BACCALAURÉAT GÉNÉRAL
SESSION 2019
PHYSIQUE-CHIMIE
Série : S
Durée de l’épreuve : 3 heures 30. Coefficient : 6
ENSEIGNEMENT DE SPÉCIALITÉ |
L'usage de tout modèle de calculatrice, avec ou sans mode examen, est autorisé.
Ce sujet ne nécessite pas de feuille de papier millimétré.
Ce sujet comporte trois exercices.
Le candidat doit traiter les trois exercices qui sont indépendants les uns des autres.
EXERCICE I - DE LA NOIX DE MUSCADE À LA COSMÉTIQUE (9 points) |
La noix de muscade contient divers triglycérides dont la trimyristine qui permet d’obtenir le myristate d’isopropyle. Ce dernier trouve de nombreuses utilisations en cosmétique et entre dans la composition de ce qu’on appelle « l’alcool des parfumeurs », support de dilution très utilisé en parfumerie.
Le but de cet exercice est de comprendre comment, à partir de la trimyristine extraite de noix de muscade, on peut obtenir l’acide myristique nécessaire à l’obtention du myristate d’isopropyle.
Données :
- données physico-chimiques :
- solubilité de la trimyristine et de l’acide myristique dans quelques solvants usuels :
- électronégativité de quelques atomes :
pour le couple acide myristique/ion myristate : $\text{p}K_\text{a} (\text{RCOOH} / \text{RCOO}^-) \approx 5$ ;
le degré de pureté $d$ d’un produit dans un échantillon est le rapport entre la masse du produit contenu dans l’échantillon et la masse de l’échantillon soit : $$d = \dfrac{\text{masse du produit contenu dans l’\'echantillon}}{\text{masse de l’\'echantillon H}_2\text{C}}$$
la trimyristine est un triglycéride dont on donne une représentation ci-dessous.
Les trois groupes identiques, notés $\text{R}$, sont de longues chaînes carbonées ;
- le pourcentage massique en trimyristine dans la poudre de noix de muscade est compris entre $20\ \%$ et $25\ \%$.
Extraction de la trimyristine à partir de la noix de muscade
Extraction de la trimyristine à partir de la noix de muscade
Une masse de trimyristine $m_{\text{trimyristine}} = 4,75\ \text{g}$ a été extraite de $20,0\ \text{g}$ de noix de muscade en utilisant le protocole décrit ci-dessous.
Étape 1 : dans un ballon de $250\ \text{mL}$, mélanger $20,0\ \text{g}$ de poudre de noix de muscade et $100\ \text{mL}$ de dichlorométhane. Chauffer à reflux pendant $30$ minutes.
Étape 2 : filtrer sous hotte aspirante le contenu du ballon et rincer ce dernier avec $20\ \text{mL}$ de dichlorométhane. Évaporer le solvant à l’aide d’un montage de distillation simple. Le ballon contient alors environ $10\ \text{mL}$ de liquide jaune huileux.
Étape 3 : ajouter progressivement $50\ \text{mL}$ de propanone dans le ballon afin de dissoudre à chaud le contenu du ballon. Quand la solution est devenue homogène, placer le ballon dans un bain d’eau glacée. On observe progressivement la formation d’un solide blanc.
Étape 4 : filtrer sur Büchner, sécher à l’étuve le solide blanc obtenu et mesurer sa masse.
1.1. Donner deux arguments qui peuvent justifier l’utilisation du dichlorométhane plutôt que de l’éthanol lors des étapes 1 et 2 du protocole.
1.2. Justifier l’observation faite dans l’étape 3.
1.3. La masse de trimyristine obtenue est-elle en accord avec les données ? Justifier.
Obtention de l’acide myristique
Obtention de l’acide myristique
La totalité de la trimyristine extraite précédemment est utilisée pour synthétiser l’acide myristique.
Pour effectuer cette synthèse, on fait tout d’abord réagir la trimyristine avec un excès d’ions hydroxyde selon la réaction dont l’équation est donnée ci-dessous :
2.1. Donner la formule semi-développée du glycérol également nommé propan-1,2,3-triol.
2.2. À partir des données, retrouver la formule brute des trois groupements $\text{R}$.
La trimyristine contient trois fonctions ester. On donne ci-après une des étapes du mécanisme de la réaction entre un ester et l’ion hydroxyde :
2.3. Recopier cette étape sur votre copie et représenter les flèches courbes rendant compte du mécanisme. Citer la catégorie de réaction de cette étape.
On fait ensuite réagir les ions myristate avec des ions oxonium $\text{H}_3\text{O}^+$ apportés par de l’acide chlorhydrique à $1,0\ \text{mol}\cdot\text{L}^{-1}$ jusqu’à ce que la solution atteigne un $\text{pH}$ voisin de $1$. L’équation de la réaction est donnée ci-dessous :
2.4. Donner, en justifiant la réponse, la forme prédominante du couple acide myristique/ion myristate en fin d’ajout de l’acide chlorhydrique.
2.5. À la fin de la synthèse et après séchage, on obtient $m = 3,36\ \text{g}$ de produit. On considère dans ce premier temps que ce produit est pur, c’est-à-dire uniquement constitué d’acide myristique.
2.5.1. Déterminer la quantité de matière maximale d’acide myristique que l’on pourrait obtenir à l’issue de la synthèse.
2.5.2. Déterminer le rendement de cette synthèse de l’acide myristique à partir de la trimyristine.
Détermination par titrage de la pureté de l’acide myristique obtenu
Détermination par titrage de la pureté de l’acide myristique obtenu
En réalité le produit obtenu n’est pas forcément pur. Afin d’estimer la pureté du produit obtenu lors de la synthèse précédente, on en prélève un échantillon de masse $m_{\text{\'ech}} = 1,14 ± 0,01\ \text{g}$. Cet échantillon est entièrement dissout dans un solvant approprié pour préparer une solution appelée $S_1$ dans une fiole jaugée de volume $V_0 = 100,00 ± 0,08\ \text{mL}$.
On réalise le titrage acido-basique suivi par colorimétrie d’une prise d’essai $V_1 = 10,00 ± 0,05\ \text{mL}$ de la solution $S_1$ par une solution d’hydroxyde de sodium, $(\text{Na}^+_{(\text{aq})} + \text{HO}^-_{(\text{aq})})$, de concentration molaire égale à $C_2 = (5,00 ± 0,01) \times 10^{-2}\ \text{mol}\cdot\text{L}^{-1}$. Lors de ce titrage, l’équivalence est obtenue pour un volume versé $V_E = 9,60 ± 0,05\ \text{mL}$.
3.1. Écrire l’équation de la réaction support du titrage de l’acide myristique par l’hydroxyde de sodium.
3.2. Déterminer la concentration massique d’acide myristique de la solution titrée.
3.3. En déduire la masse d’acide myristique $m_{\text{exp}}$ présente dans la solution $S_1$.
3.4. On admet que, dans les conditions de l’expérience, l’incertitude relative $\dfrac{\text{U}(m_{\text{exp}})}{m_{\text{exp}}}$ satisfait à la relation :
Proposer un encadrement de la masse $m_{\text{exp}}$ d’acide myristique et comparer avec la masse initialement dissoute $m_{\text{\'ech}}$ dans la solution $S_1$. Commenter.
3.5. Déterminer le degré de pureté du produit synthétisé.
EXERCICE II - DÉCOLLAGE DE LA FUSÉE ARIANE 5 (6 points) |
La propulsion de la fusée Ariane 5 est assurée par :
- un étage principal cryotechnique (EPC) constitué du moteur Vulcain, de puissance transmise à la fusée de l’ordre de $10\ \text{MW}$ en moyenne au cours des deux premières secondes du décollage ;
- deux boosters (étages d’accélération à poudre EAP) qui contribuent à environ $90\ \%$ de la puissance totale transmise à la fusée au début du décollage.
Figure 1. Représentation d’un modèle de la fusée Ariane 5 d’après CNES.fr
Le but de cet exercice est de vérifier certaines des caractéristiques de la fusée Ariane 5 à partir d’une chronophotographie de son décollage.
Données :
- intensité de la pesanteur : $g = 9,8\ \text{m}\cdot\text{s}^{-2}$ ;
- débit massique d’éjection de gaz du moteur Vulcain : $270\ \text{kg}\cdot\text{s}^{-1}$ ;
- débit massique d’éjection de gaz de chaque booster : $1,8\times 10^3\ \text{kg}\cdot\text{s}^{-1}$ ;
- caractéristiques des différentes fusées Ariane :
- La poussée, qui s’exprime en kilonewton $(\text{kN})$, est une action qui s’exerce sur la fusée. C’est l’action de réaction des gaz éjectés au cours de la combustion du carburant. Au décollage, cette action est modélisée par une force verticale et orientée vers le haut.
Figure 2. Chronophotographie du début du décollage d’Ariane 5
Pour faciliter les mesures, les différentes images de la fusée ont été décalées horizontalement les unes par rapport aux autres.
L’étude de cette chronophotographie donne les résultats suivants. L’axe vertical a pour origine la base de la fusée.
Figure 3. Détermination expérimentale de la position et de la vitesse de la fusée
L’image 1 de la figure 2 précise l’endroit de la fusée qui sert à repérer son mouvement vertical. Son ordonnée sur l’axe des $y$ est notée $y_1$.
Estimation de la poussée
Estimation de la poussée
1.1. Calculer la masse des gaz éjectés pendant la durée de l’étude, soit $2,40\ \text{s}$. La comparer à la masse au décollage de la fusée. Commenter.
On considère dans la suite de l’exercice que la masse totale de la fusée est constante pendant la durée de l’étude.
1.2. Estimer, à l’aide de la figure 2, la valeur de $y_5$. Détailler la démarche.
1.3. On donne en figure 4 le graphe représentant l’évolution de la vitesse de la fusée au cours du temps.
Figure 4. Évolution de la valeur de la vitesse de la fusée au cours du temps
1.3.1. Estimer, à l’aide du tableau de la figure 3, la valeur de $v_2$. Détailler la démarche et vérifier que ce résultat est cohérent avec le graphe de la figure 4.
1.3.2. Montrer que la valeur de l’accélération de la fusée pendant la durée de l’étude est proche de $7\ \text{m}\cdot\text{s}^{-2}$.
1.3.3. Préciser, en justifiant, la direction et le sens du vecteur accélération de la fusée.
1.4. Choisir parmi les propositions de la figure 5, le schéma compatible avec le décollage de la fusée. Justifier.
Figure 5. Propositions de représentation des forces s’appliquant sur la fusée qui vient de quitter le sol
1.5. À partir des résultats précédents, estimer la valeur de la force de poussée. Vérifier la cohérence de ce résultat avec les données.
Estimation de la puissance totale développée par la fusée Ariane 5 au début du décollage
Estimation de la puissance totale développée par la fusée Ariane 5 au début du décollage
En utilisant les données sur la fusée Ariane 5 et le tableau de la figure 3, estimer la puissance moyenne fournie à la fusée par l’ensemble {moteur Vulcain + boosters} pendant les deux secondes de l’étude comprises entre $0,2\ \text{s}$ et $2,2\ \text{s}$.
Comparer cette valeur avec les données du texte d’introduction.
Le candidat est invité à prendre des initiatives et à présenter la démarche suivie même si elle n’a pas abouti. La démarche suivie est évaluée et nécessite donc d’être correctement présentée.
EXERCICE III – ACCORDER UN DIAPASON (5 points) |
Un groupe de quatre élèves dispose de quatre diapasons en aluminium ayant des branches de même largeur $d = 7\ \text{mm}$ et de longueurs $L$ différentes. L’un de ces diapasons est représenté sur la figure 1. En modifiant la largeur des branches ou leur longueur, il est possible d’ajuster la fréquence du son émis par le diapason.
Le but de cet exercice est de comprendre comment on peut modifier ces quatre diapasons afin qu’ils émettent tous un son de fréquence $f = 440\ \text{Hz}$, c'est-à-dire un $\text{la}_3$.
Figure 1.
Chaque élève a enregistré le son émis par les quatre diapasons (numérotés de $\boxed{1}$ à $\boxed{4}$) à l’aide d’un microphone relié à un ordinateur. Le signal obtenu a permis de déterminer la fréquence du son émis par chacun des diapasons.
Le tableau 1 ci-dessous regroupe les résultats obtenus et fait le lien entre la fréquence $f$ du son émis et la longueur $L$ des branches du diapason.
Tableau 1.
En utilisant un modèle théorique, on peut établir qu’un diapason en aluminium dont les branches ont une largeur $d$ et une longueur $L$ émet un son de fréquence $f$ telle que :
$$f=0,16\times \sqrt{\frac{\text{E}_\text{A}}{\rho_\text{A}}} \times \dfrac{d}{L^2}$$
où :
- $\text{E}_\text{A}$ (en $\text{kg}\cdot\text{m}^{-1}\cdot\text{s}^{-2}$) est une constante caractéristique de l’aluminium ;
- $\rho_\text{A}$ (en $\text{kg}\cdot\text{m}^{-3}$) est la masse volumique de l’aluminium ;
- $f$, $d$ et $L$ sont exprimées dans les unités de base du Système International.
Lorsqu’il est tenu à la main, le son produit par le diapason est difficilement audible. Pour le rendre pur et l’amplifier, Albert Marloye eut l’idée, en 1839, de poser la base du diapason sur une caisse de résonance. Il s’agit d’une boîte en bois ouverte à l’une de ses extrémités (figure 2 ci-contre). Dans le cadre d’un modèle simplifié, une onde sonore sinusoïdale de longueur d’onde $\lambda$ est amplifiée par la caisse à condition que la profondeur $D$ de la cavité interne soit un multiple entier impair de $\frac{\lambda}{4}$ (exemples $\frac{\lambda}{4}$ ; $\frac{3\lambda}{4}$ ; $\frac{5\lambda}{4}$ ; etc.).
Figure 2.
La vitesse du son dans l’air dépend de la température selon la courbe ci-dessous.
Figure 3. Valeur de la vitesse du son dans l’air en fonction de la température de l’air
Questions préliminaires
1. Montrer, par une analyse dimensionnelle, que la formule (1) est homogène et qu’elle est compatible
avec les mesures du tableau 1.
2. Déterminer la longueur d’onde d’un son de fréquence $440\ \text{Hz}$ se propageant dans l’air à $25\degree\text{C}$.
Problème
Dans un atelier disposant d’outils de précision, on peut couper les branches d’un diapason en aluminium à la longueur $L$ désirée ou diminuer la largeur $d$ des branches. On peut également y fabriquer des caisses de résonance en bois.
On dispose des quatre diapasons numérotés de $\boxed{1}$ à $\boxed{4}$. Indiquer la ou les instruction(s) à donner à l’atelier pour que chacun des quatre diapasons émette un son de fréquence $f = 440\ \text{Hz}\ (\text{la}_3)$ amplifié de façon optimale par une caisse de résonance en bois. Le dispositif sera utilisé dans une salle à $25\degree\text{C}$.