Le monstre : la part sombre de l'humain
Introduction :
Le personnage du monstre est inséparable de l’Homme. Il représente un obstacle pour le héros qui doit le vaincre. Le monstre sert alors à mettre en valeur les qualités du héros, telles que son courage ou sa force. Mais le monstre peut quelquefois abriter un véritable héros et un autre monstre peut se cacher là où on ne l’attendrait pas. À travers l’étude du conte de Jeanne-Marie Leprince de Beaumont, « La Belle et la Bête », nous verrons dans ce cours l’évolution du personnage de la Bête. Puis, nous étudierons la morale du conte.
Le conte et le personnage de la Bête
Le conte et le personnage de la Bête
La structure du conte
La structure du conte
Dans un conte, il existe une structure à respecter.
- La situation initiale ouvre le récit : on y présente le cadre spatio-temporel (où, quand) et les personnages. C’est aussi la situation que connaissent les personnages au début du conte.
- Puis intervient un élément déclencheur : il s’agit d’un événement qui lance l’action, comme une rencontre par exemple ou un voyage.
- S’ensuivent les péripéties : ce sont les actions qui découlent de l’élément déclencheur.
- Un élément de résolution apporte la solution au problème.
- Enfin, la situation finale clôt le conte : on retrouve à nouveau le cadre spatio-temporel et les personnages. C’est aussi la situation que connaissent les personnages à la fin du conte.
Le héros d’un conte poursuit une quête et doit surmonter des épreuves. Par exemple l’héroïne de « La Belle et la Bête » doit surmonter sa peur de la Bête pour pouvoir vivre au château avec lui.
Découvrir la Bête
Découvrir la Bête
« La Belle et la Bête » est un célèbre conte de Jeanne-Marie Leprince de Beaumont, publié en 1757 dans le livre Le Magasin des enfants. Il raconte l’histoire d’un marchand qui avait trois filles et trois garçons. Celui-ci se trouve condamné à mort pour avoir volé une rose dans la demeure d’un terrible monstre, à moins qu’une de ses filles ne se sacrifie à sa place.
La Bête surprend le marchand en train de voler une rose. Illustration du conte « La Belle et la Bête » par Walter Crane, 1874
Belle est la fille cadette du marchand, elle accepte le sacrifice demandé par la Bête et se rend au château où elle apprend à connaître le monstre.
La Belle apprend à connaître la Bête. Illustration du conte « La Belle et la Bête » par Walter Crane, 1874
Voici un extrait du dialogue entre la Belle et la Bête tandis qu’ils dînent ensemble pour la première fois :
« - Vous avez bien de la bonté1, dit la Belle. Je vous avoue que je suis contente de votre cœur ; quand j’y pense vous ne paraissez pas si laid.
- Oh ! dame oui, répondit la Bête, j’ai le cœur bon, mais je suis un monstre.
- Il y a bien des hommes qui sont plus monstres que vous, dit la Belle, et je vous aime mieux avec votre figure, que ceux qui, avec la figure d’homme, cachent un cœur faux, corrompu, ingrat2. »
1 La bonté désigne une qualité d’esprit, c’est être bienveillant, gentil.
2 L’adjectif ingrat désigne ici une personne qui est déplaisante, qui manque de grâce.
On peut voir que cet extrait est un dialogue grâce aux tirets qui marquent la prise de parole de chaque personnage mais aussi par la présence de verbes introducteurs de discours tels que « dit » ou « répondit ».
- Le temps dans un dialogue est bien souvent au présent de l’indicatif.
On le voit par exemple ici avec les verbes « avez », « avoue », ou encore « pense » qui sont au présent de l’indicatif.
Il s’agit d’une scène importante du conte puisque la Belle prend conscience des qualités de la Bête malgré son physique repoussant. Elle voit en lui de la « bonté » et cela atténue le dégoût et la peur qu’elle pouvait jusqu’alors ressentir en le voyant. La Belle cherche même à convaincre la Bête en la comparant à d’autres hommes, à l’aide du comparatif « plus que », dans « des hommes qui sont plus monstres que vous ». Elle dit l’aimer « mieux », malgré sa laideur, que d’autres hommes qui ne possèdent pas ses qualités.
De plus, dans le dialogue, le cœur est opposé à la monstruosité, à la laideur. Mais la Belle montre pourtant que la figure de la Bête (laide) peut être associée à un cœur bon, alors que la figure de certains hommes peut être associée à un cœur faux.
- La Belle parvient donc à surmonter sa peur et ses préjugés.
Préjugé :
Un préjugé est un jugement à l’avance, sans avoir pris la peine de réfléchir ou d’examiner les faits, et qui influence notre opinion.
La morale du conte
La morale du conte
Plus tard dans le conte, la Belle découvre que son père est malade. La Bête autorise alors la Belle à retourner chez elle à condition qu’elle revienne au bout de huit jours. Les sœurs de la Belle, qui sont jalouses, la retiennent tant qu’elles peuvent pour l’obliger à ne pas tenir sa promesse. Mais une nuit, la Belle rêve de la Bête et la voit mourante. Elle rentre alors au château et trouve la Bête sans connaissance.
La Belle trouve la Bête sans connaissance. Illustration de La Belle et la Bête de Walter Crane, 1874
« “Non, ma chère Bête, vous ne mourrez point, lui dit la Belle ; vous vivrez pour devenir mon époux ; dès ce moment je vous donne ma main, et je jure que je ne serai qu’à vous.” […] À peine la Belle eut-elle prononcé ces paroles qu’elle vit le château brillant de lumière […]. Quelle fut sa surprise ! la Bête avait disparu, et elle ne vit plus à ses pieds qu’un prince plus beau que l’amour […]. »
Les sentiments de la Belle pour la Bête ont évolué. On peut remarquer, d’après son discours, qu’elle ressent désormais de l’amour pour la Bête. Elle l’appelle en effet « ma chère Bête », l’emploi de l’adjectif possessif « ma » ainsi que de l’adjectif « chère » révèlent son attachement à la Bête. Elle lui fait même une promesse, celle de devenir sa femme et de lui être fidèle pour toujours. L’emploi du futur de l’indicatif pour les verbes « vivrez » et « serai » reflète cette promesse et le verbe « jure » exprime clairement ce vœu.
- La prononciation de ce vœu permet la métamorphose de la Bête en prince.
Une métamorphose est une transformation, un passage d’un état à un autre.
Il explique à la Belle qu’une méchante fée l’avait condamné à vivre sous cette repoussante apparence jusqu’à ce qu’une femme belle accepte de l’épouser.
- Il s’agit d’un élément merveilleux illustré par l’illumination du château du prince.
Un récit merveilleux présente des aspects surnaturels et cela n’étonne pas les personnages.
La Belle a réussi à dépasser l’apparence physique repoussante de la Bête et éprouve à présent un sentiment amoureux. Elle se trouve récompensée de sa bonté puisque la Bête se révèle être un prince. Elle deviendra reine et vivra heureuse aux côtés de son époux.
Les véritables monstres sont en réalité les sœurs de la Belle qui étaient orgueilleuses, jalouses et méchantes. Elles sont d’ailleurs punies à la fin du conte et transformées en statues par la fée qui avait transformé le prince en bête.
Ce conte enseigne au lecteur qu’il ne faut pas se fier aux apparences. Il a donc un but éducatif. Il instruit le lecteur à travers sa morale.
Conclusion :
Le monstre dans le conte « La Belle et la Bête » n’est finalement pas là où on l’attendait. L’auteur nous ouvre les yeux sur les préjugés qui nous aveuglent et nous amène à comprendre que l’on ne doit pas se fier aux apparences. Les monstres peuvent en réalité prendre de nombreuses formes.