La Méditerranée : un espace de contacts entre trois civilisations
Introduction :
Au Moyen Âge, l’Empire byzantin, les royaumes chrétiens d’Occident et l’Empire arabo-musulman s’étendent autour de la Méditerranée. Les contacts, qu’ils soient guerriers, culturels ou marchands entre ces trois civilisations sont permanents.
Dans ce cours, nous allons étudier les différentes relations qui se nouent entre les trois grandes civilisations du bassin méditerranéen, entre le VIe et le XIIIe siècle.
Dans une première partie, nous étudierons les violents affrontements qui opposent chrétiens et musulmans et, à certaines occasions, orthodoxes de l’Empire byzantin et catholiques des royaumes chrétiens d’Occident. Dans une deuxième partie, nous nous intéresserons aux intenses échanges commerciaux qui rapprochent ces civilisations. Enfin, dans une dernière partie, nous verrons que les échanges culturels sont multiples entre les chrétiens et les musulmans.
Des affrontements violents : les guerres saintes
Des affrontements violents : les guerres saintes
Les chrétiens d’Occident sont catholiques, tandis que les chrétiens d’Orient, les Byzantins, sont orthodoxes. Il s’agit de deux branches distinctes de la religion chrétienne. La religion officielle de l’Empire arabo-musulman est l’islam.
Les guerres saintes, guerres menées au nom de la religion, se développent en Méditerranée à partir du XIe siècle.
En Espagne et au Proche-Orient, le royaume chrétien d’Occident affronte l’Empire arabo-musulman.
En Espagne, la Reconquista
En Espagne, la Reconquista
Au XIe siècle, les rois catholiques d’Espagne se lancent à la reconquête des territoires tombés aux mains des musulmans quatre siècles plus tôt : c’est le début de la Reconquista.
Progressivement, les catholiques repoussent les musulmans du nord vers le sud de la péninsule.
La victoire chrétienne de Las Navas de Tolosa, en 1212, marque le début de la reconquête de l’Andalousie. La Reconquista s’achèvera par la prise de Grenade, en 1492.
La première croisade (1096-1099)
La première croisade (1096-1099)
Le XIe siècle marque aussi l’expansion des Turcs musulmans en Orient. Cette avancée est une véritable source d’inquiétude pour les chrétiens d’Occident, qui craignent de ne plus pouvoir se rendre en pèlerinage en Terre sainte.
Le 27 novembre 1095, le pape Urbain II appelle à la croisade pour délivrer le tombeau du Christ.
Des milliers de chevaliers chrétiens répondent à l’appel du pape et la première croisade débute au printemps 1096.
Les croisés prennent Jérusalem en 1099. Ils s’installent en Syrie-Palestine, et créent les États latins d’Orient.
États latins d’Orient :
États créés puis administrés au Proche-Orient par les chrétiens d’Occident, au lendemain de la première croisade.
Godefroy de Bouillon est l’un des premiers croisés. Il fait partie de ceux qui prennent Jérusalem. Il meurt en Terre sainte en 1100.
Mort de Godefroy de Bouillon, XIXe siècle, palais de Versailles
Les autres croisades (XIIe-XIIIe siècles)
Les autres croisades (XIIe-XIIIe siècles)
À partir de la fin du XIIe siècle, le chef musulman Saladin menace les États latins d’Orient.
Au total, neuf croisades auront lieu pour défendre ces territoires face aux attaques musulmanes, en vain. Les États latins d’Orient seront définitivement pris par les musulmans deux siècles après leur création, en 1291.
Mais les croisades n’ont pas uniquement opposé chrétiens d’Occident et musulmans. Lors de la quatrième croisade, entre 1202 et 1204, se déroule un événement particulier : les croisés, éblouis par les richesses de Constantinople se livrent au pillage de la ville.
Ce pillage engendre une séparation définitive entre les Chrétiens catholiques d’Occident et les chrétiens orthodoxes de l’Empire byzantin.
Il ne faut cependant pas réduire les relations entre les mondes chrétiens et musulmans à deux siècles de croisades. Au Moyen Âge, les relations entre chrétiens d’Orient, chrétiens d’Occident et musulmans ne sont pas toujours guerrières et agressives.
Elles peuvent aussi être apaisées et pacifiques, notamment grâce aux échanges commerciaux.
Échanges commerciaux
Échanges commerciaux
Jusqu’au Xe siècle, le commerce en mer Méditerranée au Moyen Âge est dominé par les Byzantins et les Arabes.
À partir du XIe siècle, ces échanges connaissent un fort développement. Des milliers de navires sillonnent alors la Méditerranée.
Dès la fin du XIe siècle, ce sont les villes italiennes qui dominent le commerce méditerranéen : Venise surtout, mais aussi Gênes et Pise.
Elles signent des accords avec les califes et l’empereur byzantin. Les marchands italiens obtiennent ainsi le droit d’installer des comptoirs dans les États latins d’Orient, comme dans la ville de Constantinople et dans les ports musulmans.
Comptoir :
C’est un établissement de commerce installé à l’étranger. Souvent installé dans un port, il sert d’escale maritime pour les navires commerciaux.
Les marchands italiens y achètent des produits de grande valeur, tels que la soie, les épices et les pierres précieuses venues d’Asie. Ils les revendent ensuite en Occident, où ces marchandises sont très convoitées.
On peut observer sur cette miniature du XIIIe siècle un chargement de marchandises dans le port de Venise.
Un chargement de marchandises dans le port de Venise. Miniature d’un manuscrit du XIIIe siècle, conservé à la Biblioteca Marciana de Venise, Italie
Le commerce et les expéditions militaires favorisent les échanges culturels entre les civilisations musulmanes et chrétiennes en Méditerranée. Ces contacts facilitent la diffusion de nouvelles connaissances en Europe et encouragent un métissage des cultures.
De multiples échanges culturels entre les civilisations
De multiples échanges culturels entre les civilisations
La diffusion de nouvelles connaissances et techniques
La diffusion de nouvelles connaissances et techniques
La Méditerranée est un carrefour d’échanges culturels. Les connaissances scientifiques du monde musulman se diffusent en Occident à partir de l’Espagne, de la Sicile et du Proche-Orient.
La fabrication du papier, la soie, les techniques d’irrigation, de nouvelles notions mathématiques comme le chiffre zéro, la médecine ou bien encore les techniques de navigation parviennent ainsi en Occident, à partir du XIIe siècle.
Par exemple, l’ouvrage du médecin musulman Avicenne a été traduit à Tolède, en Espagne, au XIIe siècle. C’est Gérard de Crémone, un savant italien, qui a réalisé la traduction de l’arabe vers le latin. Cet ouvrage devient dès lors la base de l’enseignement de la médecine en Occident. Il le restera jusqu’au XVIe siècle.
Des lieux de rencontre et de métissage : Tolède, l’Andalousie, la Sicile
Des lieux de rencontre et de métissage : Tolède, l’Andalousie, la Sicile
C’est à Tolède, en Espagne, et à Palerme, en Sicile, que l’on traduit en latin et en arabe les manuscrits de l’Antiquité grecque.
Le Coran est aussi traduit en latin en 1142. Les textes antiques et les textes arabes sont ensuite enseignés en Occident.
Des villes comme Tolède et les régions comme l’Andalousie et la Sicile sont des lieux où les civilisations de la Méditerranée se mélangent.
Ce sont des espaces de tolérance, où les croyants des différentes religions (chrétiens, musulmans, juifs) partagent des intérêts culturels, sociaux et économiques communs, et vivent en paix.
Ce métissage des cultures se retrouve particulièrement dans les œuvres d’art et dans l’architecture, où l’on peut apprécier tout à la fois les influences byzantines, arabes et occidentales.
Conclusion :
La Méditerranée est au carrefour de trois civilisations, souvent en conflit au Moyen Âge. La Reconquista, puis les croisades, sont des affrontements guerriers qui opposent les mondes chrétiens et celui de l’Empire arabo-musulman.
Cependant, les contacts entre les Byzantins, les chrétiens d’Occident et les musulmans ne sont pas seulement caractérisés par la violence. Les multiples relations commerciales, les rencontres culturelles et scientifiques rapprochent les chrétiens et les musulmans.