTERAVE SUCRIÈRE AUX CARBURANTS (9 POINTS)
Le sucre produit dans les feuilles de betteraves sucrières grâce à la photosynthèse s'accumule dans la racine sous forme de saccharose. Le bioéthanol - éthanol issu de l’agriculture - peut notamment être obtenu par fermentation du sucre extrait des racines de betterave sucrière. Le bioéthanol peut être incorporé à l’essence utilisée par un grand nombre de moteurs de voiture.
Dans cet exercice, on s’intéresse au saccharose présent dans la betterave sucrière, à la production d’éthanol par fermentation du saccharose et à l’utilisation du bioéthanol dans les carburants.
Betterave sucrière récoltée dans la région de la Beauce
Données :
- économie betteravière en France pour la récolte 2009 :
- rendement de la culture de betterave sucrière ; 74,8 tonnes par hectare ;
- pourcentage massique moyen de saccharose dans la betterave : 19,5 %
- surface agricole française cultivée ;environ 10 millions d’hectares ;
- masse volumique de l’éthanol : $\rho = 789 \times 103\ \text{g}\cdot \text{m}^{-3}$;
- masses molaires moléculaires : $M (éthanol) = 46,0\ \text{g} \cdot \text{mol}^{-1}$; $M (saccharose) = 342,0 \text{g} \cdot \text{mol}^{-1}$;
- électronégativités comparées $\chi$ de quelques éléments : $\chi (O)>\chi (C)$,$\chi (C)$ environ égale à $\chi (H)$ ;
- données de spectroscopie infrarouge :
Liaison | O–H libre | O–H lié | N–H | C–H | C=O | C=C |
Nombre d’onde $\sigma (\text{en cm}^{-1})$ | 3600 Bande fine | 3200 – 3400 Bande large | 3100 – 3500 | 2700 – 3100 | 1650 – 1750 | 1625 – 1685 |
- formules topologiques de quelques sucres :
1. Étude de la structure du saccharose
Le saccharose est formé à partir du D-Glucose et du D-Fructose.
1.1. Écrire la formule développée de la forme linéaire du D-Glucose, puis identifier par un astérisque les atomes de carbone asymétriques.
Par réaction entre deux de ses groupes caractéristiques, la forme linéaire du D-Glucose peut se transformer en l’une ou l’autre de ses formes cycliques lors d’une réaction de cyclisation. En solution aqueuse à 25 °C, il s’établit un équilibre entre les différentes formes du glucose avec les proportions suivantes : 65 % de $\beta$-(D)-Glucose, 35 % de $\alpha$-(D)-Glucose et environ 0,01 % de forme linéaire de D-Glucose. Le mécanisme de la cyclisation (cf : document de la question 1.2), il peut conduire à l’un ou l’autre des stéréoisomères cycliques.
1.2. Dans un mécanisme réactionnel apparaissent usuellement des flèches courbes ; que représentent- elles ? Compléter les trois étapes du mécanisme de cyclisation du D-Glucose figurant dans le document ci-dessous avec les flèches courbes nécessaires.
Mécanisme réactionnel de cyclisation du D-Glucose :
1.3. Le spectre infrarouge obtenu par analyse d’un échantillon de glucose est fourni ci-dessous. Ce spectre confirme-t-il la très faible proportion de la forme linéaire dans le glucose ? Justifier.
Source : National Institute of Advanced Industrial Science and Technology – http://sdbs.db.aist.go.jp
1.4. Les formes linéaires du D-Glucose et du D-Fructose sont-elles stéréoisomères ? Justifier.
1.5. À partir de quelles formes cycliques du D-Glucose et du D-Fructose le saccharose est-il formé ?
Le saccharose contenu dans 30 g de betterave sucrière est extrait avec de l’eau grâce à un montage à reflux. À la fin de l’extraction, on recueille une solution aqueuse S qui contient 5,8 g de saccharose.
1.6. L’eau est un solvant adapté à cette extraction. Proposer une explication à la grande solubilité du saccharose dans ce solvant.
On hydrolyse ensuite, en milieu acide, le saccharose contenu dans la solution S. L’hydrolyse peut être modélisée par une réaction d’équation :
$$C_{12}H_{22}O_{11} (aq)+H_2O(l) \rightarrow C_6H{12}O_6(aq)+C_6H_{12}O_6(aq)$$ $$saccharose + eau\rightarrow glucose + fructose$$ On suppose que la transformation est totale, que l’eau est en excès et qu’initialement la betterave ne contenait ni glucose ni fructose.
1.7. Émettre une hypothèse sur le rôle de l’acide utilisé lors de cette hydrolyse et proposer une expérience simple permettant de la tester.
On a réalisé la chromatographie du saccharose, du D-Glucose et du D-fructose. Le chromatogramme obtenu est donné et schématisé en question 1.8. Tous les chromatogrammes de ce document (cf : question 1.8) sont supposés réalisés dans les mêmes conditions expérimentales que celui qui est photographié.
1.8. Représenter, sur le document ci-dessous, l’allure du chromatogramme obtenu après élution et révélation, sachant que :
- le dépôt A est un échantillon du milieu réactionnel avant hydrolyse du saccharose ;
- le dépôt B est un échantillon du milieu réactionnel au cours de l’hydrolyse du saccharose ;
- le dépôt C est un échantillon du milieu réactionnel après hydrolyse complète du saccharose.
2. Du saccharose au bioéthanol
La fermentation alcoolique des jus sucrés sous l'action de micro-organismes est une source de production d'alcools. Dans le cas de la betterave sucrière, la solution de saccharose (jus sucré) extrait de la betterave fermente pour produire de l’éthanol (bioéthanol) et du dioxyde de carbone selon la réaction supposée totale d’équation :
$$C_{12}H_{22}O_{11} (aq)+H_2O(l) \rightarrow 4C_2H_6O(aq)+4CO_2(aq)$$
2.1. Écrire la formule semi-développée de l’éthanol.
2.2. Attribuer à la molécule d’éthanol l’un des deux spectres de RMN proposés ci-dessous. Justifier.
Source : National Institute of Advanced Industrial Science and Technology – http://sdbs.db.aist.go.jp
2.3. Déterminer la masse d’éthanol obtenu par la fermentation du saccharose contenu dans une betterave sucrière de masse 1,25 kg.
L’objectif de cette partie est de déterminer la surface agricole à mettre en culture avec de la betterave sucrière pour que la France devienne autosuffisante en bioéthanol.
On fait l’hypothèse que la totalité du parc automobile utilise du carburant contenant du bioéthanol obtenu à partir du saccharose extrait de la betterave. Dans cette hypothèse, on estime que le volume de bioéthanol nécessaire au fonctionnement du parc automobile pendant un an est de l’ordre de $3 \times 10^6\ \text{m}^3$.
Montrer que la masse de betteraves sucrières qu’il faut pour produire ce volume de bioéthanol est de l’ordre de $2 \times 10^7$ tonnes. En déduire l’ordre de grandeur de la surface agricole nécessaire à cette production de betteraves sucrières. Comparer avec la surface agricole française cultivée de 2009.
Le candidat est invité à prendre des initiatives et à présenter la démarche suivie, même si elle n’a pas abouti. La démarche est évaluée et nécessite d’être correctement présentée.
EXERCICE III :COUCHER DE SOLEILS SUR TATOOINE (5 points)
Image du film Star Wars Episode IV : A new hope (© Lucasfilm Ltd) Luke Skywalker marchant au coucher de soleils.
Dans la saga Star Wars, deux héros, Luke et Anakin Skywalker, ont passé leur enfance sur la planète Tatooine. Cette planète désertique a la particularité d’être en orbite autour de deux étoiles : Tatoo 1 et 2.
On se propose de déterminer quelques caractéristiques de cette planète et de ses deux étoiles à partir de données extraites du film.
Données :
- masse et rayon du Soleil et de la Terre :
Soleil | Terre | |
Masse (kg) | $2,0 \times 10^{30}$ | $6,0\times10^{24}$ |
Rayon (km)%C% | $7,0\times10^{5}$ | $6,4\times10^{3}$ |
- constante gravitationnelle : $G = 6,67 \times 10^{-11} m^3\cdot s^{-2}\cdot kg^{-1}$ ;
- volume d’une sphère de rayon r : $V=\frac{4}{3} \pi r^3$ .
L’orbite de Tatooine
Impossible d'évoquer la célèbre planète Tatooine, repère de brigands galactiques sur lequel règne le fameux Jabba le Hutt, sans parler de ses deux soleils (ou étoiles).
Cette particularité n'est pas si étonnante quand on considère que les deux tiers des étoiles visibles à l'œil nu font partie d'un système multiple. Le problème n'est donc pas de trouver une étoile double, mais de comprendre comment une planète peut évoluer dans un tel système.
(…) L'orbite de Tatooine pourrait englober ses deux soleils à la fois. Ce type d'orbite n'est stable que si la distance qui sépare la planète de ses soleils est au moins quatre fois plus grande que celle qui sépare les étoiles. Du point de vue de la planète, tout se passe comme si les étoiles ne faisaient qu'une. Peut-on estimer le rayon de l'orbite de Tatooine ? Oui, bien sûr !
(…) Remarquons d'abord que les deux étoiles sont assez semblables à notre Soleil : l'une est jaune et l'autre est orange, laissant supposer qu'elle est un peu plus froide. Si ces deux étoiles étaient trop proches l'une de l'autre, elles devraient être déformées par leur gravité mutuelle. Comme aucune déformation n'est perceptible dans la scène du coucher des soleils, on peut calculer que leur distance est légèrement supérieure à 10 millions de kilomètres. Pour avoir une orbite stable Tatooine doit donc être distante de ces deux étoiles d'au moins 40 millions de kilomètres. En fait, elle ne doit pas être si près, sous peine d'être vraiment trop chaude et totalement inhabitable. Deux cent millions de kilomètres est une bonne position : à cette distance Tatooine reçoit une énergie lumineuse un peu supérieure à celle qui frappe la Terre, ce qui expliquerait son aspect désertique.
D’après Carte blanche à Roland Lehoucq, astrophysicien, http://www.knowtex.com/nav/les-secrets-de-star-wars_26418
1. Les étoiles Tatoo 1 et Tatoo 2
1.1. En supposant que Tatoo 1 et Tatoo 2 ne sont pas déformées et sont à égale distance de Tatooine, montrer, en s’appuyant sur la photo et sur le texte, que la valeur du rayon de chacune des deux étoiles est environ égale à deux millions de kilomètres. Justifier avec soin la démarche utilisée.
On adoptera pour la suite de l’exercice cette valeur commune pour le rayon des deux étoiles.
1.2. En supposant que les deux étoiles ont la même masse volumique moyenne que le Soleil, évaluer l’ordre de grandeur de la masse $M_{\text{Tatoo}}$ de Tatoo (1 ou 2). Commenter le résultat obtenu.
2. Tatooine en orbite
Du point de vue de Tatooine, tout se passe comme si les étoiles ne faisaient qu'une, l’étoile unique équivalente sera appelée Tatoo 1-2 ; sa masse sera prise égale à $9,5 \times 10^{31}$ kg.
2.1. Justifier la phrase précédente à l’aide d’informations données dans le texte.
2.2. Faire un schéma du système Tatooine-Tatoo 1-2 et représenter sans souci d’échelle la force d’attraction gravitationnelle exercée par Tatoo 1-2 sur Tatooine ainsi que le vecteur accélération de la planète Tatooine dans le référentiel lié à Tatoo 1-2 considéré comme galiléen.
2.3. Montrer que le mouvement, supposé circulaire, de la planète dans ce référentiel est uniforme.
2.4. Déduire des résultats précédents et du texte, la valeur de la période de révolution de Tatooine. Comparer cette valeur à la période de révolution de la Terre autour du Soleil.